Marie Grégoire avait la bénédiction du CA de BAnQ

BAnQ doit effectuer un virage numérique majeur si elle veut rester pertinente parmi les grandes bibliothèques et institutions de mémoire du XXIe siècle.
Photo: Olivier Zuida Le Devoir BAnQ doit effectuer un virage numérique majeur si elle veut rester pertinente parmi les grandes bibliothèques et institutions de mémoire du XXIe siècle.

Le choix de Marie Grégoire comme p.-d.g. de Bibliothèque et Archives nationales du Québec n’a pas été imposé par le gouvernement Legault, contrairement à ce que des voix critiques ont avancé. Selon ce qu’a appris Le Devoir, c’est plutôt le CA de l’institution qui a donné son approbation à la candidature de l’ex-députée adéquiste, ainsi qu’à celle d’une autre personne au « profil très différent », laissant ainsi au Conseil des ministres le soin de trancher.

Depuis son annonce, le 7 juillet, la nomination de Mme Grégoire à la tête de BAnQ a soulevé plusieurs critiques, particulièrement dans le milieu des bibliothèques et des archives. Certains ont dit voir là une nomination purement politique.

Deux sources bien au fait du dossier ont confirmé sous le couvert de l’anonymat que Marie Grégoire avait reçu la bénédiction du conseil d’administration. La communicatrice et gestionnaire a livré une excellente entrevue, ce qui a joué en sa faveur. Mené par un comité resserré de trois membres du CA, l’entretien compte des questions très pointues sur la vision des candidats pour l’avenir de BAnQ, ainsi que sur la situation actuelle de l’institution.

Le conseil d’administration a soumis à cet exercice quatre aspirants p.-d.g. parmi la vingtaine de candidatures reçues pour remplacer Jean-Louis Roy, qui a quitté ses fonctions le 3 juin dernier.

Guylaine Beaudry, bibliothécaire en chef de l’Université Concordia, y a notamment été invitée. Mme Beaudry était également directrice générale d’Érudit, une plateforme virtuelle qui rassemble des revues savantes de la francophonie, et elle implante la stratégie numérique institutionnelle pour l’Université Concordia. Aussi, Élaine Ayotte, ex-journaliste, ex-conseillère municipale pour Vision Montréal (2009) et ambassadrice du Canada à l’UNESCO. Et Mme Grégoire.

Le ministère de la Culture soutient depuis la désignation de Marie Grégoire à la tête de BAnQ avoir suivi l’avis du CA de l’organisme. Ce dernier ne peut confirmer officiellement l’information, car tous ses membres sont liés par une entente de confidentialité couvrant toute la durée du processus de recherche et d’embauche, et au-delà. « La ministre Nathalie Roy a bien suivi l’une des recommandations du conseil d’administration de BAnQ », a précisé son attachée politique, Geneviève Gouin, mercredi après-midi.

Dans sa réaction publique la semaine dernière, la Fédération des milieux documentaires laissait entendre que Mme Grégoire avait été nommée sans l’accord du CA. Des membres du CA de BAnQ sont membres de la Fédération. « Le CA […] a effectué une recherche de candidat·e·s potentiel·le·s selon un processus exigeant, engageant du temps et des coûts, peut-on lire dans la missive datée du 8 juillet. Selon nous, il aurait été de l’intérêt supérieur de BAnQ d’écouter ces recommandations. Les administrateur·trice·s de BAnQ ont une grande connaissance de l’institution et sont les mieux placé·e·s pour trouver la personne idéale, qui répond au mieux au profil de compétences exigé pour le poste. » Dans le milieu, d’autres professionnels se sont interrogés sur les lacunes de Mme Grégoire en bibliothéconomie, sur son manque d’expérience en gestion d’organismes similaires ou sur sa connaissance du milieu culturel. À l’inverse, certains ont estimé que Mme Grégoire risque d’avoir au sein du gouvernement l’écoute nécessaire pour améliorer le sort de BAnQ.

La ministre Nathalie Roy a bien suivi l’une des recommandations du conseil d’administration de BAnQ

 

Collaboration assurée

Au sein de la plus importante institution culturelle du Québec, certains sont ravis de l’arrivée de Marie Grégoire. Les trois directeurs généraux, Martin Dubois (Grande Bibliothèque), Hélène Laverdure (Archives nationales) et Maureen Clapperton (Bibliothèque nationale) ont assuré à la nouvelle p.-d.g. leur « entière collaboration et celle de [leurs] équipes », dans une lettre de bienvenue dont Le Devoir a pu lire des extraits. Mme Grégoire est aussi allée de son propre chef à une première rencontre avec le CA mercredi après-midi, dont les membres étaient presque tous présents et lui auraient garanti leur désir de collaboration. L’accueil aurait été des plus chaleureux des deux côtés, selon les sources du Devoir.

Mme Grégoire prend les rênes de BAnQ à un moment difficile pour ce navire amiral des bibliothèques et des archives québécoises. Ses finances sont mal en point : BAnQ pourrait creuser un déficit de quelque 85 millions d’ici 2025, selon un diagnostic stratégique établi par la firme Raymond Chabot Grant Thornton, si sa subvention principale, octroyée par Québec, n’est pas rajustée.

Dans le même temps, BAnQ doit effectuer un virage numérique majeur si elle veut rester pertinente parmi les grandes bibliothèques et institutions de mémoire du XXIe siècle. Les coûts de cette ample transformation ne font pas partie des prévisions budgétaires.

Mme Grégoire prendra ses fonctions le 9 août prochain.

Avec Marco Bélair-Cirino 

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