À voir le samedi 2 mars - Ciao pantin

À Lyon, la jeune, vive et séduisante Gabrielle est présentatrice météo pour la chaîne de télévision locale. Issue d’un milieu modeste et peu intéressée par la chose culturelle, Gabrielle n’en tombe pas moins sous le charme de Charles, un romancier érudit, célèbre, marié, et de 30 ans son aîné. Telle Alice dans le terrier du lapin, la voilà qui s’enfonce dans un univers de stupre et de perversité, le tout sous l’oeil aiguisé de Charles. Entre en scène Paul. Il est beau, il est riche, et il est de l’âge de Gabrielle. Seulement voilà, Paul a un grain: jaloux tendance psychopathe.


Dès les premières minutes de La fille coupée en deux, on respire à plein nez les effluves délétères émanant de l’univers de Claude Chabrol. Certains signes ne trompent pas: le vernis de banalité de la vie de l’héroïne, la passion amoureuse rimant avec pulsion de mort, les jeux de dupe modulés jusqu’au létal...


Le spectateur sait que Gabrielle est condamnée avant même d’avoir fait la connaissance de Charles, parce que le spectateur, contrairement à l’héroïne, sait que l’écrivain a arrangé la rencontre. Plus tard, Paul prendra le relais en ourdissant une vengeance machiavélique dont on ne prendra la pleine mesure qu’à la fin.


Comme Stéphane Audran dans La rupture et comme Marie Trintignant dans Betty, le personnage de Ludivine Sagnier est manipulé à son insu. Mais comme ses prédécesseures encore, cette femme-pantin finit par voir clair et peut alors couper les ficelles qui l’entravent.


La mise en scène de Chabrol est à l’image de la vie de la protagoniste: en apparence simple, mais en réalité fort complexe pour peu que l’on se donne la peine d’y regarder de plus près. Au final, l’art consommé du maître réside dans ce qu’il ne nous raconte pas tant une histoire de meurtre, c’est tellement banal, mais plutôt un récit d’émancipation, voire un récit initiatique pervers, sur fond d’histoire de meurtre en devenir. Voilà qui est plus singulier. Et plus chabrolien.

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