Les nouvelles frontières du cinéma québécois

La cuvée automnale du cinéma québécois sera particulièrement rafraîchissante et abondante cette année. On y découvrira bon nombre de jeunes cinéastes et on en retrouvera d’autres, plus établis, en terres inconnues. Au menu : des adaptations cinématographiques d’oeuvres surprenantes et des plaidoyers pour la justice sociale, entre autres.
Ce n’est effectivement pas tous les jours qu’une bande dessinée romanesque est adaptée au cinéma québécois. Mais c’est le pari qu’a voulu relever l’actrice et illustratrice Charlotte Le Bon avec Falcon Lake, son premier long métrage en tant que réalisatrice. Celui-ci marquera assurément la saison, avec ses images oniriques de la forêt laurentienne, son traitement sensible d’un récit initiatique envoûtant et sa trame sonore signée Klô Pelgag. Avec Sara Montpetit, Karine Gonthier-Hyndman et Monia Chokri. En ouverture du Festival du nouveau cinéma le 5 octobre, en salle au Québec dès le 14 octobre.
Également adapté d’une oeuvre littéraire, mais dans un tout autre registre, le dernier long métrage d’Anaïs Barbeau-Lavalette, Chien blanc, est campé dans la Californie tumultueuse des années 1960, en plein mouvement des droits civiques. Il s’agit d’une histoire originale autobiographique de Romain Gary, parue en 1970, alors qu’il habitait à Hollywood avec sa femme, l’actrice Jean Seberg. En ouverture du festival Cinémania à Montréal le 2 novembre, en salle au Québec dès le 9 novembre.
Mises en scène éclatées
Le cinéaste Stéphane Lafleur(Tu dors Nicole) ose quant à lui aborder des genres et des lieux inexplorés au cinéma québécois avec Viking, une comédie dramatique de science-fiction tournée dans le désert albertain. Cinq personnes recrutées afin de collaborer à la première mission habitée sur Mars y testent leurs limites, en huis clos. Le cinéaste et musicien d’Avec pas d’casque renoue avec le style de dialogues comiques et absurdes qu’on lui connaît, ainsi qu’avec la directrice photo Sara Mishara, qui livre ici des images magnifiques. Avec Steve Laplante et Larissa Corriveau. En première mondiale à Toronto le 11 septembre, en salle au Québec dès le 30 septembre.

Production coup de coeur plus modeste, mais tout aussi aboutie sur le plan de la mise en scène, Le rêve et la radio de Renaud Després-Larose ne laissera personne indifférent. Mettant en scène un groupuscule révolutionnaire marginal rappelant Ceux qui font les révolutions à moitié… (2016), le film est d’abord et avant tout une belle histoire d’amitié. En salle en septembre au cinéma Moderne, à la Cinémathèque et au cinéma Public, ainsi qu’en vidéo sur demande.
Situé au coeur des Adirondacks, le premier long métrage de Marianne Farley, Au nord d’Albany, qui sortira en salle le 2 décembre, s’annonce plus sombre et plus sérieux, mais semble tout aussi prometteur. Le film suit Annie (Céline Bonnier), une Montréalaise qui fuit précipitamment sa ville pour les États-Unis, avec ses deux enfants. La tension monte avec sa fille adolescente, Sarah (Zeneb Blanchet), lorsque la petite famille tombe en panne et se retrouve coincée. En salle dès le 2 décembre.
Se penchant sur la psychologie d’un protagoniste au passé trouble, La switch, de Michel Kandinsky, aborde le stress post-traumatique vécu par les soldats des Forces armées canadiennes. François Arnaud y interprète un soldat qui tente de réintégrer la société à son retour d’Afghanistan. Les lourds secrets qu’il porte se heurtent à la vie paisible qu’il veut mener dans le nord de l’Ontario. Ce film, tourné dans les environs de Sudbury, met également en vedette Lothaire Bluteau et Sophie Desmarais. En salle dès le 11 novembre.
Du côté des comédies
La comédie dramatique Tu te souviendras de moi, d’Éric Tessier, est certainement l’un des films les plus attendus de la saison, sa sortie ayant été reportée en raison de la pandémie. Adapté de la pièce de théâtre éponyme de François Archambault, le film met en scène Édouard (Rémy Girard), un professeur d’histoire à la retraite qui présente des problèmes de mémoire qui empirent. Celui-ci est placé sous la garde de Bérénice (Karelle Tremblay), qui l’amènera à revisiter son histoire personnelle. En première le 29 octobre au Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue et en salle dès le 4 novembre.
Une autre comédie versera encore plus dans l’humour et dans l’absurde. Il s’agit des 12 travaux d’Imelda, de Martin Villeneuve (Mars et Avril), frère de Denis. D’abord conçu comme un court métrage, ce film se déploie comme une série de saynètes inspirées de la grand-mère paternelle du réalisateur, qui s’amuse aussi à l’incarner. Le film compte sur une imposante distribution, des amis du réalisateur, dont Robert Lepage, Ginette Reno, Michel Barrette, Antoine Bertrand, Anne-Marie Cadieux et Yves Jacques. Au Festival de cinéma de la ville de Québec le 9 septembre, et ailleurs au Québec dès le 28 octobre.
Documentaires novateurs
Les documentaires ne sont pas en reste cet automne, avec des propositions tout aussi novatrices que celles des fictions. Bon nombre d’entre eux mettent en lumière des sujets politiques inédites. Rojek, de la cinéaste canadienne d’origine kurdo-turque Zaynê Akyol (Gulîstan, terre de roses), devrait s’avérer particulièrement percutant. Le film nous présente des membres incarcérés du groupe État islamique et leurs femmes, détenues dans des camps-prisons. En première aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal, en novembre.
Avec un sujet québécois, mais non moins nécessaire, le documentaire Fuir de Carole Laganière a été tourné dans une maison pour femmes victimes de violence conjugale. Des victimes y témoignent de leur résilience à visage découvert, appuyées par leurs intervenantes dont on apprend toute la nécessité du travail. En salle dès le 16 septembre.
