Démissions en bloc à l’UNEQ

Les membres de l’UNEQ ont approuvé lors de l’assemblée générale la vente de la Maison des écrivains.
Valérian Mazataud Le Devoir Les membres de l’UNEQ ont approuvé lors de l’assemblée générale la vente de la Maison des écrivains.

La présidente de l’UNEQ, Suzanne Aubry, et son directeur général, Laurent Dubois, annoncent leur départ, deux jours après une assemblée générale chaotique lors de laquelle les membres du syndicat ont refusé de lui verser une cotisation. L’ensemble du conseil d’administration a également remis sa démission.

« En rejetant cette résolution, les membres manifestent un désaveu de la vision stratégique portée par le conseil d’administration de l’UNEQ », indique-t-on dans un communiqué envoyé vendredi, après 36 heures de silence radio.

L’UNEQ souhaitait imposer une cotisation de 2,5 % sur les revenus de ses membres, et de 5 % sur ceux des auteurs non membres. À la suite d’une assemblée générale marquée par de longs débats cacophoniques, les membres ont refusé la proposition à près de 56 %. Ils sont 40 % à l’avoir appuyée. Un peu moins de 4 % des 443 personnes qui étaient toujours connectées au moment du vote se sont abstenues.

La présidente démissionnaire, l’écrivaine Suzanne Aubry, a tenu toutefois à réitérer vendredi qu’elle croyait toujours que la syndicalisation des auteurs était nécessaire pour obtenir de meilleures conditions de la part des éditeurs. « Les membres du conseil d’administration demeurent convaincus de la nécessité absolue de négocier collectivement des conditions minimales pour les artistes de la littérature. Il reviendra à une nouvelle équipe d’élus de bâtir une autre proposition pour atteindre cet objectif tant attendu depuis des décennies », a-t-elle indiqué.

Sa démission, comme celle des six autres membres du conseil d’administration, prendra effet le 31 mai. Le directeur général, Laurent Dubois, qui a été vertement critiqué durant le débat sur les cotisations, quittera aussi son poste à cette date.

Saga sans fin

Depuis l’adoption de la nouvelle Loi sur le statut de l’artiste l’an dernier, l’UNEQ a le pouvoir d’imposer des cotisations syndicales sur les revenus des auteurs. Elle a surtout reçu, avec cette vaste réforme, le mandat de représenter l’ensemble des auteurs au Québec, membres comme non membres, jusqu’en 2025. Auparavant, les auteurs négociaient individuellement leur contrat avec leur éditeur.

Des négociations ont d’ailleurs déjà été entamées avec les deux principales associations d’éditeurs : l’Association nationale des éditeurs de livres (ANEL) et le Groupe Sogides (Québecor). Pour mener à bien ces pourparlers, l’UNEQ disait avoir besoin de revenus supplémentaires, d’où la volonté de mettre en place des cotisations.

Afin de renflouer ses coffres, l’UNEQ a également choisi de vendre son siège social historique, la Maison des écrivains, près du square Saint-Louis, à Montréal. Une autre décision contestée, mais qui a été néanmoins approuvée lors de l’assemblée générale extraordinaire de mercredi. Cela dit, le syndicat se donne 18 mois pour passer la main à un nouvel acquéreur qui s’engage à perpétuer la vocation littéraire de la maison. Au bout de ce moratoire, si aucun projet en lien avec la littérature n’est trouvé pour occuper les lieux, le bâtiment ancestral sera mis en vente sur le marché.

La courte majorité de 14 voix pour la vente de la maison est cependant remise en doute par certains, car le vote a été marqué par plusieurs problèmes techniques.

L’UNEQ, qui compte aujourd’hui 1800 membres, est contesté depuis plusieurs mois par plusieurs auteurs, qui lui reprochent entre autres son amateurisme. Rappelons que la décision d’imposer des cotisations à l’ensemble des auteurs au Québec avait été initialement approuvée à la suite d’une assemblée générale à laquelle ne participaient que 46 personnes. L’UNEQ était finalement revenue sur sa décision en acceptant d’organiser une nouvelle assemblée générale, mais, sur le fond, sa position sur les cotisations était demeurée la même.

Maintenant que la proposition de l’UNEQ a été rejetée par ses membres, et que l’ensemble de son conseil d’administration a démissionné, le syndicat a-t-il toujours la légitimité pour représenter l’ensemble des auteurs au Québec aux yeux du ministre de la Culture ? Mathieu Lacombe n’a pas voulu se prononcer vendredi. « Je prends acte de la décision de l’UNEQ, qui traverse une zone de turbulences », a-t-il simplement précisé par courriel.

Le ministre doit cependant rencontrer les dirigeants de l’UNEQ dans les prochains jours pour faire le point sur la situation. « Nous aurons aussi l’occasion de voir si on peut leur offrir un soutien quelconque », de préciser Mathieu Lacombe.

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