Des monuments pour Perrault et Allende

Le cinéaste Pierre Perrault et l'ex-président chilien Salvador Allende auront chacun droit à un monument érigé à titre posthume à Montréal. Le comité exécutif de la Ville a entériné cette semaine deux projets allant en ce sens.
Réalisée par Roland Poulin, l'oeuvre célébrant M. Perrault sera érigée au parc de la Promenade-Bellerive, dans Mercier-Hochelaga-Maisonneuve, au coût de 127 800 $. Celle de M. Allende coûtera quelque 86 000 $ — dont 30 000 $ seront payés par l'Association des Chiliens du Québec (ACQ). Elle sera érigée au parc Jean-Drapeau par Michel de Broin.Dans le sommaire décisionnel du comité, on souligne que le fait d'installer une oeuvre d'art pour Pierre Perrault au parc de la Promenade permettra d'enrichir sa dimension culturelle... d'autant que ce projet viendra en quelque sorte compenser pour l'arrondissement la perte de la fameuse Joute de Riopelle, déménagée il y a six ans.
Décédé en 1999, Pierre Perrault a marqué comme peu d'autres l'histoire du cinéma québécois. On lui doit notamment les films Pour la suite du monde, Les Voitures d'eau, Un pays sans bon sens et La Bête lumineuse. Trois fois lauréat du Prix du Gouverneur général, M. Perrault a aussi laissé une oeuvre poétique riche derrière lui.
Pour ce qui est de M. Allende, il y a cinq ans maintenant que l'ACQ milite afin de doter Montréal d'un lieu de mémoire dédié à celui qui est mort dans le coup d'État dirigé par Augusto Pinochet en 1973. On désire une oeuvre «soulignant le projet de société démocratique» d'Allende: ainsi, le monument ne sera pas un portrait de l'homme, mais plutôt une représentation des «valeurs pluralistes qui ont inspiré son action politique».
L'histoire de Salvador Allende a profondément marqué celle du Chili. Le médecin devenu politicien a remporté une surprenante victoire à l'élection présidentielle de 1970. Dès lors, malgré les tentatives répétées de Washington pour réduire son action, Allende met en marche son projet de «voie chilienne vers le socialisme» basée notamment sur le respect de l'acte démocratique.
Cette expérience unique en Amérique latine a toutefois pris fin abruptement avec le coup d'État du général Pinochet, le 11 septembre 1973. La thèse officielle veut qu'Allende se soit suicidé dans le palais de la Moneda au moment de l'attaque des forces armées, quelques minutes après avoir livré un dernier discours à la radio.
Longtemps taboue au Chili, la célébration de la mémoire de l'homme se fait de plus en plus largement depuis quelques années.