«Chloe»: au moment de sa disparition

La différence entre l’image que quelqu’un projette et sa véritable identité est à la base de tout bon thriller. À cet égard, l’émergence des réseaux sociaux et leur emprise sur nos vies constituent des matériaux de choix. Dans la première série qu’elle pilote et dont elle a assuré l’essentiel de l’écriture et de la réalisation, Alice Seabright (Sex Education) exploite à merveille cette obsession toute contemporaine, qui devient chez son héroïne un moteur pour élucider une mort suspecte, au risque de se mettre en danger.
Dans Chloe, on suit au fil des six épisodes la quête fiévreuse de Becky Green (Erin Doherty, énigmatique à souhait), une jeune femme d’origine modeste et à l’existence terne, qui enchaîne les petits boulots et doit s’occuper de sa mère souffrant d’une démence précoce.
Cette accro aux enfilades numériques d’images léchées entreprend une enquête bien personnelle lorsqu’elle apprend qu’elle a reçu les deux derniers appels d’une ancienne amie de jeunesse, la Chloe du titre, dont la « vie parfaite » relayée sur les réseaux sociaux ne laissait pas présager une mort apparentée à un suicide.
Grâce à cette même existence numérique, Becky s’invente une identité et une vie de femme du monde qui lui permettent de pénétrer le cercle social sélect de la défunte, dans l’espoir d’élucider cette louche affaire et de peut-être améliorer son propre sort. Tout au long des six épisodes, le spectateur, pourtant complice de l’héroïne, ne peut faire autrement que se demander jusqu’où elle sera prête à aller pour assouvir ces deux obsessions, à la fois salvatrices et dangereuses. Et c’est ce qui rend totalement addictive cette production pas toujours très originale, mais d’une efficacité redoutable.