«BARKA»: joyeux bordel

Hier soir avait lieu la première du spectacle BARKA, en ouverture du festival Complètement cirque qui se tiendra jusqu’au 17 juillet prochain. Dans une ambiance festive et un brin de philosophie, la compagnie pluridisciplinaire GIROVAGO nous transporte dans sa barque imaginaire, où les rêves de chacun s’emmêlent, au rythme effréné des percussions caribéennes colombiennes.
Sous le grand chapiteau de la TOHU, une danseuse prend place dans le public, puis un chanteur qui entame une première chanson. Percussions, clarinette, saxophone, tuba et violon prennent ensuite peu à peu la scène et suivent le chanteur. Dès le départ, on est emporté par les rythmes dansants et festifs qui remplissent le chapiteau. La danse elle aussi s’unit aux sonorités avec trois danseurs principaux qui abordent des longues jupes colorées, comme en Colombie, d’où sont originaires les créateurs de la compagnie.
À travers les paroles de la chanson, mais aussi la narration, on comprend rapidement que ces joyeux personnages souhaitent nous amener dans leur barque, où chacun peut imaginer ses rêves les plus fous.
Les réjouissances battent leur plein. Dans une complicité touchante, les 11 artistes inondent la scène dans leur bonne humeur, déambulent et se taquinent. Pendant 1 h 30, ce joyeux bordel sera le fil conducteur de cette création. Mais cela dépasse le simple divertissement. En effet, tout au long du spectacle, les agrès traditionnels du cirque sont utilisés de façon très ingénieuse. La roue de Cyr sert de volant du bateau par exemple, les planches d’équilibres servent à la fois pour les acrobates, mais aussi pour le chanteur qui utilise chaque rebord de la scène, les poteaux deviennent parfois des scènes pour quelques musiciens…
Ainsi, les numéros s’enchaînent sans pour autant être attendus. Ils se fondent dans la narration et la construction et déconstruction constante des éléments de décors, eux-mêmes utilisés comme des agrès. Les chansons et les habiletés techniques circassiennes s’entrecroisent, subjuguant ainsi constamment le public. Il suit alors l’aventure marine à travers une performance de corde, des jeux d’équilibre ou encore du jonglage avec des quilles.
De plus, les artistes convient à plusieurs reprises les spectateurs à participer. Il est alors question d’entrer dans la danse, de chanter et de taper des mains tous ensemble. Le froid chapiteau se réchauffe alors et devient un véritable party.
Optimisme et réflexion
Au-delà de la performance circassienne, dont la technique reste sans prétention, la compagnie cherche à aller plus loin et à délivrer une histoire. En effet, peu importe la maîtrise parfaite des mouvements, l’exactitude des postures, on s’attache aux personnages et à leur traversée de l’océan. De A à Z, on est suspendus aux lèvres du narrateur qui explique le déroulement de la situation et on reste toujours dans la joie grâce à la musique plus qu’entraînante.
Ainsi, de fil en aiguille, l’histoire dépasse le cirque et amène même à la réflexion. En effet, c’est l’inconnu qui attend ses joyeux moussaillons. Sont-ils trop pressés d’aller ailleurs ? Ont-ils pris le temps d’écouter pour avancer dans cette voie nouvelle ? Bien qu’il ait été prévenu par un personnage loufoque et maladroit, l’équipage continue à naviguer jusqu’à… on ne dira pas la fin pour ne pas divulgâcher celles et ceux qui souhaitent embarquer dans BARKA.
L’équipage des joyeux lurons livre à travers leurs gestuels, leur musique et leur danse une création légère et plein d’humour. Mais cela dépasse là encore la simple naïveté et le plaisir. On y décèle aussi l’importance de la communauté, de l’équipe et la bienveillance constante entre eux.
Enfin, un grand optimiste sort de cette pièce. Malgré les épreuves, malgré les variables énigmatiques, les matelots restent encore et joyeux, toujours prêts à faire la fête et à trouver, en chaque situation, le côté positif. On part de là un grand sourire aux lèvres, les harmonies du sud dans le coeur.