Le cabaret La Tulipe sommé de baisser le volume

Le cabaret La Tulipe, situé dans l’arrondissement du Plateau Mont-Royal. La façade du bâtiment construit en 1913 et classé patrimonial est déjà en travaux depuis plusieurs mois.
Marie-France Coallier Archives Le Devoir Le cabaret La Tulipe, situé dans l’arrondissement du Plateau Mont-Royal. La façade du bâtiment construit en 1913 et classé patrimonial est déjà en travaux depuis plusieurs mois.

Poursuivi par un voisin importuné par le bruit, le cabaret La Tulipe à Montréal pourra continuer ses activités à condition de baisser le volume et d’insonoriser sa salle de spectacle, vient de trancher la Cour supérieure du Québec. L’arrondissement du Plateau-Mont-Royal promet de soutenir les propriétaires de l’établissement et de faire de ce dossier une priorité.

« Une chose est certaine, le cabaret La Tulipe est là pour rester », assure au Devoir le maire du Plateau-Mont-Royal, Luc Rabouin. Il doit rencontrer les propriétaires du mythique établissement de l’avenue Papineau cette semaine pour analyser plus en détail le jugement et prévoir la suite des choses.

Dans sa décision rendue le 15 mai, la Cour a conclu que « le bruit [émanant de La Tulipe] représente un inconvénient anormal et les [propriétaires de l’établissement] sont donc responsables […] pour les troubles de voisinage ». Ils devront verser à leur voisin Pierre-Yves Beaudoin la somme de 1250 $ pour les troubles et inconvénients subis.

M. Beaudoin a acheté l’immeuble adjacent en 2016, transformant l’espace commercial existant en un espace résidentiel. Dans sa poursuite lancée fin 2020, il indique que le bruit « fait vibrer murs et planchers des logements » de son immeuble accueillant 16 locataires et où lui-même a emménagé en 2017. Ce désagrément a de plus entraîné un « roulement anormal de ses locataires », le forçant à redoubler d’efforts pour en trouver de nouveaux.

Dans sa décision, le tribunal autorise La Tulipe à maintenir ses activités à condition de poursuivre ses engagements pour réduire le bruit émanant de sa salle. En clair, il doit baisser le volume de ses soirées et spectacles, mais aussi effectuer des travaux d’insonorisation du bâtiment.

Le groupe La Tribu, le gestionnaire et propriétaire de la salle, a déjà entamé des démarches pour effectuer les travaux. L’entreprise attend un permis de construction de la Ville de Montréal. La Cour a d’ailleurs ordonné que les travaux commencent dans le mois suivant la réception du permis. La façade du bâtiment construit en 1913 et classé patrimonial est déjà en travaux depuis plusieurs mois.

« Une richesse qu’on doit préserver »

Avec cette décision, le juge Azimuddin Hussain donne seulement en partie raison à M. Beaudoin, puisque ce dernier demandait à la Cour supérieure d’ordonner « de faire cesser le bruit provenant des appareils sonores de la salle de spectacle et bar La Tulipe ». Il réclamait également 40 000 $ en dommages. Une somme « injustifiée » selon la Cour. « Monsieur Beaudoin savait qu’il faisait l’acquisition de l’immeuble adjacent à La Tulipe, mais semble n’avoir considéré ni les conséquences ni les activités de l’entreprise », peut-on lire.

La Tribu n’a pas souhaité commenter la décision pour le moment, précisant avoir « besoin de temps ». Craignant pour la survie de La Tulipe, l’entreprise avait lancé un appel à l’aide sur les réseaux sociaux en décembre 2021. Elle avait alors indiqué crouler sous le poids des amendes et des démarches judiciaires à cause de cette chicane de voisins qui résultait d’une erreur de l’administration municipale. Celle-ci a octroyé par erreur à M. Beaudoin un permis pour passer d’un zonage commercial à résidentiel.

De son côté, le maire du Plateau-Mont-Royal a indiqué qu’il accompagnerait les propriétaires de La Tulipe et ferait de ce dossier une priorité. « La vitalité culturelle de la métropole et du Plateau est une richesse qu’on doit préserver », souligne-t-il.

La Ville de Montréal a par ailleurs entamé une poursuite judiciaire contre M. Beaudoin en janvier 2022 afin de faire « cesser l’usage résidentiel illégal » de son édifice. Même si la demande de transformation a été autorisée par erreur par l’administration municipale, l’utilisation actuelle du bâtiment adjacent à La Tulipe est non conforme à la réglementation d’urbanisme. Celle-ci prévoit qu’« un local occupé à des fins d’habitation ne peut être adjacent à un débit de boissons alcooliques ou à une salle de spectacle ».

Au moment où ces lignes étaient écrites, l’avocate de Pierre-Yves Beaudoin, Me Charlotte Dion, n’avait pas répondu aux questions du Devoir.

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