«Dans la brume»: à temps pour Fantasia

Le 12 juillet s’ouvrira à Montréal le festival Fantasia, grande célébration de ces films dits « de genre », dénomination fourre-tout s’il en est. Les amateurs, quelque 100 000 fidèles chaque année, n’ont que faire de l’étiquette, heureux de savoir qu’ils trouveront invariablement de quoi sustenter leur appétit en matière de science-fiction, de fantastique, d’horreur, de psychotronisme, d’humour bizarre et d’étrangeté tous azimuts. D’ailleurs, les fusions ne sont pas rares. Ainsi le film d’ouverture, Dans la brume, de Daniel Roby, relève-t-il à la fois des première et seconde catégories.
On y suit les péripéties d’une petite famille prisonnière des toits parisiens après l’apparition d’une mystérieuse brume toxique, partout, en contrebas ; avec Romain Duris et Olga Kurylenko.
« C’est la société Quad films [Les intouchables, Le sens de la fête] qui m’a fait parvenir le scénario. C’est une commande, mais il y avait des éléments originaux que je n’avais jamais vus ailleurs. La perspective de tourner avec un bon budget un film de studio me plaisait », explique le cinéaste québécois qu’on a attrapé en plein travail sur le film dans une salle de mixage de Montréal.
Un bon candidat

Après Funkytown et Louis Cyr, c’est dire que Daniel Roby revient un peu à ses premières amours fantastiques, la fable vampirique La peau blanche, d’après le roman de Joël Champetier, l’ayant signalé à ses touts débuts.
« J’avais envie de ça, c’est vrai. Et ce qui était d’autant plus excitant, c’est que Dans la brume est un des premiers films produits par le nouveau studio cinéma de TF1. TF1 est la plus grosse chaîne de télé française. Là, ils se sont lancés dans la production de films et ce projet-ci les excitait beaucoup. Le cinéma commercial français touche peu à ces genres-là ; Europa en fait, mais en anglais. Bref, avec mon expérience variée de cinéma populaire, mais avec du contenu, j’étais un bon candidat », résume Daniel Roby.
Or, puisque le film est sorti ce printemps en France (4 étoiles dans Positif, revue mensuelle de cinéma), comment se fait-il que Daniel Roby soit en train d’en peaufiner la postproduction à Montréal ?
« Comme ça arrive parfois en cinéma, à un moment, il y a eu un désaccord entre les producteurs et moi au sujet de certains éléments du film ; sur la fin. Le compromis auquel on est arrivé a été que j’accepte leur dénouement pour le marché français, mais que moi, je puisse sortir ici, au Québec, ma version. Je croyais avoir mon été pour travailler là-dessus, mais la proposition de Fantasia m’a forcé à un blitz ! J’en suis ravi ! »
Dans la brume prendra l’affiche le 10 août. Voilà donc pour l’ouverture et la première mondiale de ce director’s cut.
De Cage à Bujold
En clôture le 1er août, Fantasia a fait une jolie prise avec la première canadienne de Mandy, de Panos Cosmatos, remarqué à Cannes et à Sundance. Film aux allures de cauchemar fiévreux, Mandy conte la traque en forêt, vers 1983, d’un homme décidé à se venger de la secte qui a massacré l’amour de sa vie. Avec un Nicolas Cage dont les débordements de jeu promettent d’être utilisés à bon escient.
Pour mémoire, on avait découvert à Fantasia le premier film de Panos Cosmatos, Beyond the Black Rainbow, autre charge onirique visuellement saisissante.
Dans l’intervalle, plusieurs films intriguent : Blue my Mind de Lisa Bruhlmann (Suisse), conte métaphorique où une adolescente fait face à une transformation radicale de son corps, Le nid de David Paradis (Québec), dans lequel un musicien est séquestré par son ex-amoureuse, Brothers’ Nest de Clayton Jacobson (Australie), ou lorsqu’un plan de meurtre parfait ourdi par deux frères est compromis par l’inimitié tragicomique qui couve entre eux, The Last Child de Shin Dong-seok (Corée du Sud), dans lequel un couple dont le fils s’est noyé prend sous son aile le camarade qu’a sauvé le défunt…
C’est la société Quad films qui m’a fait parvenir le scénario. C’est une commande, mais il y avait des éléments originaux que je n’avais jamais vus ailleurs.
On est aussi très curieux de découvrir Amanita Pestilens, film de René Bonière tourné en 1963 à Harrington Lake, avec entre autres Geneviève Bujold. Ton et manière surréalistes pour un film relatant l’obsession d’un banlieusard pour son gazon.
On plongera encore dans le passé, un brin plus récent celui-là, avec la projection spéciale du classique des années 1980 Gremlins, une production de Steven Spielberg réalisée avec force inventivité par Joe Dante, à qui Fantasia rend hommage cette année. Dans ce succès horrifico-comique de 1984, une petite ville tout droit sortie d’une peinture de Norman Rockwell est assaillie par de malveillantes créatures noctambules.
Outre Gremlins, Joe Dante présentera son culte The Howling, film d’horreur mâtiné d’humour noir dans lequel une journaliste traumatisée constate que la communauté rurale où elle est venue se remettre est composée de loups-garous.
« C’est drôle parce que j’ai justement montré Gremlins à mon fils de 7 ans il n’y a pas si longtemps ! » confie Daniel Roby, qui se réjouit des rencontres inusitées qu’il est possible de faire à Fantasia.
« C’est vraiment un festival sur lequel il faut miser. Fantasia n’a pas arrêté de prendre de l’expansion et sa popularité ne se dément pas. C’est là que ça se passe pour le renouveau en cinéma en ce qui me concerne : cet événement-là a un angle particulier qui est très, très cool », conclut-il.
Les projections de Fantasia se dérouleront à la salle J.-A. de Sève de Concordia, à la Cinémathèque, à l’Impérial et au Musée McCord. Horaire complet : fantasiafestival.com