Violences et mort du poète au Musée d'art contemporain

En 2010, John Zeppetelli, alors directeur de la Fondation DHC/ART, avait accueilli une exposition de Jenny Holzer sans pour autant avoir réussi à faire intervenir l’artiste sur l’architecture montréalaise. Les projections de mots dans l’espace public sont pourtant la grande signature de celle qui réside à New York.
Désormais directeur du Musée d’art contemporain de Montréal (MAC), Zeppetelli tient sa revanche : en 2017, dans le cadre de l’exposition hommage à Leonard Cohen, Holzer jettera son dévolu sur le silo no 5. Le retour en ville de l’artiste conceptuelle sera un des moments phares de l’année du MAC, qui dévoilait mardi sa programmation 2017.
« La première projection aura lieu le 7 novembre, pour marquer le 1er anniversaire de la mort de Cohen. Elle précédera l’inauguration de l’expo », confiait en conférence de presse John Zeppetelli.
L’année du MAC débutera en février par deux expositions dures, mais nécessaires, sur la « violence de masse », titre du colloque qui les accompagnera. À l’autre bout, en novembre, elle se conclura donc avec l’hommage posthume à Leonard Cohen.
La mort ne sera cependant pas seule à planer sur l’établissement cinquantenaire. Un retour créatif sur Expo 67 et les installations immersives et lumineuses du Danois Olafur Eliasson animeront les jours d’été.
Regards sur le monde
En février, le MAC réserve ses salles à deux artistes consternés par les horreurs du monde, la Mexicaine Teresa Margolles et le Montréalais Emanuel Licha. « Ce bloc d’expérimentation formelle et d’engagement social, comme l’énonce Zeppetelli, est une réponse, par pur hasard, à ce qu’on vit présentement, une sorte de néofascisme. »
De Margolles, que Zeppetelli avait aussi invitée dans ses années à la DHC, le solo Mundos réunira une série d’oeuvres marquées par la « violence endémique » au Mexique et en particulier à Ciudad Juárez, ville du nord du pays.
De Licha, jadis de la Triennale québécoise du MAC en 2008, le solo Et maintenant regardez cette machine tournera autour d’un film et d’archives sur le travail des correspondants de guerre. La machine en question, ce sont les hôtels où séjournent ces journalistes, notamment ceux que l’artiste a visités à Belgrade, Beyrouth, Gaza…
Olafur Eliasson, célébrité planétaire, n’a jamais exposé en solo au Canada. Le MAC fera donc une première en rassemblant cinq installations emblématiques de son travail, porté par les expériences scientifiques et corporelles. La lumière, le mouvement, les rapports au temps et à l’espace en sont les principaux éléments.
Eliasson aurait été informé qu’il exposerait au même moment que À la recherche d’Expo 67. Selon le musée, il en serait à ce point ravi qu’il serait prêt à y mettre du sien. Il faut dire que le retour sur l’exposition universelle consiste en une série de commandes d’oeuvres. Quinze artistes, surtout des Québécois, y seront, dont Stéphane Gilot, connu pour ses maquettes de pavillons et ses thèmes utopistes.
Le cas Cohen
C’était déjà connu : le MAC honorera Leonard Cohen par une exposition. Intitulée Une brèche en toute chose, celle-ci est soutenue à hauteur de 450 000 $ par les célébrations du 375e anniversaire de Montréal. Le projet, ambitieux, comportera plusieurs volets.
Si la participation du milieu musical avait en partie été déterminée (Jean Leloup, Ariane Moffatt, Lou Doillon), aucun nom des arts visuels n’était connu. Jenny Holzer, qui projettera sur le vieux silo les paroles originales et en français des chansons de Cohen, en est la première. D’autres noms s’ajouteront au compte-gouttes, étant donné la complexité du programme, dit-on au MAC.
« Plus qu’un hommage, ce sera une réflexion artistique sur le legs de Cohen. On n’a jamais fait une expo sur un musicien, et le 375e nous en a offert le prétexte. Cohen est profondément montréalais et à la fois international », raisonne John Zeppetelli.