«Voir» abandonne sa publication papier

La gratuité, centrale au modèle d’affaires de «Voir», ne changera pas avec la disparition du papier, indique l’entreprise.
Photo: Marie-France Coallier Le Devoir La gratuité, centrale au modèle d’affaires de «Voir», ne changera pas avec la disparition du papier, indique l’entreprise.

Après 32 ans de présence en kiosque, le média culturel Voir ne paraîtra plus en papier : les activités se poursuivront toutefois de façon numérique.

« L’édition papier arrête, mais on n’arrête pas l’activité », a confirmé jeudi au Devoir le p.-d.g. de Mishmash Média, Nicolas Marin. Les employés et les annonceurs ont été mis au courant dans les derniers jours. La décision prend effet dès maintenant : le dernier numéro papier du Voir est donc paru.

« On ne le voit pas comme un échec ou une mauvaise nouvelle, soutient M. Marin. On [maintient] nos investissements en rédaction, on a signé de nouveaux collaborateurs… On le voit comme un repositionnement de produit pour être au diapason du marché. »

La décision n’affectera pas les effectifs, ajoute le dirigeant. Les activités du magazine L’actualité — autre propriété de Mishmash Média — ne sont par ailleurs pas touchées par le changement. Nicolas Marin n’a pas voulu commenter la situation financière de l’entreprise.

Pour Simon Jodoin, rédacteur en chef du Voir, « le magazine imprimé ne [pouvait] plus être pour nous un produit gratuit [permettant] de bien servir la scène culturelle, nos lecteurs et nos annonceurs, de manière agile ».

Cela parce que le papier est lourd et coûteux, a-t-il fait valoir dans une publication Facebook. « Imprimer un magazine haut de gamme gratuit comme nous le faisons depuis trois ans nous engage à un coût fixe d’imprimerie et de distribution énorme pour une PME médiatique et culturelle comme la nôtre. Avant même de penser au contenu […] nous devons passer l’essentiel de notre temps à rentabiliser ces opérations. C’est beaucoup de ressources et de focus que nous ne consacrons pas à notre mission première. »

Selon M. Jodoin, cela aurait été une « mauvaise décision de persister à sauver un contenant au détriment du contenu ».

Identité

 

Cela dit, l’identité de Voir sera maintenue sur les plateformes numériques, assure Nicolas Marin en parlant d’un magazine qui se veut une « référence culturelle », qui propose des dossiers, qui fait des sessions photo soignées, etc. Le Voir numérique « ne sera pas un empilement de nouvelles », promet-il.

Jadis un hebdomadaire, Voir s’est transformé en bimensuel en 2013, avant de passer au format magazine mensuel en janvier 2016. « On se rend compte que la culture se vit moins au mensuel, plus au quotidien, note M. Marin. On veut être dans une plus grande fréquence. »

Le modèle d’affaires de Voir — la gratuité et une dépendance aux revenus publicitaires — ne changera pas avec sa disparition des kiosques, indique par ailleurs Nicolas Marin. Le rôle de la Boutique Voir demeurera également « au coeur de la stratégie ».

Voir et L’actualité ont des salles de rédaction distinctes, mais partagent des services : production, diffusion, comptabilité, ressources humaines, etc. La direction de Mishmash Média a procédé cette semaine à l’abolition de deux postes au service du marketing.

Mishmash Média est membre du collectif Mishmash. Ce dernier est une filiale du fonds d’investissement XPND Capital, dont l’associé principal est Alexandre Taillefer. Le groupe est propriétaire de L’actualité depuis deux ans, et de Voir depuis avril 2015.

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