Sur vos écrans: inspirations, contradictions et diversion

Portraits nuancés de « monstres sacrés »
Les hasards de la programmation font que deux documentaires fort éclairants sur deux écrivains marquants, qui n’ont à peu près rien en commun, sont diffusés au même moment lundi. Un cas de magnétoscope, comme on disait dans l’ancien temps…
La série culturelle française Stupéfiant a consacré tout un épisode à l’auteur des Fleurs du mal, dont c’était le bicentenaire de naissance en avril dernier. Le documentaire ne fait heureusement pas dans l’hagiographie, même si de nombreux artistes de toutes les générations (Dany Laferrière, Clara Luciani, Serge Gainsbourg) et des spécialistes soulignent à grands traits le caractère avant-gardiste et exceptionnel de son œuvre. Il faut dire que Baudelaire, l’homme, semble avoir été, à bien des égards, un être pas très sympathique, particulièrement désagréable avec son éditeur (qu’il a enquiquiné pendant les quatre mois nécessaires à la mise en page et à l’impression du recueil qui l’a rendu célèbre) et passablement misogyne, même s’il a célébré les femmes de façon plutôt explicite dans son œuvre.
Ce portrait du « poète maudit » qui a éveillé les sens de générations de jeunes (et de moins jeunes) lecteurs est un peu éparpillé dans sa forme, très loin de la chronologie bien sage. Il montre bien les contradictions du personnage, mais aussi et surtout l’énorme influence qu’ont eue les poèmes de Baudelaire, par leurs thèmes sulfureux et leur beauté sombre, sur des pans entiers de la culture du XXe siècle et d’aujourd’hui.
Même s’il écrit des histoires glauques et terrifiantes (que Baudelaire n’aurait peut-être pas détestées), le romancier américain Stephen King semble beaucoup plus rayonnant et sympathique que l’auteur du Spleen de Paris. C’est du moins ce qui se dégage de la multitude d’extraits d’entrevues de toutes les époques qui constituent l’essentiel de ce documentaire produit par Arte, qui dresse un portrait plutôt chaleureux du maître de l’horreur et des palmarès des ventes de livres.
On découvre ainsi un homme qui a paradoxalement peur de tout, marqué par une enfance parfois difficile dans son Maine natal qu’il habite toujours, devenu un auteur populaire, boudé par la critique, qui s’est rattrapé avec le temps… Ce collage, qui allie des confidences sur la genèse d’œuvres marquantes, des extraits des nombreux films et nombreuses séries télé inspirés de celles-ci et les commentaires plus ou moins cinglants de King sur la société américaine, se laisse regarder avec plaisir, même si on s’intéresse peu aux ouvrages de cet écrivain. En fait, il nous donne plutôt le goût de nous y mettre. C’est dire.
Stupéfiant/Baudelaire, moderne et anti-moderne
TV5, lundi, 20 h
Stephen King, le mal nécessaire
Artv, lundi, 20 h
La science de diversion
Dès les premières secondes de cet autre documentaire produit par Arte, on soulève une question que plusieurs se posent depuis longtemps : « Le monde est-il devenu toxique ? » On aura tendance à répondre par l’affirmative au bout de cette petite heure bien tassée durant laquelle on expose les moyens développés par les grandes entreprises (et certains groupes de pression) pour semer le doute quant à la dangerosité de leurs produits. Notamment en faisant leurs propres recherches afin de ralentir le progrès des connaissances dans plusieurs domaines.
Cette démonstration implacable des stratégies mises en place par les industriels pour détourner le discours à propos des dangers du tabac, des pesticides, du bisphénol A ou de l’existence des changements climatiques, à laquelle participent plusieurs spécialistes, dont le sociologue québécois Yves Gingras, n’a rien pour rassurer. Elle fait néanmoins œuvre utile en mettant le doigt sur un phénomène inquiétant.
La fabrique de l’ignorance
Télé-Québec, mercredi, 20 h
Hansel et Gretel en cavale
Cette adaptation animée d’un roman graphique d’Adam Gidwitz ne propose rien de moins que la « vraie-fausse » histoire d’Hansel et Gretel. Les dix épisodes à l’esprit délinquant suivent ces petits héros « en cavale » dans plusieurs autres contes des frères Grimm. De quoi replonger en famille dans les contes « originaux »…Contes grinçants et grimaçants
Netflix, dès le 8 octobre
À vouloir cocher toutes les cases...
La chaîne Vrak renoue un peu avec le créneau « jeunesse » avec cette nouvelle fiction originale pour « jeunes adultes », un thriller psychologique sis dans les couloirs d’une résidence universitaire, dont les occupants seront ébranlés par un événement tragique. Le premier épisode de cette production du duo Anne Boyer et Michel D’Astous montre qu’à trop vouloir cocher toutes les cases de la représentation des diversités et des possibles drames « humains » que peuvent expérimenter les jeunes adultes, on risque d’égarer le public potentiel… Il faudra donc donner une chance au coureur après ce premier effort, pourvu d’une distribution intéressante (Noah Parker, Marine Johnson), mais malheureusement décevant.Campus
Vrak, mardi, 19h30