Prix Judith-Jasmin: la FPJQ réintègre une catégorie régionale

Après avoir soulevé la grogne de nombreux journalistes en retirant la catégorie « locale et régionale » des prestigieux prix Judith-Jasmin, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) a « reconsidéré sa décision » et réintégré le volet en cause à sa liste.
En début de journée, lundi, la FPJQ a dû répondre à plusieurs de ses membres partout en région qui estimaient, entre autres, qu’il était injuste que leurs médias, plus petits, moins riches et aux prises avec des défis bien différents, soient désormais en compétition avec des médias nationaux.
Dans un communiqué publié en fin d’après-midi, l’organisation a expliqué que « devant le tollé soulevé par la disparition de cette catégorie, la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, sensible aux réactions de ses membres, a reconsidéré sa décision et ajoute la catégorie « Meilleur reportage, catégorie Médias locaux et régionaux » à la liste de ses catégories. »
Cette année, la FPJQ a rebrassé presquetoutes les cartes de sa remise de prix annuelle, optant pour une approche par angle de couverture. La liste comprend les catégories Sports, Arts et culture et Arts de vivre, Justice et faits divers, Affaires et économie, ainsi que la vaste Sciences, environnement et société.
La conséquence de la mise en valeur de ces sujets, souvent mal ou pas du tout représentés par les prix Judith-Jasmin, était l’abolition d’autres catégories, comme Entrevue ou portrait, Journalisme spécialisé et, surtout, Nouvelles – médias locaux et régionaux.
Une volte-face « essentielle »
Paule Vermot-Desroches, journaliste au Nouvelliste de Trois-Rivières et présidente de la section régionale de la Mauricie de la FPJQ, avait reçu dès la matinée de nombreux messages de reporters de sa région, dont certains reconsidéraient même leur affiliation à la Fédération.
« Je suis heureuse de voir que leurs voix ont été entendues et qu’on a donné de l’importance à l’opinion des membres, écrit-elle au Devoir. Cette tempête aurait facilement pu être évitée si les sections régionales, ou à tout le moins nos représentants des régions sur le conseil d’administration, avaient été consultés sur le sujet. »
La journaliste surnuméraire à la radio de Radio-Canada à Rouyn-Noranda Lise Millette avait aussi fait entendre sa dissension lundi. Devant la volte-face, l’ancienne présidente de la FPJQ a estimé que le geste « était essentiel ». « À l’heure où le journalisme se bat pour sa survie en région, ne pas le reconnaître aurait été une véritable gifle pour ceux et celles qui le pratiquent. »
Mme Millette ajoute que « lorsque toutes les voix se seront éteintes, il ne faudra pas que déplorer, mais se demander si on avait vraiment tenté de reconnaître leur apport distinctif en matière d’information. »
Critères locaux
Le président de la FPJQ, Stéphane Giroux, a expliqué au Devoir que la refonte des prix avait « peut-être été mal expliquée, car au départ on voulait mettre plus l’accent sur l’impact local et régional dans toutes les catégories. Ça impliquait donc qu’on élimine la catégorie régionale. […] Mais au bout du compte, c’est évident que les membres qui travaillent en région tenaient à une catégorie bien à eux. »
M. Giroux précise au passage que le conseil d’administration de la FPJQ est désormais composé de plusieurs artisans des régions du Québec, ce qui n’a pas toujours été le cas dans le passé.
À l’heure où le journalisme se bat pour sa survie en région, ne pas le reconnaître aurait été une véritable gifle pour ceux et celles qui le pratiquent
Dans les faits, pour les prix Judith-Jasmin, la FPJQ mise désormais sur l’impact des reportages dans les communautés locales et en fait le critère le plus important dans son évaluation. Ce critère comptera pour 20 % de la note finale dans la grille d’évaluation.
Dans son communiqué, la FPJQ précise qu’au cours des éditions précédentes du prix Judith-Jasmin, la catégorie régionale « a maintes fois été critiquée. Ce sont parfois des reportages réalisés par des bureaux régionaux des grands médias qui y étaient couronnés ».
Un argument que n’accepte pas Paule Vermot-Desroches. « Là-dessus, je vais les inviter à refaire leurs devoirs, parce qu’au cours des sept dernières années, Radio-Canada a seulement gagné à deux reprises, en 2012 et en 2017. Sinon c’était La Tribune, Le Droit, Le Nouvelliste et L’Écho de Frontenac. »
Stéphane Giroux assure que la FPJQ « va lancer une grosse discussion ». Chaque année, la Fédération tient d’ailleurs une réunion avec toutes ses sections régionales. « On va en faire le sujet numéro un : comment réinventer les prix régionaux ? »