Clap de fin pour «Les jours heureux»

La fébrilité était palpable, mercredi, à la Maison symphonique, lors de la dernière journée de tournage du troisième long métrage de Chloé Robichaud, Les jours heureux. L’équipe du film était rassemblée avec une soixantaine de figurants, en plus des musiciens de l’Orchestre Métropolitain (OM), afin de tourner les dernières scènes, avant d’entamer la postproduction, qui doit s’étendre jusqu’en janvier prochain.
Sophie Desmarais, qui y incarne une cheffe d’orchestre vivant une relation toxique avec son père (Sylvain Marcel), a pu bénéficier des conseils du maestro Yannick Nézet-Séguin pour diriger les musiciens de l’OM. En plus de prendre part au tournage, ces derniers interprètent les extraits musicaux retenus par la réalisatrice, qui a préféré ne pas dévoiler de titres. Le chef de l’OM, invité au Festival d’été de Baden-Baden, en Allemagne, cette semaine, a également agi à titre de conseiller artistique et musical.
« Yannick a apporté de petits détails pour rendre le film le plus réaliste possible », soutient Chloé Robichaud, qui affirme avoir travaillé sur ce projet avec le chef d’orchestre pendant deux ans. « Quand on a tourné les scènes de répétition, fin mai, Yannick pouvait m’aiguiller en me disant que ce serait intéressant de filmer tel ou tel musicien — ils sont quand même une soixantaine. Ça m’aidait de savoir qui allait faire quoi à quel moment, afin de mettre ma caméra au bon endroit. »
Explorer un autre milieu
Après s’être intéressée à la course (Sarah préfère la course, 2013) et à la politique (Pays, 2016), Chloé Robichaud a voulu plonger dans un milieu complètement différent, mais où les femmes sont toujours sous-représentées : « J’aime entrer dans des milieux, j’aime mettre des femmes dans des positions où on ne les voit pas. »
La cinéaste souhaitait aussi marquer une rupture par rapport à ses autres films, notamment à la mise en scène. Elle a donc fait appel, pour la première fois, au directeur photo Ariel Méthot (Tadoussac, de Martin Laroche). « C’est un film qui est très différent de tout ce que j’ai fait avant : les gens vont être étonnés. Ça bouge tout le temps ; on suit le parcours de quelqu’un qui va se rapprocher de l’émotion, et c’est comme si j’avais fait la même chose avec ma mise en scène. » Elle raconte même qu’Ariel Méthot « dansait sur la scène avec sa caméra au rythme de la musique », allant jusqu’à le surnommer « l’homme qui danse ».
Quant à Sophie Desmarais, elle n’en est pas à sa première expérience avec Chloé Robichaud, puisqu’elle avait tenu le rôle-titre dans le premier long métrage de la cinéaste, Sarah préfère la course, qui l’a fait connaître en 2013. « Sophie s’est imposée rapidement, car c’est l’une des comédiennes qui a le plus d’intériorité », indique la réalisatrice. « Comme dans Sarah préfère la course, il y a tellement de choses qui se passent à travers ses yeux. Quand Emma [son personnage] dirige, il n’y a pas de mots, juste ses intentions, son regard. »
Une coupure jusqu’aux cheveux
Chloé Robichaud affirme aussi qu’elle a imaginé très tôt, en cours d’écriture, le personnage d’Emma avec des cheveux courts, pour créer un contraste avec les rôles précédents de l’actrice. « Un rôle de femme cheffe d’orchestre, c’est quelque chose de rare dans l’histoire de notre cinéma. J’avais comme le goût de marquer cette coupure, même par les cheveux », explique-t-elle.
Les jours heureux met également en vedette Sylvain Marcel, Nour Belkhiria, Maude Guérin, Yves Jacques, Vincent Leclerc, Katherine Levac et Jean-Philippe Baril-Guérard.
Le producteur du film, Pierre Even, d’Item 7 (C.R.A.Z.Y., de Jean-Marc Vallée ; Maria Chapdelaine, de Sébastien Pilote), était aussi présent ce jour-là à la Maison Symphonique. Il a même eu droit à son moment de gloire en servant de doublure à Yves Jacques pour quelques plans.
« On touche du bois pour que le film soit sélectionné dans des festivals », dit Pierre Even. Les jours heureux devrait prendre l’affiche à l’automne 2023.
Avec Manon Dumais