Le meilleur de la télé en 2020
The Queen’s Gambit, le coup de foudre
Qui aurait cru qu’une série sur une joueuse d’échecs allait devenir le plus grand succès de Netflix avec un record de 62 millions de visionnements lors de son premier mois ? Bien sûr, le regard hypnotique, l’élégance hitchcockienne et le jeu incandescent d’Anya Taylor-Joy sont pour quelque chose dans ce succès phénoménal. Créée par Scott Frank et Allan Scott, Le jeu de la dame doit aussi beaucoup à sa mise en scène qui traduit avec style l’obsession dévorante de l’héroïne aussi imparfaite que fascinante.
La télé-COVID qui a fait du bien

Des productions conçues à la hâte, avec beaucoup d’ingéniosité et de cœur par leurs artisans, auront marqué la télévision québécoise en cette année pas ordinaire et elles valent bien une petite révérence. Parce qu’elles nous ont « parlé » au quotidien en direct d’autres cuisines (Ça va bien aller, à TVA), ont diverti les plus jeunes tout en les aidant à continuer d’apprendre (L’école à la maison, à Télé-Québec) ou ont tout simplement ébloui, ému et rassemblé, à distance.
Les Appendices, de retour après la pause, le retour inespéré

Dans la froidure confinée de novembre, la renaissance de l’univers délicieusement absurde et souvent franchement niaiseux de la bande des Appendices, de retour en formation complète, a réchauffé le cœur des adeptes. Ils ont retrouvé intacts, dans cette nouvelle fournée de courts épisodes (offerts sur Tou.tv Extra), l’esprit et l’esthétique fauchée et psychotronique de la série originale avec ses attachants (ou énervants) personnages cultes, Sylvie, Guy, René et compagnie, et une galerie de recrues, dont certaines qui risquent de faire école. On en reprendrait en 2021, pandémie ou pas.
Ratched | Lovecraft Country, meilleures séries de genre

De tout temps, les films et séries de genre ont contribué à l’évolution des mentalités. Ainsi, on doit à Star Trek le premier baiser interracial à la télé. Séries campées dans les années 1940 et 1950, Ratched, récit d’origine de l’infirmière de Vol au-dessus d’un nid de coucou, et Lovecraft Country, où une famille blanche se révèle pire que le KKK, tendent un miroir peu flatteur de la société en dénonçant avec extravagance et flamboyance le sexisme, l’homophobie et le racisme.
Le dernier felquiste, meilleure série docu québécoise

Dans la déferlante de productions soulignant le 50e anniversaire de la crise d’Octobre, les journalistes Dave Noël et Antoine Robitaille (avec le concours de Félix Rose) ont apporté de l’eau au moulin de l’histoire grâce à leur enquête minutieuse et tortueuse sur le meurtre irrésolu de Mario Bachand, militant felquiste radical et pas tellement aimé au sein de l’organisation, à Paris, en 1971. Leur true crime politique tient en haleine avec ses révélations et ses revirements surprenants.
The Last Dance, meilleure série docu d’ailleurs

C’était un peu le Saint-Graal des amateurs de basketball : les images des coulisses de la dernière saison victorieuse des Bulls de Chicago de Michael Jordan. La minisérie The Last Dance les a révélées, au grand plaisir des fans privés de panier par la pandémie. Fascinante, la série nous a permis de mesurer le joueur de basket à l’homme qu’il est : sans pitié, colérique et plutôt égoïste. Pas besoin de s’y connaître en trois points, la légende se justifie d’elle-même.
The Plot Against America, l’adaptation qui fait mouche

L’uchronie imaginée par Philip Roth, plaçant l’Amérique sous la gouverne présidentielle d’un Charles Lindberg sympathique à Hitler, était déjà perturbante. Son adaptation au petit écran par David Simon, lancée alors que les États-Unis entraient dans une année plombée par la désinformation, est glaçante. Au jeu des correspondances avec le présent, l’allégorie politique haineuse mise juste. La réalisation, d’une sobriété parfaite, est magnifiée par une distribution de haut vol.
Raised by Wolves, culture contre nature

