La ruche d’art du Musée des beaux-arts de Montréal, nouvel espace de création artistique

Comment tromper la grisaille des nouvelles et les sautes d’humeur de cet été aux débuts plutôt maussades ? En trouvant refuge à la nouvelle ruche d’art du Musée des beaux-arts de Montréal (MBAM). Deux fois par semaine, ce nouvel espace de création multidisciplinaire invite les artistes en herbe à faire aller leur imagination et les laisse butiner (gratuitement !) dans son matériel d’arts plastiques, pour leur permettre d’ajouter de la couleur dans leur vie. Visite féconde dans un local où ça bourdonne.
Dès qu’on entre dans la ruche d’art, nos yeux se posent au fond de la pièce, sur les étagères remplies de boutons, de bouts de tissu, de colle en bâton, de vieux livres, de magazines, de pâte à modeler et de pots de gouache et d’aquarelle.
« Je te présente mes collègues ! » lance, tout sourire, Stephen Legari, responsable des programmes éducatifs et art-thérapeute, en montrant les tablettes de bois bien nourries de matériel recyclé, récupéré ou donné — le tout étonnamment bien ordonné.
Tout ça (et bien plus encore) est à disposition des abeilles qui viennent créer dans ce local communautaire et social du Musée des beaux-arts, où loge la 105e ruche d’art de ce réseau international d’ateliers de création artistique communautaires tout à fait gratuits (voir l’encadré).
« Qu’est-ce que vous avez envie de faire aujourd’hui ? » C’est par cette accueillante introduction que Stephen met ses visiteurs à l’aise. Les enfants, eux, savent tout de suite ce qu’ils ont envie de faire et volent illico vers ce matériel auquel ils sont depuis longtemps habitué, grâce à la garderie et aux cours d’arts plastiques.
Devant une page blanche, les adultes, eux, ont parfois besoin d’un intermédiaire pour renouer avec ces amours de jeunesse. Souvent, Stephen leur propose de commencer par le collage. « C’est universellement facile et ça ne demande pas beaucoup d’idées », suggère-t-il.

Excellente occasion de passer du temps en famille, cette activité entièrement gratuite (même pas besoin de payer l’entrée au musée) réunit autour de ses tables autant des duos parrain-neveu, des jeunes couples, trois générations autour d’un même brico, ainsi que des artistes solos.
« La ruche ressemble à un gros village. Et c’est justement notre but : recréer le village perdu. Il n’est pas rare d’y retrouver une quarantaine de personnes de tous les âges, de toutes les cultures. On peut facilement entendre plusieurs langues parlées en même temps ici ! » dit-il de son joli accent anglo. D’ici la fin de juillet, Stephen prévoit que 1000 créateurs seront venus butiner dans la ruche inaugurée à la fin de mars.
Créateur de beau pour l’âme
Si Stephen a une formation en art-thérapie, l’environnement des ruches d’art n’a rien de clinique. Nul besoin d’une prescription pour avoir une raison de jouer avec du papier mâché ou de l’argile (le matériau le plus populaire de la ruche du MBAM).
Nos voisins de table vivent peut-être dans l’isolement, ils ont peut-être des troubles de santé mentale ou des problèmes d’ordre socio-économique, mais ça, personne ne le sait.
Les étiquettes restent à la porte, on oublie les diagnostics, ajoute Stephen Legari. « Il arrive que des gens aient des besoins plus en profondeur, et quand j’ai le privilège de connaître leur histoire, je peux alors faire des recommandations et leur obtenir de l’aide », ajoute le thérapeute qui travaille auprès du musée depuis quelques années.
Lorsqu’on lui demande ce qu’il a vu de plus beau se fabriquer à la ruche, il réfléchit longuement. « C’est quand je vois quelqu’un arriver ici par hasard et qui n’en croit pas ses yeux qu’un tel endroit existe.
« C’est quand je vois un échange se développer entre des gens qui ne se connaissaient pas du tout avant d’entrer.
« C’est quand, à la fin de quelques heures de création, un enfant accourt de l’autre bout de la salle pour me montrer ce qu’il a fait, attendant d’être valorisé par mon enthousiasme.
« C’est quand je m’installe à la porte d’entrée et que j’observe la trentaine de participants de tous les âges et de tous les horizons, en pleine création. À ce moment-là, je prends une bonne inspiration pour dire “merci”. Tout ça, c’est ce que la ruche crée de plus beau. »
Un concept qui essaime
Inspiré du réseau d’Art Hives américain, le Réseau des ruches d’art a vu le jour en 2011 grâce à l’initiative de Janis Timm-Bottos, professeure agrégée au Département de thérapies par les arts de l’Université Concordia. La première s’est établie dans le quartier Saint-Henri, mais depuis, 104 ruches ont été mises sur pied dans le monde, dont 45 sont installées au Québec (la plupart à Montréal).En plus d’offrir des heures d’ouverture différentes, elles ont toutes un petit quelque chose qui les distingue. Celle de Saint-Henri possède un jardin, alors que celle du Milieu, dans le Centre-Sud, est dotée d’un café. Pour trouver une ruche près de chez soi.
La ruche d’art du MBAM est quant à elle la première du réseau à s’associer à un musée. Elle n’a pas choisi le moindre, car elle s’est posée dans le tout récemment agrandi Atelier international d’éducation et d’art-thérapie Michel de la Chenelière, l’un des plus grands complexes éducatifs dans un musée d’art en Amérique.
Informations sur la ruche d’art du Musée des beaux-arts de Montréal et l’Atelier international d’éducation et d’art-thérapie Michel de la Chenelière.