Les trésors nationaux détenus par les Sulpiciens demeurent inaccessibles

En vertu de la Loi sur le patrimoine culturel, la ministre de la Culture et des Communications (MCC), Nathalie Roy, a annoncé lundi qu’elle procédait au classement officiel des biens patrimoniaux de la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice, soit leurs archives, leur collection de livres rares et anciens ainsi que leur vaste collection de biens mobiliers.
Rien ne change pour l’instant. Le classement officiel, a tout au plus indiqué le MCC dans un communiqué lundi, « ouvre la voie à une nouvelle collaboration entre la Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice, le centre d’archives des Sulpiciens et Bibliothèque et Archives nationales du Québec, afin de préserver et de faire connaître la valeur historique et artistique de ces biens ». Aucun projet concret ou de développement n’a été annoncé de ce côté.
À l’été 2020, par mesure d’économie, les Sulpiciens avaient licencié pratiquement tout leur personnel voué à la protection et à la conservation de leurs trésors, comme l’avait rapporté Le Devoir.
Marc Lacasse, l’archiviste jusque-là responsable de ces biens, avait alors signifié sa très vive inquiétude. La communauté des historiens et des archivistes lui avait emboîté le pas. Le patrimoine documentaire et matériel des Sulpiciens, ces anciens seigneurs de l’île de Montréal, concerne les débuts de la Nouvelle-France en général et la fondation de la métropole en particulier, sans parler de la somme considérable d’œuvres d’art, de pièces de mobilier, d’orfèvrerie, de monnaie, d’éléments de l’histoire naturelle et de vestiges archéologiques.
L’an passé, suivant ces révélations faites par Le Devoir, la ministre Nathalie Roy avait publié un avis d’intention de classement. Cet avis protégeait d’emblée l’ensemble des documents et des artéfacts, aux termes de la loi.
BAnQ en soutien
Plus d’un an plus tard, avec ce classement officiel, la situation précaire de l’entreposage, du classement et de l’accès aux documents demeure cependant inchangée. Les plus anciens documents datent de 1291, mais le cœur sensible est plutôt à situer du milieu du XVIIe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle.
L’annonce officielle de classement indique que Bibliothèque et Archives nationales du Québec, le grand orchestrateur des archives au Québec, se voit consentir un rôle mineur, ce que confirme l’institution. Ces biens nationaux ne seront pas pris en charge par ses soins.
Dans une déclaration écrite transmise au Devoir, la conservatrice et directrice générale des Archives nationales à BAnQ, Hélène Laverdure, indique que le rôle de son institution se résume à « accompagner la corporation Univers culturel de Saint-Sulpice (UCSS) en lui offrant notamment un service-conseil afin que ces archives soient accessibles le plus rapidement possible aux citoyens ». Un comité de suivi, réunissant le ministère de la Culture et des Communications, UCSS et BAnQ, a été créé afin de soutenir les actions en cours et à venir.
Il n’est pas question, pour l’instant, d’engager des archivistes responsables, comme par le passé, d’assurer l’accès, la conservation et le développement de ce fonds d’archives que les experts considèrent comme l’un des plus importants au Canada. « Les services d’un nouvel archiviste s’avéreront effectivement nécessaires », explique au Devoir Mario Lafrance de l’UCSS. « Quant à l’accessibilité à ces archives, aucune date n’a encore été déterminée », a-t-il ajouté, même s’il espère que cela pourra se faire rapidement.