Innervée par les fixations de Ridley Scott, la dérangeante série de science-fiction marque les débuts imparfaits, mais hyperstimulants du cinéaste de Blade Runner au petit écran. Fable sociale et environnementale, cette dystopie créée par Aaron Guzikowski dans laquelle deux robots élèvent une poignée d’enfants après la destruction de leur monde soulève de passionnantes questions sur la foi et le débat impossible entre culture et nature chez l’homme.
Tiger King, la série phénomène

Série virale, Au royaume des fauves est arrivée dans nos foyers au plus fort du premier confinement. Complètement déjantée, la série documentaire de crime-réalité s’invite dans la bulle de Joe Exotic, « redneck, gai, polyamoureux » autoproclamé, propriétaire d’un zoo en Oklahoma, depuis fermé au public à la suite des pressions de PETA. La série phénomène aux multiples félins concentre le plus tordu d’une Amérique soumise à des chaos inimaginables.
C’est comme ça que je t’aime, meilleure série québécoise

Le duo Létourneau-Rivard a encore réussi à nous surprendre avec sa comédie criminelle et conjugale, grinçante, rocambolesque, mais surtout très drôle. Cette chronique d’un été meurtrier emprunte au true crime pour raconter les péripéties de deux couples à la dérive dans la chic banlieue de Sainte-Foy, en 1974. Le temps d’un camp de vacances, ceux-ci deviendront les nouveaux barons de la pègre locale. On a déjà hâte à la suite.
I Am Not Okay With This, meilleure série ado

À l’instar de Sophie Lillis, qui incarne Sidney, jeune fille se découvrant des pouvoirs de télékinésie, nous réclamons une seconde saison ! D’abord parce que nous adorons l’univers tordu du bédéiste américain Charles Forsman (The End of the F***ing World). Ensuite, parce que nous y aimons les références aux films de John Hugues et aux romans de Stephen King. Et enfin, parce que Netflix n’a pas le droit de nous abandonner alors que Sidney fait face à son destin.
Claire et les vieux, meilleure websérie québécoise

Claire et les vieux jette un regard empreint de tendresse sur l’enfance et son contraire. Que la websérie écrite par Sarah Pellerin et réalisée par Charles Grenier nous parvienne alors que les fractures entre les générations sont exacerbées par la pandémie ajoute à la magie de cette histoire d’une enfant de neuf ans forcée de séjourner dans la résidence de sa grand-mère. La jeune Irlande Côté y est tour à tour lunaire et solaire face à une Muriel Dutil bouleversante.
Lâcher prise et Schitt’s Creek, les meilleurs adieux

Parce que toute bonne chose a une fin, il a fallu se résigner à dire adieu à deux clans colorés qui nous ont fait vivre bien des émotions alors qu’ils devaient se reconstruire après de durs revers de fortune. Qui ne gardera pas un souvenir tendre de Valérie et de sa mère Madeleine, de Lâcher prise, et de l’excentrique famille Rose, de Schitt’s Creek ? Et que dire du baptême de la fille d’Éric et Kevin et du mariage de David et Patrick ? Deux finales qui nous ont mis un baume au cœur !
The Crown 4, meilleure suite

Le quotidien des Windsor n’étant pas des plus palpitants, il fallait s’attendre à ce que la série de Peter Morgan connaisse une baisse de régime à sa troisième saison. Or, avec l’arrivée de Margaret Thatcher (Gillian Anderson) et de Lady Di (Emma Corrin) à la cour d’Élisabeth II (Olivia Colman), The Crown a repris du poil de la bête. L’excellente quatrième saison dérange tellement que le gouvernement britannique a demandé à Netflix de présenter la série comme une… fiction !
I May Destroy You, le coup de semonce

La remarquable Unbelievable racontant la traque d’un violeur en série avait mis la barre haut. La magistrale I May Destroy You, de la Britannique Michaela Coel, va encore plus loin. Non seulement elle démonte les failles du système policier et juridique, mais elle décortique expertement les mécanismes subtils du consentement comme jamais une série ne l’a fait. C’est au surplus d’une finesse inouïe, porté par un texte en feux d’artifice et des acteurs sublimes.