Et les finalistes sont…

De gala en gala. Après son doublé au Golden Globes dans les catégories d’interprétation masculine, Dallas Buyers Club, du cinéaste québécois Jean-Marc Vallée (à gauche, en compagnie de l’acteur Matthew McConaughey), a pris du galon en décrochant un total de six nominations en vue de la 86e soirée des Oscar.
Photo: Agence France-Presse (photo) Jason Kempin De gala en gala. Après son doublé au Golden Globes dans les catégories d’interprétation masculine, Dallas Buyers Club, du cinéaste québécois Jean-Marc Vallée (à gauche, en compagnie de l’acteur Matthew McConaughey), a pris du galon en décrochant un total de six nominations en vue de la 86e soirée des Oscar.

Les nominations en vue de la 86e soirée des Oscar sont désormais connues. Comme prévu, Esclave pendant 12 ans (12 Years a Slave) de Steve McQeen, et Arnaque américaine (American Hustle) de David O'Russell, occupent la tête du peloton. Issu du champ gauche, Dallas Buyers Club, de Jean-Marc Vallée, leur disputera l’Oscar du meilleur film.

Hormis ces trois titres, la plus prestigieuse catégorie verra s’affronter les longs métrages Capitaine Philips (Captain Philips) de Paul Greengrass, Gravité (Gravity) d’Alfonso Cuaron, Nebraska d’Alexander Payne, Le loup de Wall Street (The Wolf of Wall Street) de Martin Scorsese, Philomena de Stephen Frears et Elle (Her) de Spike Jonze. En vertu de nouvelles règles édictées en 2009, entre cinq et dix œuvres peuvent en effet concourir pour l’obtention de l’Oscar du meilleur film. McQueen, O’Russell, Cuaron, Payne et Scorsese sont les cinq cinéastes nommés pour l’Oscar de la réalisation.

Quant à Jean-Marc Vallée, il a beau ne pas figurer parmi les metteurs en scène sélectionnés, les honneurs rejaillissent sur lui. D’autant que Dallas Buyers Club se distingue dans cinq autres catégories : scénario original, montage, maquillage, acteur et acteur de soutien. En cowboy homophobe et en jeune femme transgenre atteints du sida, Matthew McConaughey et Jared Leto sont inoubliables. Chacun est reparti avec un Golden Globe sous le bras dimanche dernier. Le même cas de figure devrait se répéter le 2 mars.

« Belle façon de boucler la formidable aventure de Dallas Buyers Club, a déclaré jeudi le cinéaste, par voie de communiqué. Mes collaborateurs et moi avons éprouvé un plaisir fou à faire ce film. Aujourd’hui, nous partageons tous un grand sentiment de fierté : celui d’avoir été au service d’une histoire à la fois dure et belle, qui a réussi à toucher le cœur des gens. »

Selon le réseau CBC, le comonteur du Montréalais Martin Pensa, un certain John « Mac » McMurphy, serait en réalité Jean-Marc Vallée lui-même. Le site IMDB (Internet Movie Database) indique d’ailleurs les noms du réalisateur et de Pensa en tant que monteurs.

Trop de choix

Chez les femmes, pas de surprise alors que les performances remarquables de Sandra Bullock pour Gravité, Amy Adams pour Arnaque Américaine, Judi Dench pour Philomena, Cate Blanchett pour Jasmine French (Blue Jasmine), la favorite, et de Meryl Streep pour Le temps d’un été (August : Osage County), ont été reconnues. Avec 18 nominations en carrière, cette dernière devient l’interprète la plus souvent citée de l’histoire des Oscar. Au rayon des rôles de soutien, Jennifer Lawrence (Arnaque américaine) continue d’avoir la faveur des parieurs, quoique Julia Roberts, la fille aigrie de Meryl Streep dans Le temps d’un été, reste une candidate très sérieuse.

Du côté des messieurs, on attendait Christian Bale (Arnaque américaine), Chewetel Ejiofor (Esclave pendant 12 ans), Bruce Dern (Nebraska), Leonardo DiCaprio (Le loup de Wall Street) et Matthew McConaughey (Dallas Buyers Club), l’homme à battre cette année.

