CKIA, la survivante des radios communautaires

Si CKIA va donc plutôt bien ces temps-ci, rien n’est jamais acquis, surtout pas son financement, déplore la directrice générale de la chaîne de radio. 
Photo: CKIA Si CKIA va donc plutôt bien ces temps-ci, rien n’est jamais acquis, surtout pas son financement, déplore la directrice générale de la chaîne de radio. 

Alors que la radio communautaire montréalaise CIBL a mis à pied tous ses employés en raison de difficultés financières, la situation similaire vécue en 2010 par la station CKIA, à Québec, refait surface. Retour sur le cas d’une station qui a survécu.

L’hiver 2010 s’est révélé sombre pour la station de radio communautaire de Québec, CKIA, installée au 88,3 FM. Aux prises avec une dette accumulée de quelque 120 000 $ et en retard dans les paiements de son loyer du complexe Méduse : il y avait péril en la demeure. Ce qui avait forcé la station à mettre à pied ses six employés et à créer un comité de survie.

« Il est minuit moins une », déclarait à l’époque le président du conseil d’administration de CKIA, Bryan St-Louis, qui avait auparavant été employé de la station.

La chanson résonne en harmonie avec celle qui se joue malheureusement en ce moment au 101,5 FM. Comme CIBL, CKIA « est une radio urbaine qui a vécu des difficultés, qui a fait le choix de n’avoir aucun employé », résume la présidente de l’Association des radios communautaires du Québec, Tanya Beaumont.

CKIA s’est relevée, mais elle aura passé quatre ans sans employés, le temps de rembourser les dettes, de déménager et de se refaire une santé financière.

« Tout avait déboulé en même temps, se souvient M. St-Louis, qui est toujours président du conseil de CKIA. Ce n’était pas des montants faramineux, mais quand ton seul financement récurrent c’est celui du ministère… On ne voyait pas la lumière au bout du tunnel. Il a fallu fonctionner à régime très, très réduit pendant plusieurs années pour arriver à s’en sortir. »

M. St-Louis, avec une petite équipe, a géré la crise pendant de longs mois, les soirs et les fins de semaine.

Estime-t-il que la mise à pied des employés était un bon choix ? « C’est jamais un bon move. Quand il n’y a pas d’employés, il n’y a personne qui travaille sur ça à temps plein, qui a une connaissance fine des dossiers. C’est nous qui signions les chèques, c’est nous qui achetions le papier de toilette, on a négocié le déménagement… On l’a fait parce qu’on n’avait pas le choix. »

Un des principes qui ont encadré la relance de CKIA, dit Bryan St-Louis, c’était de ne pas « repartir trop vite ». « On a bien fait le redémarrage, pour ne pas rester perpétuellement en crise. On aurait pu réengager des gens plus vite, mais est-ce que ç’aurait donné la radio qu’on voulait faire ? Peut-être pas. »

Redémarrer

 

Les choses vont beaucoup mieux aujourd’hui. CKIA a aujourd’hui cinq employés actifs. Seule l’émission Québec, réveille ! diffusée tous les matins de semaine, compte une équipe rémunérée.

La première à avoir été embauchée officiellement en 2014 est l’actuelle directrice générale, Lorinne Larouche.

« Je suis rentrée là-dedans un peu naïvement, et c’est peut-être ce qui a fait que j’ai eu du plaisir ! rit-elle. Tout était ouvert, tout était possible, et la station, sa mission, ses valeurs, ça me rejoignait. »

Mme Larouche se définit plus comme une gestionnaire que comme une bête de radio. C’est d’ailleurs ce dont CKIA avait besoin pour se relancer, estime-t-elle. « Tant que ça ne sera pas bien organisé, le reste ne tiendra jamais. »

L’autre approche qui lui a été chère a été de ramener CKIA à ses activités de base : la radio, et non pas la production de spectacles, ou l’organisation d’activités diverses. « On revient à l’essentiel de ce que nous sommes, c’est-à-dire une radio communautaire. Ç’a été ma ligne de pensée. »

En santé

 

Si CKIA va donc plutôt bien ces temps-ci, rien n’est jamais acquis, surtout pas son financement, déplore Mme Larouche. Elle déplore le fait que les subventions se font bien souvent par projet, et pour un an.

« Les gouvernements sont dans une logique où on ne veut plus que des organismes soient dépendants de la mamelle étatique, si je peux me permettre l’expression. […] J’apprécie le fait qu’on puisse aller chercher 50 000 $ pour un projet, mais l’année d’après, je dois tirer la plogue sur le projet parce que je ne peux pas [le refinancer]. Ça nous oblige à être continuellement en mouvement, et la radio est un média d’habitude, et donc on a de la misère à fidéliser nos auditoires. »

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