Un conflit qui entre dans sa troisième année - 36 000 pétitionnaires pour un boycott du Journal de Montréal

Près de 33 000 personnes ont signé une pétition de boycottage du Journal de Montréal lancée il y a trois mois par la CSN sur le thème «L'injustice en vente partout». Le texte explicatif dénonce «la mauvaise foi de l'employeur». Le lock-out qui touche le quotidien de Quebecor entrera dans sa troisième année cette nuit.

Une nouvelle pétition est aussi relayée depuis le 14 décembre (jusqu'au 14 mars) par le site de l'Assemblée nationale. Cet autre moyen de pression en appelle à la modernisation de la loi anti-briseurs de grève afin de «rééquilibrer le rapport de force». Cette seconde pétition, appuyée par un député, a recueilli à peu près 2900 signatures.

Ce qui fait près de 36 000 pétitionnaires au total. Enfin, sans tenir compte des doublons, s'il s'en trouve. Rappelons que les lock-outés du Journal de Montréal sont syndiqués à la CSN.

«Il y a eu un travail intensif de sensibilisation et de solidarité à l'égard des syndiqués du Journal de Montréal», explique au Devoir Claudette Carbonneau, présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN). «Nous sommes satisfaits. Combien de fois on voit lancer des campagnes de boycott qui rêvent de changer le comportement de la moitié du Québec. Ce n'est pas ça. L'effet des grandes campagnes sociétales contre le tabac ou l'alcool au volant ne se mesure pas à court terme.»

Elle ajoute que «des centaines» d'assemblées syndicales ont été convoquées sur le thème du boycottage. En plus, le résultat de la pétition appelant au boycottage a été distribué à deux reprises aux 350 et quelques annonceurs du JdeM. «Certains nous ont dit qu'ils ne renouvelleraient pas leurs annonces, dit encore Mme Carbonneau. Je crois que ce n'est pas sans impact.»

La CSN demande aussi au gouvernement de modifier les dispositions anti-briseurs de grève du Code du travail du Québec dans sa première pétition appelant au boycottage. La vieille loi adoptée dans les années 1970 ne prévoyait pas la possibilité du télétravail. Les syndiqués du quotidien affirment que le recours à des travailleurs de substitution oeuvrant à distance facilite la production du journal tout en contrevenant à l'esprit de la loi anti-briseurs de grève. Deux jugements de tribunaux ont établi le contraire.

D'où la volonté de refonte du code. La proposition se retrouvera au centre des débats de la commission parlementaire sur le conflit qui commencera ses audiences dans deux semaines, à Québec.

Réaction de Quebecor

La direction de Quebecor, propriétaire du Journal de Montréal, refuse de commenter longuement le deuxième anniversaire du conflit. «Nous n'avons toujours pas l'intention pour l'instant de donner d'entrevues sur [ce sujet]», écrit au Devoir Serge Sasseville, vice-président aux affaires corporatives et institutionnelles de Quebecor. «Nous ne voulons prendre aucun risque d'envenimer les négociations en cours et nous craignons que des entrevues à ce sujet ne constituent un trop grand risque. Nous sommes d'avis que la solution de ce conflit de travail passe par la table de négociations. Nous entendons toujours conclure un règlement honorable et satisfaisant pour toutes les parties, par respect et reconnaissance des nombreuses années de services de la grande majorité des employés du Journal de Montréal, mais un règlement qui tienne compte du contexte très difficile dans l'industrie de la presse écrite [...].»

Mme Carbonneau confirme finalement que la tentative de rapprochement se poursuit devant le médiateur spécial nommé par Québec. La présidente refuse cependant de révéler l'état de cette démarche.

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