Peinture partout

Vue d'ensemble de l'exposition CLICK HERE TO ENTER de Véronique Savard
Photo: Galerie Graff Vue d'ensemble de l'exposition CLICK HERE TO ENTER de Véronique Savard

La peinture, bien vivante, s’expose sous bien des formes à Montréal. Et sous le pinceau - ou la spatule, ou le doigt - d’artistes de toutes les générations. Pas besoin non plus de faire tout un plat, comme dans le cas de Projet peinture, manifestation pancanadienne dont le second volet vient d’être inauguré à la Galerie de l’UQAM, ou de Peinture extrême, thème qui rassemblera cet été vingt galeries privées. Des expos plus discrètes valent aussi le détour. En voici deux parmi celles en cours en juin.


Véronique Savard, remarquée lors d’un premier solo à Montréal en 2009, après plusieurs projets en périphérie, ressurgit dans une galerie marchande, à Graff. La facture des huit acryliques réalisées en 2012 et 2013 est similaire : lettres capitales et couleurs franches se font la lutte et tiennent presque un double discours. Un sur la peinture, ses codes, et un autre sur les réseaux de communication. La lisibilité est au coeur de ces tableaux grand format. Si les mots disparaissent sous des effets de camouflage, la rigueur formaliste, elle, s’effrite de partout.


Comme en 2009, Véronique Savard a puisé les phrases peintes dans les courriers électroniques - ses courriels, en bonne partie, ou ses pourriels. Le cybersexe criard a cédé la place à du vocabulaire, toujours en anglais, au sens plus obscur. Il concerne le commerce pharmaceutique, révélé par certains titres : Certified by Doctors, Miracle or Science, parmi les plus explicites.


De cet entrechoquement de formes et de mots, de plans horizontaux et de courbes et de verticales (les lettres), il ressort un plaisir contagieux pour corrompre l’ordre. Ça demeure sage, voire gentil - on est loin des esthétiques trash -, mais c’est justement parce que ce travail a une apparence soignée qu’il mord mieux. Véronique Savard réussit à traduire les subterfuges propres autant à une industrie qu’à un courant esthétique.


À l’édifice Belgo, la galerie Trois Points propose, avec l’expo Chacun montre à chacun, de révéler les sources d’inspiration des artistes. Cinq d’entre eux, quatre peintres et un photographe, se sont prêtés au jeu. Si l’exercice respire le fonds de commerce, voire le marché secondaire, il fait plaisir à voir. Les rapprochements stylistiques auront toujours de quoi étonner.


L’expo consiste en une série de jumelages à cheval sur les époques et parfois les frontières. Mario Côté réaffirme sa filiation avec Fernand Leduc, par des penchants similaires pour la couleur et la géométrie. Sylvain Bouthillette se montre redevable à Joseph Beuys, de qui il tient sa quête existentielle. Chez Evergon, sa fierté homo mise en scène plus d’une fois en photo découle d’une iconographie apparue dans les années 1950.


Richard Mill tire son minimalisme de son appréciation de l’oeuvre de Ellsworth Kelly. Le voisinage de leurs tableaux fait ressortir la tension et le côté organique qui sous-tendent même des compositions très dépouillées. L’abstraction chez Michel Daigneault, elle, s’inspire du paysage pratiqué par Pudlo Pudlat, artiste inuit décédé en 1992. Malgré la diversité de leurs compositions, leur palette, pâle, presque mate, les rend fort similaires.


 

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