Au sud de nos frontières - L'avenir de la presse suscite aux États-Unis un vaste débat

Une idée qui suscite passablement d'attention, c'est celle consistant à organiser ou réorganiser les journaux en sociétés à but non lucratif, pour les mettre ainsi à l'abri des impôts sur certains revenus et permettre aux entreprises et aux individus de déduire leurs frais d'abonnement ou de verser des dons donnant droit à un crédit d'impôt.
Les éditeurs de journaux et les représentants des syndicats discutent de projets où les journaux se constitueraient en sociétés à responsabilité limitée et à faible profit, qui combinent certains aspects des entreprises à but lucratif et à but non lucratif et imposent un plafond aux profits.Il existe déjà de nombreuses entreprises de presse à but non lucratif qui sont très en vue aux États-Unis, dont celle qui publie The Christian Science Monitor. Times Publishing Co., qui appartient au Poynter Institute for Media Studies, établissement d'enseignement à but non lucratif, publie le St. Petersburg Times (et quelques autres médias). Les bénéfices après impôts sont réinvestis dans l'entreprise et dans le Poynter Institute.
Attentes étatiques
De même qu'il n'y a pas de modèle d'affaires qui ramènera les journaux à l'époque récente de la rentabilité à deux chiffres, il ne semble pas y avoir de proposition législative qui stabilisera l'industrie de la presse. La question est d'autant plus compliquée que la participation du gouvernement soulève la possibilité de conflits d'intérêts.
Les éditeurs de journaux ont demandé au Sénat d'assouplir temporairement la loi antitrust pour qu'ils puissent s'entendre sur une nouvelle politique de prix pour Internet et de modifier la loi sur les impôts de manière à ce que les sociétés médiatiques puissent passer leurs pertes antérieures aux profits et pertes. Le ministère de la Justice n'a pas montré beaucoup d'enthousiasme pour étendre les exemptions de la loi antitrust, soulignant que la loi actuelle est assez souple pour répondre aux besoins du marché changeant des médias.
Une autre avenue possible a trait à l'exception d'usage loyal découlant de la loi sur le droit d'auteur. Des éditeurs disent que les agrégateurs ou les moteurs de recherche d'Internet tirent un avantage indu de la vente de publicité associée aux fonctions de recherche d'Internet, qui affichent les premières lignes ou les titres des articles originaux des journaux. Les entreprises Internet répondent que leurs politiques profitent largement aux journaux en dirigeant des millions de lecteurs vers leurs sites Web lorsque ceux-ci cliquent sur les liens affichés.
Des spécialistes des médias croient que la solution idéale serait un engagement à distance (arm's length) du gouvernement fédéral par lequel le Congrès apporterait un soutien financier général à la collecte de l'information, au lieu d'appuyer des journaux particuliers. Ils proposent aussi d'aider les journaux à se convertir en sociétés appartenant aux employés ou en sociétés à but non lucratif, d'augmenter le financement public d'organismes existants comme la Corporation for Public Broadcasting, de créer une fondation pour soutenir le reportage et de renforcer les programmes de journalisme affiliés à des établissements d'enseignement.
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Suzanne M. Kirchhoff est analyste en affaires et organisation industrielle au Service de recherche du Congrès américain.