Télévision numérique - Le CRTC donne un sursis à Radio-Canada

Ottawa — La conversion de la diffusion analogique vers la diffusion numérique ne se fera pas à aussi large échelle que prévu le 31 août prochain: le CRTC a accordé hier un sursis d'un an à Radio-Canada-CBC pour éviter que les auditeurs de 22 marchés qui possèdent des «oreilles de lapin» ne se retrouvent sans service dans deux semaines.

Décidée par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications (CRTC) en 2007, la grande conversion de l'analogique au numérique est obligatoire dans les 28 principaux marchés canadiens. Les capitales provinciales et nationale et toutes les régions métropolitaines de 300 000 habitants ou plus sont notamment touchées.

Le changement affectera les foyers qui ne sont abonnés ni au câble analogique ni à la télévision satellite — ceux qui utilisent encore les antennes «oreilles de lapin», en somme. Environ 7 % des foyers canadiens et 9 % des foyers montréalais sont dans cette situation, selon le CRTC.

Parmi eux, ceux qui ont un téléviseur récent (moins de cinq ans) n'ont rien à faire pour se préparer: le signal numérique passe aussi par les ondes hertziennes. Il sera capté par les oreilles de lapin... qui deviendront subitement le relais d'une image beaucoup plus claire et d'un meilleur son. Ce qui permet au gouvernement d'affirmer dans une publicité qu'«il n'y aura plus jamais de neige au Canada»...

Les plus vieux téléviseurs devront toutefois être équipés d'un convertisseur à brancher entre l'antenne de réception et l'appareil pour continuer à capter des émissions sans abonnement à un câblodistributeur. Le bidule coûte entre 50 $ et 100 $. Aux États-Unis, le gouvernement a décidé de financer en partie l'achat de ces convertisseurs (40 $), mais pas Ottawa.

Radio-Canada refuse la conversion

En théorie, tous les marchés visés par la conversion devaient donc être prêts le 31 août. Mais la Société Radio-Canada (SRC) refuse toujours de convertir 22 émetteurs de retransmission et préfère mettre fin au service gratuit dans les marchés que ceux-ci desservent. Les auditeurs de CBC à Québec, à Saguenay, à Sherbrooke et à Trois-Rivières seront touchés par cette décision. Pour eux, une seule solution: s'abonner à un fournisseur s'ils désirent continuer d'écouter CBC.

Or le CRTC souhaite toujours faire changer d'idée la SRC, d'où le délai d'un an autorisé hier. «Nous avons un différend à ce sujet, indique le porte-parole du conseil, Scott Hutton. Le sursis nous permet d'ajouter ce dossier à une audience prévue pour juin 2012 sur le renouvellement des licences de Radio-Canada.»

La SRC a réagi en mentionnant que «la prolongation permettra aux téléspectateurs des marchés concernés de faire de façon plus graduelle la transition vers d'autres moyens de réception sans être trop désavantagés».

Le NPD rouspète

Pour le NPD, cette décision démontre néanmoins les ratés de la conversion à quelques jours de son entrée en vigueur. Dans une lettre publiée aujourd'hui dans Le Devoir, le député de Rivière-du-Nord, Pierre Dionne Labelle, affirme ainsi que «le gouvernement a manqué à ses devoirs» dans ce dossier. «Il a laissé aux diffuseurs le soin d'informer les gens sur la façon de se préparer à la transition. La campagne d'information menée par les diffuseurs est nettement insuffisante et des milliers de Canadiens risquent de se retrouver sans service», estime M. Dionne Labelle, même si le CRTC a obligé les télédiffuseurs à diffuser un certain nombre de publicités à ce sujet.

Le député demande aussi au ministre de mettre en place un programme d'aide pour les familles à faible revenu, «pour qui l'achat d'un convertisseur équivaut à faire des sacrifices dans la liste d'épicerie». Le ministère du Patrimoine canadien n'était pas disponible pour faire des commentaires hier.

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