Le Devoir, c'est moi - De Drummondville à Delhi

Avocat de formation, l’ancien député péquiste Normand Jutras règle depuis son domicile de Delhi les questions légales et administratives qui vont de pair avec ce qu’il appelle sa «nouvelle carrière».
Photo: François Pesant - Le Devoir Avocat de formation, l’ancien député péquiste Normand Jutras règle depuis son domicile de Delhi les questions légales et administratives qui vont de pair avec ce qu’il appelle sa «nouvelle carrière».

Faire partie du Devoir, c'est y travailler, l'appuyer, le lire assidûment. De cette communauté, qui s'est construite depuis 100 ans, nous avons retenu quelques portraits. Chaque lundi, jusqu'en décembre, nous vous présenterons un lecteur, une lectrice, du Québec comme d'ailleurs, abonné récent ou fidèle d'entre les fidèles, une escapade qui nous mène cette semaine jusque dans les usines de Tata en Inde.

New Delhi — Député du Parti québécois dans la circonscription de Drummond pendant 13 ans, ministre de la Sécurité publique puis de la Justice sous Bernard Landry au début des années 2000, Normand Jutras est battu aux élections de 2007 par une étoile filante adéquiste nommée Sébastien Schneeberger, lui-même aussitôt défait l'année suivante par un tout nouveau candidat péquiste. Où est passé Normand Jutras depuis? Il est sur la route, dans tous les sens du terme, à des milliers de kilomètres de chez lui, entré dans la soixantaine au volant d'une «nouvelle carrière», comme il le dit si bien lui-même. Aux transmissions automatiques, fussent-elles «simplifiées», il n'y connaissait pas grand-chose, et pourtant le voici devenu une sorte d'expert — en ce sens qu'il faut apprendre vite et bien quand on apprend sur le tas.

«Vendeur» de transmissions automatiques? Pas exactement.

Un beau matin de juillet 2004, le téléphone sonne aux bureaux de CVTech, rue Labonté, à Drummondville, une entreprise qui fabrique depuis une quarantaine d'années ce qu'on appelle des CVT, des transmissions automatiques simplifiées qui entrent dans la fabrication des motoneiges, des VTT (véhicules tout-terrain) et des VSP («véhicules sans permis»: des micro-voitures vendues en Europe pour circuler en ville). C'est un représentant de Tata Motors, géant de l'automobile indien, qui téléphone. Il n'y a pas de réponse, les bureaux sont fermés, on est en pleines vacances de la construction. Il laisse un message sur le répondeur.

Ainsi va la vie. Les transmissions de CVTech vont — à terme — entrer dans la construction de la Nano, la mini-automobile que Tata veut commercialiser à grande échelle sur le territoire indien. Un marché aux potentialités énormes. Le modèle de base de la Nano — avec transmission manuelle — coûte à peine 100 000 roupies (moins de 2500 dollars), ce qui en fait l'automobile neuve la moins chère jamais produite au monde.

Et par quels méandres les gens de Tata ont-ils repéré CVTech? «L'entreprise fait des affaires en Europe, elle a une succursale en France. En démontant un VSP, ils ont vu le nom et l'adresse de CVTech sur la transmission, raconte M. Jutras. Le défi pour Tata était d'offrir aux consommateurs indiens des modèles avec transmission automatique, mais sans trop augmenter le poids et le prix de la voiture.»

Au loin


Normand Jutras venait de perdre ses élections; le président de CVTech, André Laramée, lui demande s'il ne voudrait pas aller en Inde jeter les bases du projet d'affaires avec Tata. «C'est plus loin que Québec!»

Parti pour six mois avec son épouse, Andrée, il y est depuis la fin de 2007 — non sans faire d'essentielles parenthèses pour rentrer voir les enfants.

Avocat de formation, Normand Jutras règle depuis son domicile de Delhi les questions juridiques et administratives: trouver les fournisseurs qui fabriqueront les pièces, ouvrir une usine, embaucher une centaine d'employés indiens. Un travail de moine. Il s'attend à passer l'année prochaine en mode production.

Et il demeure un fidèle et quotidien lecteur du Devoir, par la grâce du Web. «C'était le journal que mon père lisait à la maison quand j'étais jeune.» Il ne lit pas La Presse, «par principe». Navigue aussi sur les sites du Journal de Montréal et de Rue Frontenac — on le lui pardonne.

Mais il préfère de loin celui du Devoir: «Il est archiconvivial.» Ses lectures de prédilection: «Les chroniques de politique québécoise et fédérale.» On ne se refait pas.

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