«À propos d’Antoine», un beau-fils pas ordinaire

Autiste de niveau 3, déficient intellectuel, polyhandicapé, épileptique de haut niveau et non verbal, Antoine Parent-Bédard est entré dans la vie de Cathleen Rouleau quand cette dernière est devenue la petite amie de son père, le producteur et président-fondateur de l’agence ComediHa !, Sylvain Parent-Bédard. Neuf ans plus tard, l’adolescent de 15 ans tient son propre rôle dans la touchante et tendre comédie familiale À propos d’Antoine, aux côtés de sa belle-mère, qui en signe le scénario.
« À partir du moment où j’ai commencé à écrire la série, je me suis dit que personne d’autre qu’Antoine ne pouvait jouer Antoine, confie Cathleen Rouleau, rencontrée durant un point de presse suivant la présentation des quatre premiers épisodes. Cet enfant-là a un univers dans les yeux, il parle par les yeux. Il dégage quelque chose de tellement différent, beaucoup d’amour et de douceur. On aurait pu faire jouer Paul Moreau, sa doublure, qui a été phénoménal, qui nous a renversés et nous a fait pleurer quand il jouait les crises d’épilepsie. Paul aurait pu rendre quelque chose de crédible, mais il n’aurait pas pu rendre Antoine. Et c’est Antoine que je voulais voir à l’écran. C’est son histoire, et c’est important qu’il puisse la raconter. »
« Antoine avait du plaisir ; pour lui, c’était un camp de vacances. Il a fait beaucoup moins de crises d’épilepsie durant le tournage tant son cerveau était stimulé, poursuit le père du jeune acteur. Chaque fois que Podz avait besoin de lui, il était là. On a vécu beaucoup de deuils avec Antoine, mais aussi beaucoup de petites victoires. Cette série est une grande victoire. »
Si Podz, pour qui « la fiction est une machine à empathie », affirme qu’il était heureux de retrouver Claude Legault et Fanny Mallette — qui jouent les parents d’Antoine — dans un monde beaucoup plus lumineux que celui des Sept jours du talion et de 19-2, il a cependant dû se faire tirer l’oreille avant d’embarquer dans le projet, qu’il croyait trop léger pour lui.
« Sylvain m’a écrit un courriel de 20 pages pour que je reconsidère l’offre, que je relise le texte et que je les rencontre. Sylvain et Cathleen m’ont alors parlé de ce qu’ils vivent au quotidien, et c’est ce qui m’a le plus ému. Je voulais mettre à l’écran une réalité que je n’avais pas vue. Dans tout ce que je fais, j’essaie de donner une voix à ceux qui n’en ont pas », raconte le réalisateur, qui a fait place à beaucoup plus d’improvisation qu’à l’habitude, notamment pour l’épisode 9, où Antoine et sa famille vont à la foire.
Autofiction
Ayant grandement puisé son inspiration dans le quotidien mouvementé de sa famille reconstituée, Cathleen Rouleau raconte l’histoire du clan Fenouillard du point de vue de l’actrice Julie Picard, qui découvre en même temps que les spectateurs — auxquels elle s’adresse directement tandis que l’action s’arrête — l’entourage de son nouveau chum, Marc Fenouillard (Claude Legault), p.-d.g. d’un festival d’humour de Québec toujours scotché à son téléphone. « Je suis ben plus fin que Marc ! » jure par contre Sylvain Parent-Bédard.

Ayant quitté Montréal et son amoureux parfait, l’acteur Léandre Arsenault (Iannicko N’Doua), pour Marc, Julie rencontre le même jour Margot (Micheline Bernard), sa mère TDAH ; ses deux frères, Patrick le tempéré (Sylvain Marcel) et Philippe le sans-filtre (Hugues Frenette) ; son ex-femme exemplaire, Justine (Fanny Mallette) ; son turbulent fils cadet Georges (Édouard-B. Larocque) ; et, bien sûr, Antoine.
Dès lors, croyant qu’elle n’a pas sa place dans cette famille, Julie songe à quitter Marc. Mais Antoine saura faire fondre son coeur. Et celui des spectateurs, qui pourront également découvrir son quotidien — et les coulisses de la série — dans l’inspirant documentaire de Jean Bourbonnais Antoine le merveilleux.
« Ce qui est formidable dans cette série-là, c’est toute la bienveillance qui a été mise autour d’Antoine. On s’est demandé si ça pouvait se faire et comment on allait le faire. C’est quand même une première dans l’histoire de la télévision, un enfant polyhandicapé non verbal qui a un rôle important à jouer. Le premier jour, Podz a dit : “La série s’appelle À propos d’Antoine, et les tournages vont être à propos d’Antoine.” Tout s’est fait selon les besoins et le rythme d’Antoine, et c’est ce qui a créé cette petite magie dans la série », affirme Cathleen Rouleau, qui a déjà plein d’idées pour une deuxième saison.
« Avec cette série, j’ai appris à être beaucoup plus transparent dans ma façon de faire les choses. Il fallait que je le fasse pour entrer dans la tête d’Antoine, dans la famille. Le bout qui m’a fait peur, c’était de traduire le point de vue d’Antoine à l’écran ; je m’en suis alors remis à un petit film que j’avais fait sur l’île de Fårö, où vivait Bergman, et que personne n’a vu », conclut Podz.