«Peter Pan & Wendy»: ça manque de poussière de fée

Une nuit, la jeune Wendy Darling s’élance dans les cieux londoniens en compagnie de Peter Pan, un garçon capable de voler, mais qui refuse de grandir. Michael et John, les cadets de Wendy, ainsi que Clochette, une fée minuscule, sont du voyage vers le Pays imaginaire. Là-bas, le vil Capitaine Crochet fomente sa vengeance contre Peter. On connaît la suite, la pièce de J.M. Barrie ayant été maintes fois adaptée, fidèlement et librement. Où se situe Peter Pan & Wendy (Peter et Wendy) ? Entre les deux.
Produit par Disney, le film s’inscrit dans ce vaste chantier consistant à adapter en prises de vues réelles les classiques animés du studio.
Or, contrairement à Cinderella (Cendrillon), Beauty and the Beast (La belle et la bête) ou The Little Mermaid (La petite sirène), attendu le 26 mai, Peter Pan & Wendy ne sort pas en salle, mais atterrit directement sur la plateforme Disney+. On parle donc de budgets de production et de publicité moins élevés, pour un risque financier calculé.
Car il faut savoir que Hollywood s’est souvent retrouvé avec de coûteux flops sur les bras en transposant au grand écran les aventures imaginées par Barrie. Ce fut le cas avec les deux plus récentes tentatives : Peter Pan, de P.J. Hogan, en 2003, et Pan, de Joe Wright, en 2015. On serait presque tenté de parler d’une malédiction. Même Steven Spielberg, dont le Hook (Capitaine Crochet) rapporta pourtant de l’argent en 1991, se déclara déçu de son film.
Ce qui attire d’emblée l’attention relativement à cette production-ci, c’est qu’elle a été coécrite et réalisée par le prodigieusement doué David Lowery. Pour mémoire, on lui doit A Ghost Story (Une histoire de fantôme), méditation surnaturelle sur le deuil, et The Green Knight (Le chevalier vert), chronique moyenâgeuse ensorcelante. Dans un registre familial, Lowery a aussi réalisé Pete’s Dragon (Peter et Elliott le dragon), qui était déjà une adaptation en prises de vues réelles d’une animation de Disney.
Hélas, cette proposition se révèle moins « champ gauche » que Pete’s Dragon. Il est certes des changements intrigants, comme le passé du Capitaine Crochet, mais dans l’ensemble, on n’a jamais l’impression que Lowery s’est approprié le matériau dramatique : on sent la commande. Une commande expertement exécutée (mise en scène fignolée, compositions soignées), mais dénuée de passion ou d’une identité artistique.
Visuellement somptueux
D’ailleurs, dans le repaire de Peter, décors et éclairages évoquent Le labyrinthe de Pan, de Guillermo del Toro. On a également droit à un clin d’œil au « grenier troué » d’Edward Scissorhands (Edward aux mains d’argent), lui-même un hommage à L’enfance d’Ivan, d’Andreï Tarkovski.
Comme le chef-d’œuvre de del Toro encore, Peter Pan & Wendy, malgré son titre, est porté par une jeune héroïne qui refuse la réalité des adultes et qui fuit dans un imaginaire plus dangereux que prévu. C’est là la principale distinction de l’adaptation de Lowery par rapport aux précédentes : sa focalisation sur Wendy (l’interprétation d’Ever Anderson est justement la seule à avoir du relief). Une conversation entre Wendy et sa mère, puis une autre entre l’adolescente et Lily la Tigresse, suggère un angle féministe, mais cette préoccupation n’est au bout du compte qu’effleurée.
Tantôt énergique, tantôt léthargique, le rythme est quant à lui très inégal. Hormis l’affrontement final sur le navire, les péripéties manquent de cette poussière de fée dont Clochette a le secret. Bref, en dépit de ses qualités esthétiques, Peter Pan & Wendy n’est guère mémorable. Pour une levée de la malédiction, il faudra une autre adaptation.