Congrès de la FPJQ: aide fédérale aux médias, pas une panacée, mais un appui important

Quelques jours après que le gouvernement fédéral ait annoncé des mesures d’aides aux médias, les journalistes québécois étaient rassemblés en congrès à Québec. Le premier constat sortant de la discussion d’ouverture entre patrons de presse est que cet appui fiscal n’est pas une panacée, mais qu’elle est un appui important pour assurer la survie des entreprises médiatique. Dans les carnets des dirigeants, on trouve le désir de créer des alliances, d’offrir du contenu plus ciblé et de diversifier le plus possible les sources de revenus.
L’impact des trois programmes fiscaux annoncés par Ottawa et les 595 millions sur cinq ans qui les accompagnent, est « du carburant à court terme », croit Claude Gagnon, p.-d.g. de Groupe Capitales Médias, ajoutant que « le plus important de l’annonce c’est le changement d’attitude. Avant le gouvernement disait qu’[il ne voulait pas aider] un vieux modèle d’affaire qu’il faut le remplacer par un autre plus moderne. Là, tout d’un coup, on devient un élément essentiel de la démocratie. »
Le directeur du Devoir, Brian Myles, croit que les différentes mesures fiscales, comme le crédit d’impôt sur la masse salariale et la possibilité pour les médias d’émettre des reçus de charité vont encourager la prise de risque. « Depuis 2017, il y a un total de 700 millions de dollars qui ont été annoncés par Québec et Ottawa. Les gouvernements ont entendu le message des éditeurs. […] Ça sécurise des emplois de journalistes et ça nous amène à un niveau de confort sur le risque technologique. »
Cibler
Reste que les médias ne pourront pas surfer sur cette aide et sur leur contenu traditionnel, estime M. Myles. « On n’est plus dans Fields of Dreams, c’est pas vrai que si je construis un stade au milieu du champ il va se remplir tout seul. Est-ce que le bon journalisme suffira ? Non. Il faut faire du contenu pour les bonnes audiences, trouver des niches. On amène aussi des codeurs, des analystes de données. Il faut migrer vers une culture de l’audience et les crédits d’impôt nous permettent de faire un pas vers ça. »
Le ciblage pourrait se faire dans le genre de sujets couverts, mais avec en trame de fond le désir grandissant du monde de la publicité de ne plus s’adresser à des masses floues, et plutôt à des types de lecteurs, « comme la femme de 34 ans qui veut s’acheter une voiture dans trois semaines », a expliqué Florence Turpault-Desroches, directrice principale de l’information à La Presse. Mais pour ce faire, il faut beaucoup de données sur son auditoire, et l’approche de l’alliance devient un angle d’attaque important. « On peut le faire soit avec des grands médias qui peuvent fournir des audiences, ou des entreprises privées, comme Kijiji, qui est fort sur la géolocalisation. On travaille activement là-dessus pour stopper l’hémorragie. »
L’intérêt de ces unions est de compétitionner les géants du Web comme Facebook ou Google, précise Claude Gagnon, dont l’entreprise s’est associée en ce sens avec Le Devoir et L’Acadie Nouvelle, entre autres journaux. « Ça prend du volume, il faut se diriger vers ça. Si on ne le fait pas, on ne pourra pas entrer dans ce terrain de jeu là. »
Les options restent nombreuses pour diversifier les revenus des entreprises de presse. Comme l’organisation d’événements ou même de voyages, ou l’adoption de modèles payants. La philanthropie est bien sûr dans le lot des solutions, ont estimé les patrons de presse.
Et il y a aussi le développement du jeune lectorat, qui reste un casse-tête. « Le défi ça va être la nouvelle génération, croit Florence Turpault-Desroches. Est-ce que ça va passer par l’éducation ? Là on voit qu’il y a une segmentation, les nouveaux lecteurs s’informent sur 546 plateformes, le concept de loyauté est différent. C’est là où il va y avoir un chantier à faire. »
Améli Pineda reçoit la bourse Arthur-Prévost
La journaliste du Devoir Améli Pineda a reçu samedi soir la bourse Arthur-Prévost, remise à un journaliste prometteur de la presse écrite, qui œuvre dans le métier depuis moins de cinq ans. La reporter reçoit ainsi un montant de 2000 $. Un jury issu de la profession a été impressionné par « la qualité de ses reportages, sa ténacité, son talent pour fouiller et vulgariser des dossiers juridiques complexes et sa passion pour le métier de journaliste. »
En recevant son prix pendant le congrès de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, qui se tient ce week-end à Québec, Mme Pineda a souligné l’importance de faire ce métier « pour l’intérêt public ». Cette année, la journaliste s’est démarquée entre autres en révélant les allégations d’agressions sexuelles visant Gilbert Rozon.
« Son travail d’enquête a fait les manchettes partout au pays, en plus de mener à la mise en place d’un fonds provincial de lutte contre les violences sexuelles », a souligné le jury composé de Lise Tremblay, directrice de l’information, Journal L’Express, de Valérie Ouellet, journaliste à CBC/Radio-Canada et de Patrice Gaudreault, rédacteur en chef au journal Le Droit. L’année dernière, le prix avait été remis à Christopher Nardi, du Journal de Montréal.