Michel Louvain jeudi au Saint-Denis - Entertainer, de tout coeur

Ils sont arrivés contents, ils sont repartis comblés. Les spectateurs rayonnaient à la première montréalaise du spectacle des 50 ans de carrière de Michel Louvain, jeudi soir au Saint-Denis. Les femmes, surtout. Venues par autobus entiers. Par petits groupes. Entre amies. Amenées là par leurs filles. Ou seules. Toutes heureuses, pétillantes de bonheur. Et pour cause! Leur Michel Louvain a été tout ce qu'il devait être.

Il a été beau bonhomme, il a dansé plus souvent qu'à son tour (la forme spectaculaire, à 70 ans!), il a été parfaitement chic dans ses trois habits (un noir, un bleu, un blanc), il a été charmant, amusant, sympathique, attachant, pas prétentieux pour deux sous, il a chanté toutes les belles de son répertoire et tout un tas d'autres, standards américains et français, du Al Martino (Spanish Eyes) autant que du Aznavour (For me... formidable). Il a été entertaining, au moins aussi entertaining qu'un Paul Anka ou un Johnny Mathis, cent fois plus entertaining qu'un Michael Bublé (et ses boutons de manchette sont plus beaux). Il a parlé d'amour, chanté l'amour et «déclaré l'amour» deux heures durant. Cinquante ans d'amour, annonçait le programme. En deux heures bien tassées. Une vraie belle soirée. Je dirais même plus: une soirée exceptionnelle.

Sans blague. Pas le plus petit soupçon d'ironie dans l'affirmation. Un formidable show, vrai comme je vous le dis. J'insiste là-dessus parce qu'il est trop facile de regarder un tel spectacle de haut, de ne voir que le revêtement imitation de rocher qui cache les échafaudages des parties surélevées de la scène rutilante, de n'entendre que les effets de synthé certes quelque peu pompiers de Michel Ferrari, de ne signaler que les quelques notes à côté de la plaque. Facile et bête. Tout ça fait partie de la proposition Michel Louvain. Tout ça est Michel Louvain. Ça et 50 ans de scène. Michel Louvain? Un savoir-plaire chevillé au corps. Du charisme, oui, du charisme, à la pelletée. L'art de faire plaisir aux gens.

Ce public voulait une scène de gala, il l'a eue. Ce public voulait des couples de danseurs, il les a obtenus. Ce public voulait se souvenir du Club des autographes, de Jeunesse d'aujourd'hui, il a pu. Ces femmes qui avaient pour prénom Linda, Lise, Sylvie et Louise voulaient qu'on les chante et elles l'ont été. Ces femmes voulaient rêver d'Italie et de Naples au coucher du soleil et Michel Louvain leur en a fourni l'occasion. Rarement ai-je vu artiste de variétés aussi généreusement au service de son monde. En cela, c'était au moins autant leur spectacle idéal de Michel Louvain que le sien. Il n'imposait rien: il soumettait ses choix. En toute candeur.

Ainsi, par exemple, a-t-il offert Ce monde, la fameuse ballade popularisée par Richard Anthony en France et Louvain chez nous, comme un cadeau: on a compris qu'il ne la chantait plus en spectacle, l'avait un peu oubliée puis ressortie, se disant que les gens aimeraient peut-être la réentendre. Il avait visé juste: son interprétation, plus que sentie, a été ovationnée. Louvain exultait: il avait fait un bon coup. Coeur pur, aurait dit le moine bouddhiste, comme Tintin.

J'étais ému, moi aussi. Je ressentais une affection toute familiale pour ce monsieur honnête et gentil, que je connais par la télé et la radio depuis la petite enfance. Je me suis laissé emporter par l'enthousiasme général et j'ai entonné comme tout le monde les Buenas Noches Mi Amor, Un certain sourire, Pourquoi donc as-tu brisé mon coeur?, jusqu'à l'inévitable Dame en bleu. À la fin, moi aussi, j'étais plus heureux qu'en arrivant. Vrai comme je vous le dis. Vrai comme

Michel Louvain.

Collaborateur du Devoir

- Michel Louvain: 50 ans d'amour, en spectacle au Saint-Denis jusqu'à dimanche; au théâtre Capitole de Québec du 27 au 30 septembre; en tournée jusqu'à mai 2008.

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