Serge Losique demande «la paix des braves»

Le Festival des films du monde (FFM) continue de défrayer la chronique. Dans une lettre ouverte, publiée ci-contre en encadré, le fondateur et président du Festival, Serge Losique, exhorte Québec à arbitrer le conflit qui l’oppose à la SODEC, l’un des organismes ayant décidé de ne pas subventionner le FFM cette année.
« Si on refuse l’arbitrage, il y a quelque chose qui ne marche pas avec cette démocratie », lance M. Losique, à l’autre bout du fil. Ce dernier espère que le ministère de la Culture aidera « à mettre au clair cette controverse en examinant les deux côtés de la médaille ».
Après que Le Devoir eut révélé le 5 juin que ni la Ville de Montréal, ni la SODEC, ni Téléfilm Canada n’accorderaient de subvention à l’événement, M. Losique et sa directrice générale, Danièle Cauchard, ont affirmé que la 38e édition aurait néanmoins lieu. Depuis, l’affaire a dégénéré : dans une lettre ouverte publiée dans La Presse le mardi 15 juillet, où Danièle Cauchard accusait Monique Simard, la présidente de la SODEC, d’avoir « utilisé les fonds publics pour [une] vendetta personnelle », et de « tout faire pour que le Québec ait la réputation d’une république de bananes sur le plan international », entre autres déclarations incendiaires. Dans les heures qui ont suivi, le directeur des communications du FFM, Henry Welsh, a remis sa démission. Au même moment, un groupe de producteurs, cinéastes et comédiens a publié un communiqué en appui à Mme Simard.
Le FFM isolé
C’est dans ce contexte d’isolement des organisateurs du FFM queSerge Losique a désiré publier cette lettre, où il admet que « le ton de la lettre du 14 juillet de la directrice générale aurait pu être moins dur ». En ce qui concerne le contenu de la missive de Mme Cauchard, M. Losique réitère qu’il revient, selon lui, à un arbitre neutre de l’évaluer.
Enfin, le fondateur du FFM demande à la SODEC de considérer à nouveau sa décision de retirer la subvention et invite les « personnes de bonne volonté à observer la paix des braves », à cinq semaines du Festival.
À la SODEC, la directrice des communications a indiqué mercredi au Devoir que la présidente ne commentera pas davantage la situation. Des avocats ont pris connaissance de la lettre de Mme Cauchard et évaluent la possibilité d’entamer une poursuite.
Québec refuse de s’immiscer
Au cabinet de la ministre de la Culture, Hélène David, la demande d’arbitrage de M. Losique est rejetée du revers de la main. « On ne s’immiscera pas dans les décisions que prend la SODEC », tranche Philip Proulx, attaché de presse de la ministre. Ce dernier insiste sur le fait que la ministre David « fait entièrement confiance » à la décision des fonctionnaires.
À la sortie du Conseil des ministres, mercredi, Mme David a rappelé son désarroi quant à la lettre injurieuse de Mme Cauchard. « Les gens peuvent exprimer leur désaccord, mais ils doivent le faire dans le respect et le civisme », a-t-elle fait valoir. Le 7 juillet dernier, la ministre a d’ailleurs rencontré les dirigeants du FFM. À ce moment, la question d’arbitrage n’avait pas été évoquée.
Lettre de Serge Losique, au nom du FFM
Le Festival des films du monde propose que le gouvernement du Québec nomme immédiatement un arbitre dans le conflit qui l’oppose à la SODEC. Ce procédé d’arbitrage existe dans tous les domaines quand une situation est bloquée, et la SODEC ne devrait pas craindre un tel arbitrage. La justice élémentaire dans un pays de droit veut qu’on examine sereinement les deux côtés de la médaille.Le FFM n’a pas voulu ce débat, qui est nuisible à tous. Cependant, il ne pouvait rester silencieux face à des attaques injustes. Nous admettons que le ton de lettre du 14 juillet de la directrice générale aurait pu être moins dur, mais en ce qui concerne le contenu, ce serait à un arbitre neutre de l’évaluer. Il faut comprendre l’indignation de Madame Cauchard, qui a passé toute sa vie à bâtir ce festival avec la passion qu’on lui connaît.
Bref, nous demandons à la SODEC de ne pas contribuer au blocage des subventions déjà promises par plusieurs bailleurs de fonds. La SODEC pourrait garder son solde de la subvention normalement prévue pour le FFM pour l’affecter au remboursement de la dette à long terme.
À cinq semaines du Festival, nous invitons les personnes de bonne volonté à observer « la paix des braves » et à fêter la culture cinématographique internationale qui sera au rendez-vous à Montréal le mois prochain. Serge Losique