Dany Boon, le malade imaginaire

Dany Boon dit s’être inspiré de Molière et du Malade imaginaire pour pondre Supercondriaque.
Photo: Jean-Claude Lother/Niagara Films Dany Boon dit s’être inspiré de Molière et du Malade imaginaire pour pondre Supercondriaque.

Le monde et les temps changent, disait le poète. De fait, d’une époque à l’autre, des découvertes surviennent, les comportements évoluent. Prenez la santé. Désormais, au premier signe de quelque chose ressemblant à un symptôme… vite, vite, on se renseigne dans Internet. C’est lors d’une telle visite médicale virtuelle que le comédien, réalisateur et scénariste Dany Boon eut l’idée de son plus récent film, Supercondriaque, à l’affiche le 5 septembre.

 

« J’étais à Los Angeles et un de mes enfants était malade, relate Dany Boon, joint dans les bureaux de sa maison de production à Paris. Je me suis renseigné sur des sites de santé et j’ai acheté les médicaments recommandés. De retour en France, j’ai rencontré mon médecin — qui est devenu un ami au fil des ans, à force de consultations inutiles découlant de ma propre hypocondrie [rires]. Je lui ai raconté l’épisode et il s’est un peu fâché, avec raison, d’ailleurs. »

 

À cet événement se sont greffées d’autres idées et anecdotes, lesquelles ont ultérieurement formé la trame de la comédie Supercondriaque, dans laquelle Dany Boon incarne Romain Faubert, un hypocondriaque germophobe à tendance narcissique bien de son temps. Le médecin compatissant de l’histoire est joué par Kad Merad (partenaire de Boon dans Bienvenue chez les Ch’tis). Lui aussi, tiens, tiens, a fini par tisser des liens d’amitié avec son patient.

 

Ce dernier, pour se prouver qu’il n’est pas complètement obnubilé par sa petite personne, accepte un jour de suivre le bon docteur dans une mission humanitaire au port de Calais afin de soigner des réfugiés fraîchement débarqués. S’ensuivent vol d’identité, erreur sur la personne, quiproquo amoureux et séjour forcé dans un pays de l’Est fictif, dans cet ordre.

 

« L’une des choses que m’a fait remarquer mon médecin lors de notre conversation, c’est que l’acte médical a été complètement désacralisé. Je me souviens qu’enfant, lorsque ma mère nous emmenait pour une visite médicale, c’était une affaire très sérieuse. On ne plaisantait pas avec ce qui se disait dans le bureau du médecin. Aujourd’hui, si le docteur contredit le diagnostic qu’on a déniché au préalable sur Internet, on le regarde avec circonspection. »

 

De Molière à Allen en passant par soi

 

Lorsqu’on demande à Dany Boon si Romain Faubert est une déclinaison de l’un de ses personnages de scène les plus connus, « le dépressif », la vedette prend le temps de la réflexion. « Oui, probablement que oui. Il y a certainement une parenté entre les deux. »

 

Et qu’en est-il du plus célèbre des hypocondriaques, à savoir Woody Allen, qu’on a pu voir craindre en vain un trépas prématuré dans Annie Hall et Hannah et ses soeurs, pour ne nommer que ceux-là ? « Dans une certaine mesure, probablement que Woody Allen exerce ou a exercé une influence sur tous les auteurs de comédies qui l’ont suivi. Toutefois, je vous dirais que, dans le cas de Supercondriaque, c’est davantage du côté de Molière et du Malade imaginaire que j’ai lorgné. »

 

Malgré un accueil critique mitigé, Supercondriaque a cumulé plus de cinq millions d’entrées en France. Le film a indéniablement bien fonctionné. Or on est loin des huit millions d’entrées de Rien à déclarer, comédie précédente de Dany Boon. Et on est à des lieues des 20 millions d’entrées de Bienvenue chez les Ch’tis. Bénédiction ou malédiction, ce plébiscite populaire précoce en vertu duquel on attend chaque fois de l’auteur non pas un succès, mais un triomphe ? La question fait rire Dany Boon.

 

« C’est une pression que je ressens, c’est vrai, mais si je compare les avantages et des inconvénients de cette réussite-là, les avantages l’emportent haut la main. » Bref, pas de quoi en faire une maladie.