Sur vos écrans: Des femmes et des genres

Elizabeth Moss dans la série «Shining Girls»
Photo: AppleTv+ Elizabeth Moss dans la série «Shining Girls»

Traquer un meurtrier éternel

 

L’adaptation de romans à l’écran a parfois l’énorme désavantage de « divulgâcher » des éléments cruciaux du récit aux curieux qui n’ont pas lu les livres mais en ont consulté le résumé. C’est un peu ce qui arrive avec Les lumineuses, une série policière et fantastique dont il faut éviter le quatrième de couverture du roman de l’autrice sud-africaine Lauren Beukes qui l’inspire, Shining Girls. L’œuvre télévisuelle aborde ce récit à la ligne de temps passablement déboussolante en épousant le point de vue d’un personnage autre que celui qui est au centre du roman, ce qui vient complètement brouiller la progression dramatique, mais également les attentes des téléspectateurs, du moins ceux qui ne savent rien du livre…

Les lumineuses raconte la quête de vérité de Kirby Mazrachi, une recherchiste d’un quotidien de Chicago, survivante d’une agression violente qui a complètement perturbé sa perception de la réalité, dont le possible assaillant, qui serait en fait un tueur en série d’un genre très particulier, aurait refait surface… Avec l’aide d’un reporter vétéran, à la réputation écorchée par son penchant pour la bouteille, et malgré les réserves de son entourage, l’enquêtrice improvisée, à l’équilibre mental chancelant (pour des raisons que nous tairons ici…), incarnée magistralement par Elisabeth Moss (également productrice et réalisatrice sur ce projet), remonte la piste de son bourreau (Jamie Bell) à la longévité surprenante, et celle de plusieurs de ses victimes, toutes de jeunes femmes brillantes, de différentes époques du XXe siècle, à l’avenir prometteur. Il en résulte un thriller policier déstabilisant, entre autres à cause de ses accents fantastiques qui ajoutent des couches de mystère à son déroulement désordonné mais jamais incohérent, qui nous accroche solidement dès le premier épisode.


Les lumineuses (Shining Girls en V.O.A.)
Apple TV+, dès le 29 avril

 

Trois femmes et le commerce de la chair

 

Le titre de ce thriller policier et social flamand (une coproduction Belgique–Pays-Bas) ne fait pas de doute sur le milieu qu’il dépeint : le monde de la prostitution « légale », et ses dérives illégales, dans les quartiers rouges d’Amsterdam et Anvers, à travers le destin de trois femmes que rien ne semble lier au départ. Le meurtre d’une jeune prostituée illégale d’origine roumaine et la disparition mystérieuse d’un homme uniront par la force des choses Sylvia, une prostituée en fin de parcours, elle-même proxénète avec son conjoint qui dirige un vaste réseau de prostitution, Esther, une cantatrice endeuillée, et Evi, une jeune policière très investie dans son travail, mais pas assez dans sa vie personnelle. Le rapprochement de ces trois héroïnes, d’abord presque toujours confinées dans leur trame narrative respective, s’étend sur plusieurs épisodes, ce qui permet au récit aux multiples ramifications de se déployer dans toute leur complexité et de donner du relief aux nombreux personnages secondaires essentiels aux intrigues.

Les trois actrices principales (dont la cocréatrice de la série Carice Van Houten), récompensées du Prix spécial d’interprétation avec l’ensemble de la distribution au Festival Canneseries 2020, constituent l’une des forces de l’œuvre, forte mais terriblement sombre, car elles arrivent à maintenir l’intérêt du téléspectateur dans des moments où il aura peut-être envie d’abandonner l’écoute pour quelque chose de plus « joyeux ».


Red Light (V.F.)
Cluc Illico, dès le 28 avril

 

Maternité « obligée »

 

Les affres de la maternité, désirée ou accidentelle, constituent une excellente source d’intrigues comiques et tragiques dans les œuvres de fiction. Dans la comédie d’horreur britannique The Baby, récemment saluée par la critique au festival Séries Mania, c’est plutôt le refus de la maternité de son héroïne qui sert de moteur narratif. Natasha (Michelle de Swarte), une trentenaire indépendante, n’en peut plus de voir toutes les femmes de son entourage succomber à leur désir d’enfants et va se terrer dans les bois pour oublier cette situation. C’est alors qu’un marmot littéralement tombé du ciel aboutit dans ses bras et ne veut plus la quitter. Cette maternité bien accidentelle sèmera le chaos dans l’existence de Natasha, à jamais perturbée par ce poupon persévérant et un brin diabolique qui donne froid dans le dos. À moins qu’elle arrive à s’en débarrasser…


The Baby
HBO et Crave, en V.O.A., dès le 24 avril, 22 h 30, et Super Écran en V.F., dès le 25 avril, 21 h

À ne pas manquer

Recette française à la sauce anglaise
Après des adaptations québécoise (Les invisibles, qui n’a pas connu le succès espéré…) et indienne, voilà qu’on a droit à la version britannique de l’excellente comédie française Dix pour cent (renommée Appelez mon agent de ce côté de l’Atlantique). Les premières images de cette nouvelle incarnation laissent croire qu’elle respecte les prémisses et l’esprit d’autodérision qui caractérisaient l’originale et la rendaient si attrayante. Parmi les « talents » de l’agencelondonienne qui incarneront leur propre rôle, on note Helena Bonham Carter, Olivia Williams et Kelly Macdonald.

Ten Percent
Sundance Now, dès le 29 avril



À voir en vidéo