«John Wick. Chapitre 4»: plein la vue

Après un premier chapitre spectaculaire en chorégraphies mortelles mais mince en récit (un tueur à gages retraité se venge de ceux qui ont tué son chien, cadeau que lui a fait son épouse avant de mourir), le monde de John Wick est devenu plus vaste au fil de ses chapitres.
On y a découvert les lois qui régissent le « travail » des assassins gouvernés par la Grande Table, organisation internationale qui rassemble les représentants des plus grands syndicats du crime. Les quêtes du tueur chic et choc incarné par l’impassible (et parfait en cela) Keanu Reeves sont, elles, devenues plus risquées et meurtrières : le nombre de morts y explose comme les crânes sous une balle de revolver . Le site CinemaBlend dénombre d’ailleurs quelque 375 victimes dans les seuls trois premiers volets de la franchise.
Enfin, les longs métrages relatant lesdites quêtes, tous signés Chad Stahelski, ont gagné en… longueur : de 101 minutes pour le film original, on est passé à 169 pour ce John Wick. Chapitre 4 (V.F. de John Wick: Chapter 4), avec lequel l’ancien cascadeur qui doublait Keanu Reeves dans The Matrix et ses suites utilise avec brio les outils du réalisateur qu’il est devenu. Oui, c’est presque trois heures. Et pour une fois, ça ne veut pas dire que c’est trop long. En tout cas, pour qui a adopté cet univers où la violence, rythmée par l’impeccable trame sonore techno de Tyler Bates, est à ce point stylisée et exagérée (on se bat à 50 contre 1 !) qu’elle tient de la bande dessinée plus que du (faux) réalisme à la Mission : impossible.
Comme dans The Raid de Gareth Evans, on grimace de douleur (par procuration) tout en étant époustouflé par les combats à mains nues et les jeux du chat et de la souris menés arme(s) au poing. On est transporté des rues de New York au désert marocain, en passant par Osaka et une discothèque berlinoise où coulent la sueur, l’eau et le sang, avant d’atterrir à Paris. Là, on suit, bouche bée, une poursuite motorisée étourdissante autour de l’Arc de Triomphe ; et une autre, déjantée, dans les rues d’un Montmartre où tout écho bucolique d’Amélie Poulain a été effacé. On est enfin estomaqué lorsque les 222 marches menant à la basilique du Sacré-Coeur sont utilisées comme un « stairway to… hell ».
Cible mouvante
Tout ça pour raconter comment John Wick, sur le dos duquel la Grande Table a placé une cible (bonne chose ici d’avoir vu John Wick: Parabellum) et sur la tête duquel se trouve désormais une alléchante prime, va échapper (ou tenter de) aux tueurs qui sont à ses trousses et démolir (ou tenter de) l’organisation sous la chape de laquelle il a oeuvré pendant des décennies.
Entre autres à ses côtés, le haut personnel des hôtels Continental (véritables sanctuaires pour les tueurs qui respectent les règles) incarné, à Osaka, par le toujours spectaculaire Hiroyuki Sanada ; et, à New York, par un imperturbable Ian McShane et par le regretté Lance Reddick, décédé le 17 mars à 60 ans, affichant dans ce rôle qu’il tient depuis John Wick le sourire mystérieux du chat du Cheshire.
Contre le fugitif, parmi des centaines d’autres ennemis, un assassin aveugle qui a déjà été un allié (Donnie Yen, qui ne sait faire autrement qu’impressionner) ; un énigmatique tueur incarné par l’acteur canadien Shamier Anderson (qui mériterait son propre film dérivé au sein de cet univers) ; et Le Marquis, un méchant plus méchant que méchant joué par Bill Skarsgård qui, malheureusement, semble sur le pilote automatique quand il joue ce genre de personnage qu’on lui offre peut-être trop souvent. Pour l’occasion, il se dote d’un accent français aussi crédible que celui de Joseph Gordon-Levitt en Philippe Petit dans The Walk. Sans commentaire.
Au scénario, Shay Hatten et Michael Finch ont pris la relève de Derek Kolstad (qui a créé le personnage) et évitent les circonvolutions faussement lourdes de sens de Parabellum, qui ont fait croire que la franchise s’essoufflait. Ce Chapitre 4 monumental et assumant ce qu’il est prouve qu’il n’en est rien. Et justifie qu’un 5e volet de même qu’une série dérivée (Ballerina) soient en préparation. Pour mieux les attendre, on reste jusqu’à la fin du générique…