Patrick Lagacé succédera à Paul Arcand au 98,5 FM
Le journaliste vedette Patrick Lagacé succédera à Paul Arcand à la barre de la matinale du 98,5 FM. Un choix qui paraissait tout indiqué, mais qui reste néanmoins risqué. L’actuel animateur de l’émission du retour Le Québec maintenant aura de grands souliers à chausser, d’autant que le départ prochain du « roi des ondes » risque de transformer le marché de la radio à Montréal.
Patrick Lagacé entrera en poste à l’automne 2024. L’annonce a été faite mercredi matin lors de l’émission Puisqu’il faut se lever, confirmant les rumeurs persistantes des dernières semaines.
Ce ne sera pas facile, succéder à une légende de la radio comme Paul Arcand
Paul Arcand, 62 ans, avait déjà annoncé en juin dernier qu’il n’allait pas renouveler son contrat, qui s’achève en juin 2024. Il trône au sommet des cotes d’écoute radio dans la grande région de Montréal depuis un peu plus de 20 ans, d’abord à CKAC, sur la bande AM, puis au 98,5 FM depuis 2004.
Patrick Lagacé apparaissait comme son successeur naturel, lui qui s’est joint en 2019 au 98,5 FM, où il anime depuis Le Québec maintenant, à l’heure du retour à la maison. Il restera à la barre de cette émission jusqu’à son passage dans la prestigieuse case horaire du matin.
Patrick Lagacé compte également continuer d’écrire dans les pages de La Presse, mais moins régulièrement. Sa chronique y fera d’ailleurs relâche d’août 2024 à janvier 2025, lors de ses premiers mois à la barre de la matinale du 98,5 FM. « Merci à François Cardinal, mon rédacteur en chef à La Presse. François m’a appuyé avec enthousiasme quand je lui ai confié ce que le 98,5 FM avait en tête pour moi. Il ne m’a pas obligé à choisir. […] Ce lien que j’ai développé avec les lecteurs de La Presse depuis 2007 est trop fort pour ne pas continuer à le cultiver », a souligné l’ancien « franc-tireur » sur sa page Facebook.
Reste à voir maintenant ce qu’il adviendra du talk-show Deux hommes en or, qu’il coanime depuis 2013 sur les ondes de Télé-Québec. On ignore également qui héritera de l’émission du retour du 98,5 FM.
Un choix naturel
Si la décision de Cogeco ne surprend pas grand monde, plusieurs s’étonnent en revanche que l’annonce ait lieu maintenant, à un an et demi de l’entrée en poste du remplaçant de Paul Arcand. Les auditeurs ont plutôt l’habitude d’être mis devant le fait accompli lorsqu’un animateur quitte les ondes.
Mais encore là, Patrick White est d’avis que la stratégie adoptée est la bonne. « Patrick Lagacé est quand même très controversé pour des positions qu’il a prises dans le passé, notamment durant la pandémie. Je vois beaucoup de gens sur les réseaux sociaux qui critiquent sa nomination. En l’annonçant aussi tôt, Cogeco tend une branche d’olivier à ces auditeurs. On leur donne le temps de se faire à l’idée », souligne le professeur de journalisme à l’UQAM.
Chroniqueur depuis maintenant une vingtaine d’années, d’abord au Journal de Montréal, puis à La Presse, Patrick Lagacé s’est attiré davantage d’ennemis dans les dernières années que Paul Arcand, qui, malgré son style franc et direct, n’a jamais pris plaisir à la polémique.
Selon Claude Thibodeau, qui a longtemps été propriétaire de stations de radio à Québec, Patrick Lagacé s’inscrit néanmoins dans la pure tradition de la radio parlée privée montréalaise, qu’il décrit comme « controversée, mais light ».
« Les médias ont toujours été très consensuels à Montréal. Mais à un moment donné, les patrons ont vu ce qui se faisait aux États-Unis, et surtout de l’autre bord de la 20, à Québec. Ils se sont rendu compte que faire de la radio un peu baveuse, irrévérencieuse, ça pouvait être payant. Il s’est comme développé un modèle qui est propre à Montréal, mais qui est moins controversé que celui de Québec, avec André Arthur et Jeff Fillion. Les animateurs peuvent faire des montées de lait, dire leur opinion, mais jamais ils ne vont dépasser la ligne au point de faire face à des poursuites ou voir des commanditaires se retirer », souligne M. Thibodeau.
Nouvelle conjoncture
Claude Thibodeau, qui ne cache pas être en froid avec Patrick Lagacé depuis plusieurs années, lui souhaite toutefois la meilleure des chances. « Ce ne sera pas facile, succéder à une légende de la radio comme Paul Arcand. Pour beaucoup de personnes qui sont passées après de gros noms, ça ne s’est pas bien passé », ne manque-t-il pas de rappeler.
Chose certaine, le départ de Paul Arcand risque de rebattre les cartes dans le milieu de la radio à Montréal, qui est assez figé depuis plusieurs années. Selon le professeur White, ce chamboulement pourrait libérer un espace de marché pour une troisième radio parlée francophone à Montréal, entre ICI Première et le 98,5 FM.
Le p.-d.g. de Québecor, Pierre Karl Péladeau, a d’ailleurs récemment réitéré son intérêt d’avoir une antenne radio traditionnelle. La loi l’en empêche actuellement, car son entreprise possède déjà un quotidien et une station de télé dans un même marché. « M. Péladeau a laissé savoir il y a quelques semaines qu’il pourrait lui-même racheter Le Journal de Montréal. Il a aussi laissé entendre pour la première fois qu’il n’était pas sûr que les éditions papier de ses journaux allaient durer. Donc oui, il y a une porte qui s’ouvre pour une nouvelle radio. Mais à la fin, c’est le CRTC qui va décider », explique Patrick White.