Arts visuels - Daniel Spoerri et autres figures du hasard à la Biennale de Montréal 2011

On connaissait son thème — le hasard, inspiré de Mallarmé et de son Un coup de dés jamais n'abolira le hasard. Et son quartier général, l'ancienne École des beaux-arts de Montréal. Voilà maintenant, à cinq mois de sa tenue, que la Biennale de Montréal 2011 se dévoile un peu plus et annonce les artistes qui la composeront.

Le vénérable Daniel Spoerri, figure du Nouveau Réalisme et de Fluxus, y sera. Le photographe Ian Wallace, un des pères de l'École de Vancouver, aussi, avec six grands diptyques. Ainsi que Sophie Calle, l'extravagante plasticienne de Paris, et l'inclassable Jean-Pierre Bertrand, cinéaste puis artiste conceptuel, mais aussi l'Allemand John Bock ou le Français (un autre) Gilles Barbier, deux créateurs burlesques apparus sur la scène internationale peu avant l'an 2000.

Une centaine d'oeuvres de quarante artistes a été retenue par Claude Gosselin, toujours là, et son co-commissaire David Liss, l'ex-Montréalais aujourd'hui directeur du Museum of Contemporary Canadian Art de Toronto. Selon le communiqué diffusé vendredi par le Centre international d'art contemporain (CIAC), l'entité derrière la Biennale, dix pays seront représentés.

Les Québécois ne seront pas en reste, puisqu'ils bénéficient du principe du «50-50» cher à Gosselin depuis l'époque des Cent jours d'art contemporain (autant d'étrangers que de locaux, ou Canadiens). Parmi eux, notons Cozic (et ses objets trouvés) ou feu Guido Molinari (une de ses dernières séries traduisait en peinture Un coup de dés...), ainsi que des plus jeunes, comme Sylvie Cotton, Jean Dubois ou David Amstrong Six.

Dans son bureau en haut du métro Sherbrooke, Claude Gosselin a accepté de se faire plus bavard que le communiqué. L'École des beaux-arts, avec son annexe, le studio Cormier, précise-t-il, sera le seul lieu d'exposition. Excepté pour deux ou trois cas: oeuvres en plein air, films au Cinéma du Parc et, surtout, les toiles de Molinari qui inaugureront les salles de sa fondation.

La parution en 1897 du texte de Mallarmé demeure, pour M. Gosselin, un moment charnière, parce qu'il a amené «les artistes à repenser l'oeuvre d'art comme autre chose que seulement un objet». «Les règles ont changé, dit-il. Le poème avant, c'était des vers, des strophes, des pieds. Il est chamboulé au niveau de la mise en pages, de la calligraphie, de l'espace occupé. C'est ça le point de départ.»

Le directeur général et artistique du CIAC assure cependant que l'intention n'est pas d'illustrer Un coup de dés... Mais plutôt d'énoncer le hasard comme un des éléments à la source de la création. Cela s'imposait: rarement traité en exposition et pourtant incontournable, estime-t-il.

«Nous avons choisi des artistes qui ont une attitude favorable au hasard. Ils acceptent l'inattendu, l'aléatoire, l'interférence des autres...», dit encore M. Gosselin.

Pour le volet historique, la 7e Biennale aura des films sur Merce Cunningham et John Cage, mais rien sur les automatistes, trop vus à ses yeux. La présence de Spoerri, une première au Canada, aura aussi sa portée retour dans le temps. Celui qui est devenu célèbre dans les années 1960 avec ses tableaux-pièges faits de restes de repas viendra lui-même, à 80 ans, à Montréal. «On fera un beau dîner Spoerri», promet M. Gosselin.

La Biennale débute le 1er mai et débordera de l'art avec ses conférences sur le hasard et la science.

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Collaborateur du Devoir

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