Deux Québécois de retour au Festival du film d’animation d’Annecy

Avec son œuvre «They Dance with Their Heads/Ils dansent avec leurs têtes», Thomas Corriveau est de retour en compétition officielle au Festival international du film d’animation d’Annecy, cette année, avec une œuvre onirique aux couleurs resplendissantes.
Photo: Thomas Corriveau Avec son œuvre «They Dance with Their Heads/Ils dansent avec leurs têtes», Thomas Corriveau est de retour en compétition officielle au Festival international du film d’animation d’Annecy, cette année, avec une œuvre onirique aux couleurs resplendissantes.

« Être sélectionné à Annecy, c’est déjà gagner quelque chose », assure l’illustrateur et réalisateur Claude Cloutier. Après avoir été à l’affiche du Festival REGARD de Saguenay, son court métrage d’animation Mauvaises herbes a été retenu dans la Sélection officielle de la 60e édition du prestigieux Festival du film d’animation, tout comme They Dance with Their Heads/Ils dansent avec leurs têtes de Thomas Corriveau, le second film québécois en lice pour le prix Crystal du meilleur court métrage d’animation qui sera décerné en clôture du festival samedi.

Après une édition 2020 virtuelle, le Festival international du film d’animation d’Annecy se déroule présentement en formule hybride, devenant ainsi le premier grand rassemblement culturel à se tenir devant un public en France depuis le déconfinement. Claude Cloutier, cependant, devra vivre l’expérience devant sa webcam : « Ça me pince le cœur de ne pas y être cette année, reconnaît-il. Il y a des gens que je croise uniquement à cet événement, des gens de la grande communauté du film d’animation, des amis qui viennent de partout dans le monde. Et en plus, Annecy, c’est fabuleux, un lac cristallin, des montagnes comme des murs tout autour ! »

L’événement, qui comprend un volet professionnel, le Marché international du film d’animation d’Annecy, est une référence, affirme Cloutier. « C’est dur de se rendre là, et ça me soulage, en fait, d’avoir été sélectionné. Ça fait plusieurs années que je fais ce métier, j’ai eu plusieurs films sélectionnés déjà. Ça me ferait mal de ne pas l’être. Les gens ont des attentes lorsqu’on est un peu connu dans le milieu. »

Coproduit par l’Office national du film, Mauvaises herbes — que les cinéphiles peuvent visionner jusqu’au 27 juin sur la plateforme en ligne du festival du court métrage REGARD moyennant l’achat d’un laissez-passer donnant accès à plus de 150 autres films — arrive dans la foulée du succès de son précédent Auto portraits, primé aux Sommets du cinéma d’animation de Montréal en 2015.

Claude Cloutier affiche à nouveau son penchant pour la critique sociale, accompagnée d’une bonne dose d’humour absurde : Mauvaises herbes met en scène deux plantes carnivores se disputant les mêmes insectes — « c’est la quintessence de la rivalité », dit Cloutier, qui dessine ainsi de son trait raffiné une fable sociale. Le graphisme épuré et précis du film évoque le travail du Français Gustave Doré (1832-1883), qui a notamment illustré les contes de Perrault.

« L’absurdité est importante dans mon travail : j’ai toujours voulu faire rire et je suis un consommateur d’humour », raconte l’illustrateur, qui a œuvré pour le magazine Croc dans les années 1980. « J’aime bien que le véhicule de l’idée dramatique soit léger, comique, bien qu’on puisse rire jaune à la fin. »

Ils dansent avec leurs têtes

 

Il y a quatre ans, le réalisateur, artiste visuel et professeur à l’École des arts visuels et médiatiques de l’UQAM Thomas Corriveau avait vu son précédent film, La bêtise, être sélectionné en compétition au festival d’Annecy, dans la section Animation Off-Limits. Avec le plus lumineux They Dance with Their Heads/Ils dansent avec leurs têtes, le voilà de retour en compétition officielle avec une œuvre onirique aux couleurs resplendissantes.

« Quand j’ai terminé La bêtise, je trouvais que, dans le contexte des films d’animation auxquels j’ai assisté, c’était un film assez austère. Pour mon film suivant, j’ai pris le parti qu’il soit vraiment très coloré, qu’il bougerait de manière plus soutenue », en partant d’une idée très singulière : reproduire le travail de danseurs, mais en ne montrant que leurs visages, leurs expressions faciales. Ainsi, le personnage principal du film est la tête d’un danseur reproduite à l’écran à partir de sessions de travail filmées en studio avec les danseurs.

« Ce qui m’intéressait, c’était de souligner les filiations entre la danse et le portrait en peinture dans l’histoire de l’art, raconte Thomas Corriveau. Donc, j’ai demandé aux danseurs de s’exécuter en pensant à leur tête, qui serait au centre de l’image. Mais je voulais que le corps bouge ; et lorsqu’ils dansaient à deux, ils se touchaient beaucoup, avec leurs têtes. Tout ça a servi de matériel de départ pour ce film. »

Dans le film, explique le réalisateur, la tête, au départ, est « morte », immobile, jusqu’à ce que la caméra s’approche d’elle et la réveille. « C’est un film instable, avec des images qui prennent vie. Je trouve ça bien magique. Comme spectateur, ensuite, on doit entrer dans le film et interpréter ce qu’on y découvre. Et c’est comme ça pour moi aussi avec la peinture, dans toute l’histoire de l’art jusqu’à aujourd’hui : il y a de ces œuvres qu’on fixe au mur, puis, en les regardant, on les anime. Un bon tableau, c’est quelque chose qui se découvre chaque fois qu’on le regarde », dit l’artiste, qui participera cet été au Symposium international d’art contemporain de Baie-Saint-Paul.

Enfin, le Festival international du cinéma d'animation d'Annecy projettera également Lolo, court-métrage de la réalisatrice montréalaise Marie Valade, également codirectrice du Festival Stop Motion Montréal. Le film « est un voyage à la fois comique et sombre explorant la relation d'amour-haine d'une femme pour son corps et sa féminité », précise le programme. 

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