Bouquet de films au FNC

Le Festival du nouveau cinéma (FNC), qui roulera à Montréal du 18 au 28 octobre, puise beaucoup dans les oeuvres phares ayant marqué les grands rendez-vous cinématographiques internationaux de l'année. Le Devoir a vu plusieurs de ces films. Précisons que les thèmes tournent souvent (guess why?) autour du terrorisme, des guerres absurdes, de l'humain déchiré aux arêtes de la Grande Histoire.

The Wind that Shakes the Barley, du cinéaste britannique engagé Ken Loach (palme d'or à Cannes), fait un retour sur la guerre d'Irlande. L'humanisme et l'intelligence du regard posé sur un conflit complexe confèrent au film une dimension universelle. Excellent collectif d'acteurs par surcroît.

Babel, du Mexicain Alejandro Gonzales Inarritu, est une grosse production internationale particulièrement attendue (prix de la mise en scène à Cannes). Une construction brillante pour ce puzzle tourné dans quatre pays, où Brad Pitt et Cate Blanchett sont de la fête et où la mondialisation et les enjeux politiques planétaires se marient aux destins individuels pour donner un écho brûlant aux enjeux contemporains.

Flandres, de Bruno Dumont, aborde également la guerre. Entre le nord de la France et un Moyen-Orient indéterminé embrasé, le cinéaste brosse l'ennui, la peur, la stupeur, l'amour, avec une économie de moyens et des silences qui irritent et impressionnent à la fois (Grand Prix du jury à Cannes).

Day Night, Day Night, de Julia Loktev, est une oeuvre post-11 septembre 2001. Cette histoire d'une jeune kamikaze au passé et aux mobiles indéterminés, qui erre à Times Square, en plein Manhattan, pour exploser avec sa charge de dynamite, est le blues de la fanatique. Approche impressionniste et dérive urbaine sur fond d'Apocalypse, fine, jazzée... et sans réponse à offrir aux drames internationaux.

Colossal Youth (En avant jeunesse), du Portugais Pedro Costa, allie des images superbes à un rythme lent et à des plans fixes admirables et insupportables. Dans un faubourg de Lisbonne, la voix des déshérités résonne. Indigeste malgré ses vertus. En plus, le film dure 155 minutes...

Offside, de l'Iranien Jafar Panahi, ne renouvelle pas le genre avec sa facture à saveur documentaire, mais le film est fort bien fait et sans temps morts. On y suit une jeune fille déguisée en garçon qui veut assister à un match de foot malgré les interdits sexistes. Comico-tragique, très vivant (moins puissant et moins original toutefois que Le Ballon blanc et Le Cercle du même Panahi), le film est interdit en Iran.

Red Road, de la Britannique Andrea Arnold (prix du jury à Cannes), mêle avec finesse vidéo-surveillance, vengeance féminine, ressorts sexuels inavouables et souplesse de mise en scène. Cette approche féminine sans concessions fascine et les scènes d'amour très fortes valent le détour.

Lights in the Dust, du Finlandais Aki Kaurismäki, n'est pas le meilleur coup de l'auteur de L'Homme sans passé. Mais sa griffe poétique et minimaliste, inimitable, se reconnaît d'office dans cette oeuvre poignante où un pauvre type se fait abuser par une blonde langoureuse et sans scrupules. Hommage à Chaplin mais également à Keaton, le film est une fable aigre-douce un peu trop réduite à sa quintessence.

Avec Transylvania, le gitan français Tony Gatlif marie la province roumaine toujours hantée par Dracula à un road-movie initiatique et magique. De belles scènes dans une Transylvanie hantée, mais trop de ressemblances avec Exils, son film précédent. On voit ses tics.

12:08 East of Bucharest, du Roumain Corneliu Porumboiu (Caméra d'or de Cannes), repose sur sa proposition brillante. L'animateur télé d'une petite ville roumaine, seize ans après la chute de Ceaucescu, demande en ondes s'il y eut ou non révolution avant la fin du régime. Îuvre sur la mémoire, fabriquée ou réelle, le film, portrait de groupe sensible et burlesque, fut réalisé avec peu de moyens mais une foule de bonnes idées...

Man Push Cart, de l'Iranien Ramin Bahrani, situé à New York, est le poignant récit d'une dérive urbaine, celle d'un homme, ex-vedette rock dans son pays, qui pousse son chariot de friandises dans les rues de la métropole. Minimalisme, épure, regard lent et poignant sur l'envers du rêve américain, le film est d'une poésie et d'une pudeur remarquables.

Dans la peau de Jacques Chirac, de Karl Zero et Michel Royer, est une amusante pochade sur le président français, mais le film ne vole finalement pas très haut. Documents d'archives mis bout à bout dans un montage à la Michael Moore très manipulateur, le film a le mérite de sortir des tiroirs des documents d'archives télévisuels oubliés. Il faut être très au fait des arcanes de la politique française pour saisir et apprécier tous les gags. Au Québec, on s'y perd.

Le film de clôture du FNC, Volver, dernier opus du grand cinéaste espagnol Pedro Almodóvar, a été primé à Cannes pour son scénario et son collectif d'actrices. Il constitue un coup de chapeau d'Almodóvar au néoréalisme italien et surtout un écrin pour Penélope Cruz, en mère courage et femme d'un milieu populaire qui, entre une mère fantôme, un mari défunt et un restaurant à lancer, devient une reine des faubourgs. Moins puissant que Tout sur ma mère, mais délicieux et fluide.

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