Des Mongols et des loups

Choix de la Chine pour les prochains Oscar, donc fort bien vu par le régime, Wolf Totem du Français Jean-Jacques Annaud est le fruit d’une entente de coproduction entre la France et le géant asiatique aux milliers d’écrans convoités. Ce film en 3D, où le relief n’est pas pleinement utilisé, sinon pour nous faire entrer plus profondément dans les paysages de Mongolie, plaira à un public familial.
Il nous entraîne, au moment de la révolution culturelle, dans les mutations sociales des tribus nomades de Mongolie et leur rapport de proximité avec les loups. Les gros plans sont judicieux. Rarement a-t-on pu voir des hordes de loups d’aussi près filmées.
Wolf Totem nous fait comprendre leur organisation sociale et le cycle de la nature dans lequel leur prédation s’inscrit. Jean-Jacques Annaud, cinéaste de L’ours et des Deux frères (sur deux tigrons), a l’habitude de filmer les animaux. Dans Wolf Totem, un célèbre entraîneur, Andrew Simpson, a dressé des loups durant plusieurs années.
Adapté du roman semi-autobiographique de Jiang Rong, Wolf Totem, fruit de douze ans de travail, n’égratigne guère le régime de Mao, ni ne remet en cause la révolution culturelle des années 60. On n’est pas dans Balzac et la petite tailleuse chinoise. Avec, au départ, une trame similaire. Ici, un jeune étudiant de Beijing (Feng Shaofeng) est envoyé se faire rééduquer par le travail des steppes chez des bergers nomades de Mongolie extérieure.
Dans ce cas, il apprécie son sort. D’autant plus qu’un vieux sage de Mongolie connaît tout de son milieu sauvage, loups inclus, et lui enseigne leurs arcanes. Au point où le jeune homme adopte et cache à ses hôtes un louveteau, dont il veut observer les moeurs. Il est intéressant de voir un fonctionnaire chinois multiplier les erreurs en cherchant à éradiquer les loups après les avoir privés de pitance, modifiant le cycle naturel, au grand dam des Mongols, qui connaissent leur milieu et n’ont guère voix au chapitre.
On déplorera une candeur de ton, des longueurs en fin de course, et des jeux d’acteur peu dynamiques. La lourde caméra 3D n’autorise pas toutes les souplesses et la multiplication des prises. La condescendance des Pékinois quant aux habitants des steppes paraît lourde, tout comme la romance avec une jolie veuve dans sa yourte, plaquée là apparemment pour les besoins d’une amourette. Ce film, dont il faut remettre en question le manque d’esprit critique quant aux politiques du Grand Timonier, fascine toutefois par son message écologique (appuyé, quand même), la beauté des paysages et toute sa partie documentaire sur les tribus et les loups des steppes.