Concerts classiques - Le bal des seconds couteaux

Les années se suivent mais ne se ressemblent pas. En 2005, les finances de l'Opéra de Montréal étaient en train de se délabrer à la vitesse grand V, mais le Gala était intense, jubilatoire et de haute tenue. En 2006, la quasi-totalité des objectifs financiers est remplie, comme s'en réjouissait dans son allocution d'ouverture Alexandre Taillefer, président du conseil d'administration, mais ce Gala de seconds couteaux ne fera pas date.

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GALA DE L'OPÉRA
Airs, ensembles et choeurs du répertoire lyrique. Dix-neuf solistes, Orchestre métropolitain du Grand Montréal, dir. James Meena. Salle Wilfrid-Pelletier, dimanche 3 décembre 2006.
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Des vingt-deux chanteurs prévus, trois s'étaient décommandés à la dernière minute, mais seuls deux airs furent annulés. Il restait neuf Canadiens, neuf chanteurs des États-Unis et une Chinoise. Chose frappante par rapport aux éditions antérieures, on notait un seul revenant étranger, l'excellent baryton John Fanning, très à l'aise dans le «Credo de Iago» de l'Otello de Verdi. Pour le reste, se retrouvaient sur scène quatre valeurs sûres québécoises (Corbisiero, Feubel, Hervieux et Lord), trois pensionnaires de l'Atelier lyrique et des nouveaux venus.

Parmi eux, deux seront les bienvenues à Montréal: la mezzo chinoise Guang Yang, au timbre nourri, à l'expression juste et au registre de poitrine superbe dans «O don fatale» de Don Carlos et, surtout, sa consoeur Elizabeth Bishop, brûlante de passion intérieure et faisant preuve d'une maturité vocale et artistique absolue. Cette chanteuse est une Santuzza (Cavalleria rusticana de Mascagni) idéale.

Pour le reste, on sera heureux de réentendre le baryton John Fanning, une autre mezzo, Keri Alkema, intéressante dans Rossini, et Antonio Figueroa, fin ténor de l'Atelier de l'OdeM qui devrait essayer Mozart. Sa collègue Charlotte Corwin a également bien paru, alors que l'on se demande ce qui a poussé le baryton Alexandre Sylvestre à se frotter à Wagner.

S'agissant de nos vedettes, Marc Hervieux a semblé vocalement très fatigué, forçant sur le registre physique; Manon Feubel, moins à l'aise qu'en 2005, a chanté un peu bas; Marie-Josée Lord a livré un beau Puccini, et Gianna Corbisiero fut plus convaincante dans les ensembles que dans son air.

Pour finir, signalons l'entrée au Panthéon de l'art lyrique de Fernande Chiocchio, un ténor élégant mais froid (Stephen Costello), une perçante réincarnation de La Castafiore (Amanda Pabyan), une assistance qui a semblé en baisse d'environ 10 à 15 % et un accompagnement orchestral un peu moins concentré qu'à l'habitude sous la direction de James Meena, auquel on souhaite un petit break par rapport à la scène montréalaise.

Collaborateur du Devoir

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