«Fondations»: chauffer le dedans

Caméra à l’épaule, Olivier Asselin s’est penché sur la vie du forgeron Mathieu Collette pendant quatre ans. « La forge est ce qui a fait sortir l’homme de l’âge de pierre », raconte avec aplomb ce colosse qui a hérité du savoir-faire et de la parole animée de ses devanciers aux mains burinées par le travail du métal. « Cet âge de pierre, nous y retournons d’une certaine façon, ne serait-ce qu’en nous noyant collectivement dans la consommation », plaide-t-il dans Fondations.
Prix du meilleur long métrage documentaire au Fine Arts Film Festival de Los Angeles, Fondations raconte son combat pour la sauvegarde des Forges de Montréal, un bâtiment patrimonial abandonné appartenant à la Ville de Montréal. Rénové en école de forge par les soins de l’artisan, le centre de transmission du patrimoine vivant de réputation internationale a failli faire l’objet d’une expulsion (écartée à la sortie du documentaire, à l’été 2019). « Mon patrimoine va mourir avec moi, dit Mathieu Collette. Il faut que ce soit retransmis par l’oralité et par le geste. Il faut un endroit pour préserver le patrimoine immatériel. Ça prend un endroit pour pratiquer, pour retransmettre. »
Des apprentis se pressent pour l’écouter, de même que des enfants à qui, doucement, il apprend à tenir un marteau, à évaluer le son du métal sur l’enclume, à comprendre comment on peut plier la matière à sa volonté. Ce que montre surtout Fondations, c’est que ce projet d’un homme de sauver un bâtiment ancien de Montréal est devenu, petit à petit, un « projet collectif pour un quartier où on a à cœur de donner un élan différent », résume Olivier Asselin.