Une bonne main

La vedette du film, Jason Statham, reçoit l’aide brève mais savoureuse de comédiens aguerris, comme Anne Heche.
Photo: VVS Films La vedette du film, Jason Statham, reçoit l’aide brève mais savoureuse de comédiens aguerris, comme Anne Heche.

Le Las Vegas du film Wild Card n’est pas celui sur lequel Hollywood aime habituellement s’attarder. Petits casinos miteux aux moquettes élimées, diner fauchés et bungalows défraîchis où errent des âmes blasées à force de rêves jamais réalisés : le lieu et la faune n’ont rien pour séduire le touriste potentiel. C’est l’un des charmes inattendus de ce film d’action qui, à défaut de renouveler le genre, en constitue un exercice efficace.

Écrit par l’estimable William Goldman (Butch Cassidy et le Kid, Les hommes du président, Misery), d’après l’un de ses romans, Wild Card met en scène un expert en sécurité (lire : garde du corps redoutable) qui, après avoir aidé une amie à se venger de ses agresseurs, se retrouve la cible de ces derniers, humiliés et courroucés.

À mesure que le scénario joue ses cartes au cours des vingt premières minutes, on se dit que l’on sait d’office comment tout cela se soldera. On n’a pas tout à fait tort, mais voilà, l’intérêt du film réside ailleurs, soit dans une multitude de « moments de personnages », comme autant de vignettes imprévisibles. Qu’il s’agisse de l’embauche du protagoniste par un tout jeune joueur au rire suraigu ou de l’interrogatoire impromptu mené par un hôtelier affable mais redoutable, chacune de celles-ci bénéficie de la participation brève mais savoureuse de comédiens aguerris, comme Stanley Tucci, Hope Davis ou Anne Heche. Bref, le générique est, à l’inverse du décor fané, chatoyant.

La vedette du film étant Jason Statham (Le transporteur), on s’attend en outre à deux choses : primo, à un protagoniste un peu frustre, un peu misanthrope, mais avec le coeur à la bonne place, la seule partition que l’acteur semble capable (ou intéressé ?) de jouer ; secundo, à des scènes de combat savamment chorégraphiées.

Si Wild Card ne fait pas mentir le premier a priori, le film parvient en revanche à surprendre, encore, en n’offrant que trois séquences de bagarre, au demeurant impressionnantes. À ce chapitre, le routier Simon West (qui a déjà dirigé Statham dans Le mécano) signe une réalisation un brin plus stylisée que de coutume en tirant le maximum d’une direction artistique particulièrement astucieuse.

Bref, pour user d’une image de circonstance, Wild Card abat au final une meilleure main que ce que l’on anticipait. Heureusement, à ce jeu-là, on gagne à perdre.

Wild Card (V.O.A.)

★★★

Réalisation : Simon West. Avec Jason Statham, Michael Angarano, Milo Ventimiglia, Anne Heche, Stanley Tucci. États-Unis, 2014, 92 minutes.