Inhabituellement faste en matière de qualité des rôles et des interprétations, le cru 2013 comporte du coup son lot d’omissions crèves-cœur. Excellente dans le moyen Sauvons M. Banks (Saving Mr Banks), Emma Thompson pourra se consoler avec les deux Oscar qu’elle possède déjà. Kate Winslet, dont le jeu dans La fête du Travail (Labor Day) est semble-t-il excellent, fera de même avec celui obtenu pour Le lecteur. Méritoires, Robert Redford pour Seul en mer (All is Lost), Joaquin Phoenix pour Elle, et Tom Hanks pour Capitaine Philips, ont eux aussi dû s’incliner. Idem pour Oscar Isaac, mémorable dans Être Llewyn Davis (Inside Llewyn Davis).

À ce chapitre, la comédie dramatico-musicale des frères Coen, exclue de toutes les catégories principales, s’avère d’ores et déjà le grand perdant de la saison. Tout comme Prisonniers (Prisoners), du Québécois Denis Villeneuve, dont le producteur omnipotent Harvey Weinstein, qui n’a rien à voir avec le film, a dit grand bien. On aura souhaité jusqu’à la dernière minute des nominations pour la réalisation et l’interprétation masculine (Hugh Jackman, puissant) à ce suspense fignolé. Au moins le grand Roger Deakins a-t-il été retenu dans la catégorie de la meilleure direction photo. Autre déception : l’absence du magnifique essai filmique de la Canadienne Sarah Polley, Les histoires qu’on raconte (Stories We Tell), dans la catégorie du meilleur documentaire.

Côté musique, le Canadien Owen Pallett et le membre d’Arcade Fire Will Butler ont eu plus de chance en décrochant une nomination pour la meilleure chanson originale grâce à The Moon Song (Elle).

La filière montréalaise

Techniquement, le court métrage documentaire The Lady in Number 6 : Music Saved My Life est une production américaine. Dans les faits, toute l’équipe, dont le réalisateur Malcolm Clarke et le producteur Frederic Bohbot, est montréalaise. Qui est la femme du titre ? Alice Herz Sommer, 109 ans, la plus vieille pianiste du monde, et la doyenne des survivants de l’Holocauste.

« Malcolm et moi travaillions à la production d’un film et il y avait cette dame qui nous parlait sans arrêt d’Alice Herz Sommer, une Londonienne au parcours hors du commun, a relaté au Devoir le producteur Frederic Bohbot. On était curieux, et Malcolm a contacté Nicholas Reed, qui est basé à Los Angeles. Nicholas nous a donné l’argent nécessaire pour le voyage à Londres et c’est comme ça que nous nous sommes retrouvés à nous entretenir avec Alice. Tout le monde a travaillé gratuitement. »

« Alice a été internée dans un camp de concentration près de Prague alors qu’elle était âgée de 38 ans. Elle était mariée, avait une fille. Elle a survécu en jouant du piano pour les officiers nazis. Quand on la rencontre, ce qui frappe, c’est son optimisme. Elle n’a aucune haine en elle. Chaque fois qu’un pépin survenait, elle disait toujours : “Ce n’est pas si terrible”. Ça m’a marqué. Quand je repense à elle, c’est ce que je l’entends dire. » Toujours bon pied bon œil, Alice Herz Sommer a fêté ses 110 ans le 26 novembre dernier.

« C’est certain que j’espère qu’on gagne. Pas juste pour nous, mais pour la santé du documentaire canadien qui souffre de sous-financement. Pourtant, le talent ne manque pas », rappelle Frederic Bohbot.

La soirée des Oscar sera diffusée en direct dès 20 h le 2 mars par le réseau ABC. Entrée en fonction le 30 juillet 2013, Cheryl Boone est la première Noire élue présidente de l’Académie des arts et des sciences du cinéma. Constituée d’environ 6000 membres, l’Académie est majoritairement caucasienne (94 %) et mâle (77 %). L’âge moyen des membres est de 62 ans.

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