MBAM: le conseil d’administration s’explique

Se disant conscient que de mettre fin au contrat de sa réputée directrice générale et conservatrice en chef, Nathalie Bondil, allait créer un « tollé », le conseil d’administration du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM) a expliqué lundi dans un communiqué qu’il estimait ne pas pouvoir « faire abstraction des constats » d’un rapport analysant le climat de travail au sein de l’institution, et qui serait défavorable à Mme Bondil.
Alors que sa « compétence » et ses « motifs » ont été mis en doute par certaines voix au cours des deux dernières semaines de cette saga, le conseil d’administration (CA) du musée, présidé par Michel de la Chenelière, a décidé de s’exprimer publiquement, car « il était difficile de demeurer silencieux et insensible devant de telles insinuations ». Le conseil a notamment été accusé de ne pas dévoiler les véritables raisons du renvoi de sa directrice.
« Le conseil ne pouvait faire abstraction des constats du rapport préparé par une firme indépendante spécialisée en gestion des ressources humaines qu’il avait mandatée, se défend-il. Ces constats, en ligne directe avec plusieurs témoignages d’employés rapportés antérieurement par le syndicat, visaient notamment le style de gestion de Mme Bondil ainsi que la détérioration du climat de travail à l’intérieur des murs du Musée. Par son déni de plusieurs conclusions du rapport, son inflexibilité et son refus d’implanter adéquatement certaines de ses recommandations, Mme Bondil n’a guère laissé le choix au conseil d’administration malgré ses nombreuses tentatives d’en arriver à une solution. »
Le CA dit avoir tenté « de bonne foi » de s’entendre avec Mme Bondil pour modifier ses tâches pour la dernière année de son mandat, en vain.
Le conseil ajoute qu’il est impossible de rendre public le rapport indépendant sur lequel il a basé sa décision, étant donné « les contraintes légales visant à sauvegarder la confidentialité des personnes impliquées ».
Dans son communiqué, le CA estime que « la réaction forte et émotive en faveur de Mme Bondil était prévisible et, jusqu’à un certain point, tout à fait normale ». Le conseil ajoute que « le positionnement plus qu’enviable de l’institution sur l’échiquier mondial des grands musées [est] en grande partie [lié] à l’énorme talent de Mme Bondil. C’est indéniable et le conseil le reconnaît d’emblée ». Il ajoute toutefois que, « dans l’exercice de ses responsabilités fiduciaires, [il a décidé] d’aller de l’avant et de mettre fin [au contrat de Mme Bondil], avec la ferme conviction qu’un tel geste était dans les intérêts supérieurs du Musée et de ses employés ».
Depuis le début de cette histoire, Mme Bondil affirme que son congédiement tient à ses critiques du processus de sélection qui a mené à l’embauche récente de Mary-Dailey Desmarais — membre d’une famille très influente au MBAM — comme directrice de la conservation.
Le MBAM a par ailleurs affirmé que le processus de recrutement pour trouver un nouveau directeur ou une nouvelle directrice « est maintenant enclenché ». « Il faut maintenant tourner la page et regarder vers l’avenir », a déclaré le CA.
Dans leur communiqué, les administrateurs ont salué la décision de Québec de confier à une firme indépendante l’examen de l’affaire. À ce sujet, le ministère de la Culture et des Communications s’est contenté de dire « qu’un mandat a été confié en ce qui concerne l’analyse indépendante », sans vouloir faire plus de commentaires.
Assemblée extraordinaire ?
Par ailleurs, des membres du MBAM, signataires d’une pétition exigeant en vertu des règlements de l’institution la tenue d’une assemblée extraordinaire avec le conseil d’administration, déplorent la lenteur avec laquelle l’équipe de M. de la Chenelière s’occupe du dossier.
Selon son instigateur, Thomas Bastien — un ancien de la direction du MBAM —, la pétition qui a fini par rejoindre le grand public comprend maintenant plus de 4100 signataires, dont « plusieurs centaines de membres » du musée. « Je trouve extrêmement difficile qu’il y ait des prises de position du musée alors qu’on n’écoute même pas les membres ». M. Bastien demande au CA que soit faite « la lumière pour savoir si [la fin du contrat de Mme Bondil] c’était la meilleure proposition pour le musée ».
M. Bastien estime que, « pour le moment, on a des avis qui sont très contradictoires. Dans les médias, on a à la fois le pour et le contre, les forces du mal et les forces du bien, qui sont en train de se battre. Mais qui est le bien, qui est le mal, qui dit la vérité, qui dit un mensonge ? » La demande d’assemblée extraordinaire a été envoyée lundi dernier et a reçu un accusé de réception mercredi. « Au-delà de ça, on n’a eu aucune autre nouvelle. »
Nathalie Bondil était entrée en poste en 2007, et a notamment succédé à Guy Cogeval et à Pierre Théberge.