Futur proche, avenir incertain

Joseph Gordon-Levitt campe un tueur professionnel.
Photo: Alliance Films Joseph Gordon-Levitt campe un tueur professionnel.

Looper, du réalisateur de Brick et de The Brothers Bloom, Rian Johnson, s’inscrit dans la continuité. Il possède ceci de particulier que son action se dédouble simultanément sur deux temps. À l’image, nous sommes dans un futur terriblement immédiat, qui pourrait être celui de 2013, de 2014, de 2015. Dans le récit, les personnages sont les marionnettes et les conséquences d’actions qui surviennent trois décennies plus tard, dans un monde qu’on nous dépeint comme étant plus brutal, où les gangsters se débarrassent des individus gênants ou des captures du camp rival en les expédiant, au moyen d’une technologie de voyage temporel récemment découverte, trente ans dans le passé, où un assassin les attend, les descend, dispose du cadavre et ainsi de suite.

Joseph Gordon-Levitt campe un de ces tueurs professionnels qu’on appelle Loopers (boucleurs de boucles en somme) parce que leur futur ressemble à leur présent : quand leur heure aura sonné, on leur expédiera leur moi âgé afin que ce dernier les descende et ainsi efface ses propres traces. Ingénieux stratagème, sauf lorsque, comme c’est le cas dans ce thriller vraiment efficace, ce moi (Bruce Willis) prend la clé des champs, investi d’une mission très spéciale : abattre le tyran qui a pris les rênes du crime organisé dans le futur, lequel n’a que cinq ans dans le présent. Parallèlement, son moi plus jeune lancé à ses trousses veut à la fois lui mettre la main au collet (son job) et le protéger (son instinct). S’ensuit un jeu de chat et de souris dont le carrefour se situe dans une ferme très rétro habitée par une mère célibataire (excellente Emily Blunt) qui ne s’en laisse pas imposer et son gamin… de cinq ans. J’en dis trop peut-être.

Rien n’est simple ou simpliste dans Looper. Rian Johnson mise sur l’intelligence participative des spectateurs pour attacher ensemble les fils d’une intrigue plutôt dense, qui exige une attention mais se trouve récompensée au dernier acte. La netteté du trait, la clarté du discours, la facture visuelle élégante qui transcende sa propre sophistication, le rythme tambour battant élèvent Looper, sans doute pas à la hauteur d’un Children of Men ou d’un Gattaca - instants de grâce comme le cinéma nous en offre rarement -, mais très certainement à celle de The Hunger Games.

Pour la reconnaissance de Joseph Gordon-Levitt comme acteur de premier plan, le film de Rian Johnson produit le miracle attendu. L’acteur fétiche de Christopher Nolan (Inception, The Dark Night Rises) en impose par son charisme tranquille, sous un épais maquillage visant à le faire ressembler à son alter ego Bruce Willis. Celui-ci apporte quant à lui une force mélancolique à son personnage de sacrifié vivant sur du temps emprunté. Le futur est proche, mais son avenir est incertain.

 

Collaborateur

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Bande-annonce de Looper (Looper - Les Tueurs du temps)
 

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