Troubles sur la tour de verre de Radio-Canada

Les façades de la lumineuse nouvelle Maison de Radio-Canada ont beau être tout en verre, la société d’État n’a pas voulu être plus transparente, jeudi, quant au contenu caviardé de deux rapports d’audits effectués sur la gestion du projet de construction de ses nouveaux bureaux. En marge d’une visite du chantier des futurs locaux, le vice-président principal Michel Bissonnette a invoqué des négociations toujours en cours avec des fournisseurs.
Jeudi matin, Le Journal de Montréal révélait que Radio-Canada avait abondamment caviardé deux documents produits par le vérificateur PricewaterhouseCoopers (PwC), en invoquant notamment la protection des « secrets industriels ».
Les deux audits obtenus par le Journal cachent, selon la publication, des recommandations faites pour corriger des risques allant de « modérés » à carrément « critiques » pour Radio-Canada et qui pourraient avoir des impacts sur la réputation de la société d’État « ou des répercussions notables sur les revenus, dépenses et même les employés, définit le document ».

M. Bissonnette précise que ce phrasé provient d’une clause assez large de la Loi sur l’accès à l’information. Et si le vice-président affirme que de grandes parties des rapports n’étaient pas raturées, « tout ce qui était à des fins de concurrence, dans notre partie de négociation avec des fournisseurs, a été caviardé ».
Il resterait des appels d’offres à régler pour des enjeux technologiques alors que certaines parties de l’édifice restent encore à construire. « Et on ne voulait pas ces négociations publiques », de préciser M. Bissonnette.
Une Maison ouverte et lumineuse
Radio-Canada avait organisé jeudi une visite du chantier de son futur domicile, qui est construit au coût de 100 millions de dollars par le Groupe immobilier Broccolini.
La nouvelle Maison de Radio-Canada, dont l’adresse sera le 1000, rue Papineau, est composée de deux sections de quatre et sept étages, liées par un vaste atrium. Celui-ci est abondamment vitré et recouvert d’un plafond de bois. « Nous avons eu une préoccupation pour faire affaire avec des fournisseurs québécois », a souligné Roger Plamondon, président de Broccolini.
L’atrium sera ouvert au public, qui pourra entre autres zyeuter le studio radio principal et sa régie, ainsi que voir en hauteur le studio principal de RDI et les plateaux des téléjournaux de Radio-Canada et de CBC. « L’espace de l’atrium est de 1,2 million de mètres cubes, soit l’équivalent de 13 piscines olympiques », a illustré M. Plamondon.
Du côté ouest de la Maison sera aussi installée une place publique. Radio-Canada pourra y organiser des événements, et même projeter films et émissions sur le vaste mur extérieur du principal studio de production télé — qui sera environ 15 % plus gros que l’actuel studio 42, en plus d’être techniquement beaucoup mieux équipé.
Radio-Canada utilisera à l’avenir la technologie moderne IP, « plus générique dans le monde des technologies de l’information […] et agnostique des futurs formats », a expliqué François Vaillant, directeur général aux solutions d’ingénierie. Avec à la clé une grande flexibilité pour des diffusions de toutes sortes et en tous lieux.
Plus petit
L’impression de grandeur de l’édifice camoufle d’une certaine façon une réduction de taille importante. Alors que l’ancienne tour et ses vastes sous-sols s’étendent sur 1,3 million de pieds carrés, la nouvelle structure fait 418 000 pieds carrés. « C’est vraiment vivre dans plus petit », dit Michel Bissonnette. Les quelque 3000 employés travailleront dans des espaces à aire ouverte. Le nombre de studios de radio, par exemple, passera de 24 à 19.
« Nos membres doutent très fort que la nouvelle Maison puisse contenir l’ensemble des employés actuels, a expliqué pour sa part la présidente du Syndicat des communications de Radio-Canada, Johanne Hémond. Ils nous conditionnent au fait que ça va être un nouveau système de travail en aire collaborative, mais c’est beaucoup de choses à digérer et à gérer pour les individus. »
À temps
À ce jour, Roger Plamondon, de Broccolini, assure que le bâtiment (vide) sera livré à temps, soit en janvier 2020. Quant aux coûts, Michel Bissonnette se dit « assez fier » du fait qu’ils sont toujours fidèles au budget.
Le vice-président de Radio-Canada refuse encore de dire combien coûteront les dépenses technologiques dans le nouveau bâtiment. Quant aux frais pour aménager les lieux, aussi gardés secrets, il a laissé échapper que les 42 millions obtenus pour la vente de l’ancienne tour permettront de « couvrir une partie [des] frais d’aménagement ici ».