La ministre de la Culture serre la vis aux entreprises «coquilles»

La ministre de la Culture, Nathalie Roy
Photo: Jacques Boissinot La Presse canadienne La ministre de la Culture, Nathalie Roy

La ministre de la Culture, Nathalie Roy, a entendu les critiques du milieu culturel et amende son projet de loi sur le statut de l’artiste afin de serrer la vis aux entreprises « coquilles », qui sont légion dans le secteur de l’audiovisuel.

Ces compagnies sont spécifiquement créées pour un seul projet et sont dissoutes lorsque celui-ci se termine. Or, souvent, les producteurs qui en sont à l’origine ne sont pas membres d’une association en règle, ce qui oblige les syndicats à négocier à la pièce avec eux les conditions de travail des artistes.

Celles-ci sont d’ailleurs souvent moins reluisantes sur ces tournages que sur les plateaux soumis à une convention collective en bonne et due forme. Pire : les syndicats disent avoir régulièrement du mal à faire respecter les contrats, comme ces entreprises « coquilles » ne se sentent plus tenues de les honorer une fois qu’elles disparaissent.

« Il faut une forme de reddition de comptes. Surtout quand il y a une subvention qui est octroyée à ces producteurs. Ce n’est pas possible qu’en 2022, des fonds publics soient accordés à des producteurs qui donnent des conditions de travail qui sont en deçà des normes », a pourfendu la présidente de l’Union des artistes (UDA), Sophie Prégent, en entrevue au Devoir mercredi, au lendemain de son témoignage en commission parlementaire.

L’Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (ARRQ) et la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) regrettaient aussi que le projet de loi sur le statut de l’artiste n’aille pas assez loin sur cette question.

Finalement, la ministre Roy a proposé mercredi un amendement pour que les producteurs soient tenus de respecter les engagements de leur ancienne société « coquille » durant un certain laps de temps. La ministre de la Culture n’obligera pas cependant les producteurs à être membres d’une association, comme le réclamait l’UDA.

Autrement, l’étude de la réforme sur le statut de l’artiste se déroule rondement depuis deux jours, et le cabinet de la ministre a toujours bon espoir de faire adopter le projet de loi 35 avant la fin de la session parlementaire.

La députée libérale Christine St-Pierre s’est toutefois désolée mercredi que les protections conférées en vertu de la nouvelle loi sur le statut de l’artiste ne s’étendent pas aux journalistes indépendants, eux qui ont vu leurs conditions de travail se dégrader considérablement dans les dernières années.

« Si quelqu’un qui écrit un livre de recettes est considéré comme un artiste dans la loi, on peut reconnaître que les journalistes indépendants font un travail aussi noble. […] Les journalistes indépendants en arrachent. Ça changerait la vie de dizaines de personnes », a plaidé la députée de l’Acadie à l’ouverture de la commission parlementaire.

Sa proposition d’amendement a finalement été rejetée par la ministre de la Culture sous prétexte « qu’un journaliste n’est pas un artiste ». « [La réforme du statut de l’artiste] n’est pas le bon véhicule », a statué Nathalie Roy.

Rappelons que le projet de loi 35 permettrait notamment aux artistes de recourir plus facilement au Tribunal administratif du travail, en plus de leur faire bénéficier de protections supplémentaires en cas de harcèlement dans leur milieu de travail. La réforme engloberait non seulement le secteur de l’audiovisuel et des arts de la scène, mais aussi les écrivains et les artistes visuels, qui pourraient dès lors jouir d’une convention collective plutôt que de devoir négocier seuls leur contrat.

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