«Une histoire de fantôme» — La mort en douce
Décédé au volant de sa voiture devant la modeste demeure qu’il partage avec M (Rooney Mara), C (Casey Affleck) quitte l’hôpital où on l’a conduit afin de retourner chez lui plutôt que de se diriger vers la lumière. Couvert d’un drap, invisible aux yeux de tous, C observe M vivre son deuil. Les années passent, et C assiste, en silence, au défilé des différents locataires de la maison. Alors que de son vivant il avait avoué à M aimer leur maison pour l’histoire que les murs y renfermaient, C constate qu’il n’est plus qu’un lointain souvenir, ignorant si sa musique lui survivra.
C’est au XIIIe siècle qu’est apparue l’image d’un revenant recouvert d’un linceul mortuaire. Si celle-ci ne fait plus peur depuis l’époque victorienne et a été remplacée par des spectres plus terrifiants, tant en littérature qu’au cinéma, la vision du fantôme aux grands yeux découpés dans un drap immaculé demeure bien ancrée dans l’imaginaire collectif. Il fallait tout de même quelque culot pour que David Lowery (Peter et Elliott le dragon) en fasse la figure centrale d’Une histoire de fantôme.
De fait, comment ne pas associer cette image devenue aussi anodine qu’enfantine à un sommaire costume d’Halloween ? Comment ne pas être sceptique ou rebuté à l’idée de contempler un fantôme regarder le temps filer pendant près d’une heure et demie ? À peine a-t-on le temps de se demander quelle mouche a piqué le réalisateur pour que lui prenne l’envie de faire un film de maison hantée où il ne passe presque rien, à des lieues des films de revenants, propres à provoquer l’insomnie ou des cauchemars, de Hideo Nakata (Ringu) ou de Takashi Shimizu (Ju-on), qu’on se laisse séduire par cette proposition originale.
Porté par l’hypnotique bande sonore de son fidèle complice Daniel Hart, ce drame introspectif du réalisateur d’Ensemble à jamais distille une irrésistible mélancolie lui conférant une atmosphère feutrée et apaisante. Avec son ratio 4/3, rappelant le cinéma muet, et ses cadrages arrondis évoquant des diapositives regardées en famille, Une histoire de fantôme plonge le spectateur dans un état de rêverie nostalgique, le coupant momentanément de la réalité, lui donnant l’impression que le temps s’est arrêté.
De cette manière, ce dernier se sent au diapason de l’attachante créature spectrale, dont la fluidité du linceul et les subtils changements de ton au fil des années lui donnent l’allure d’une mariée abandonnée, telle cette pauvre Miss Havisham des Grandes espérances de Dickens. Alors que le fantôme se meut lentement entre les murs, David Lowery suggère les changements d’époque par de judicieux effets de montage, offrant du coup une amusante exploration de la théorie de la mécanique quantique. Émouvante réflexion sur l’amour, le deuil et la postérité, Une histoire de fantôme s’avère une tendre épopée poétique à travers le temps.
C’est au XIIIe siècle qu’est apparue l’image d’un revenant recouvert d’un linceul mortuaire. Si celle-ci ne fait plus peur depuis l’époque victorienne et a été remplacée par des spectres plus terrifiants, tant en littérature qu’au cinéma, la vision du fantôme aux grands yeux découpés dans un drap immaculé demeure bien ancrée dans l’imaginaire collectif. Il fallait tout de même quelque culot pour que David Lowery (Peter et Elliott le dragon) en fasse la figure centrale d’Une histoire de fantôme.
De fait, comment ne pas associer cette image devenue aussi anodine qu’enfantine à un sommaire costume d’Halloween ? Comment ne pas être sceptique ou rebuté à l’idée de contempler un fantôme regarder le temps filer pendant près d’une heure et demie ? À peine a-t-on le temps de se demander quelle mouche a piqué le réalisateur pour que lui prenne l’envie de faire un film de maison hantée où il ne passe presque rien, à des lieues des films de revenants, propres à provoquer l’insomnie ou des cauchemars, de Hideo Nakata (Ringu) ou de Takashi Shimizu (Ju-on), qu’on se laisse séduire par cette proposition originale.
Aller voir Une histoire de fantôme ou pas? La réponse de Manon Dumais.
Porté par l’hypnotique bande sonore de son fidèle complice Daniel Hart, ce drame introspectif du réalisateur d’Ensemble à jamais distille une irrésistible mélancolie lui conférant une atmosphère feutrée et apaisante. Avec son ratio 4/3, rappelant le cinéma muet, et ses cadrages arrondis évoquant des diapositives regardées en famille, Une histoire de fantôme plonge le spectateur dans un état de rêverie nostalgique, le coupant momentanément de la réalité, lui donnant l’impression que le temps s’est arrêté.
De cette manière, ce dernier se sent au diapason de l’attachante créature spectrale, dont la fluidité du linceul et les subtils changements de ton au fil des années lui donnent l’allure d’une mariée abandonnée, telle cette pauvre Miss Havisham des Grandes espérances de Dickens. Alors que le fantôme se meut lentement entre les murs, David Lowery suggère les changements d’époque par de judicieux effets de montage, offrant du coup une amusante exploration de la théorie de la mécanique quantique. Émouvante réflexion sur l’amour, le deuil et la postérité, Une histoire de fantôme s’avère une tendre épopée poétique à travers le temps.