Une bouffée d'air pour Téléfilm Canada

Le ministre du Patrimoine canadien et du Multiculturalisme, Pablo Rodriguez, débloque 7,5 millions de dollars pour aider Téléfilm Canada à combler un trou budgétaire menaçant plusieurs tournages francophones en 2019-2020. Le montant ponctuel s’ajoute à une somme de 2,5 millions dégagée par la société d’État elle-même.
Désirant favoriser la « stabilité » entourant la gouvernance de Téléfilm, le ministre a aussi annoncé jeudi deux nouvelles nominations au conseil d’administration de l’organisme. Robert Spickler, administrateur de la culture chevronné au Québec, est nommé président du conseil, et Karen Horcher, comptable agréée de la Colombie-Britannique, y arrive comme membre.
Les dix millions salvateurs viennent compenser un manque de fonds révélé à M. Rodriguez lors d’une rencontre avec des représentants de l’industrie cinématographique québécoise le 4 avril dernier.
Le déficit provenait du transfert d’une partie de l’enveloppe budgétaire de 2019-2020 pour financer les productions de 2018-2019. Trois dirigeants de Téléfilm, cumulant plus de 60 années d’expérience, ont ensuite été congédiés dans la foulée de cette histoire.
Un pèlerin à Ottawa
L’annonce du renflouement (non récurrent) a été faite jeudi devant quelques représentants de l’industrie cinématographique québécoise reçus au bureau régional des ministres fédéraux, dans le Vieux-Montréal. La directrice générale de Téléfilm, Christa Dickenson, assistait à la rencontre.
« Nous avons eu une excellente rencontre, dit au Devoir le ministre Rodriguez. Elle jette les bases d’un dialogue important. »
Le milieu cinématographique québécois a aussi réagi très favorablement à la rencontre et à l’injection de fonds supplémentaires pour soutenir la production audiovisuelle. « Nous tenons à vous remercier sincèrement », écrivent huit organismes signataires d’une lettre adressée jeudi après-midi à M. Rodriguez.
Le ministre explique qu’il n’a pas retiré de fonds culturels pour allouer les 7,5 millions à la production de films. « Je suis parti avec un bâton de pèlerin et je suis allé chercher de l’argent supplémentaire. Les millions ne sont pas enlevés au Patrimoine. Il y avait urgence, mais pour moi, c’était bien important de trouver de nouveaux fonds. »
Il souligne que cet argent ne sert pas seulement à sauver la production de films, mais bien à protéger toute une industrie, ses travailleurs et ses artisans. « On pense toujours aux grands noms que l’on voit à l’avant-scène, les acteurs ou les réalisateurs. C’est aussi une excellente annonce pour ceux qui travaillent plus dans l’ombre, des preneurs de son aux éclairagistes. Toute l’industrie et les familles qui en dépendent sont concernées par cette bonne nouvelle. »
La crise
L’ajout de fonds règle le problème financier. Reste à voir si la crise de confiance du milieu envers la direction de l’organisme fédéral va perdurer.
« Si la direction de Téléfilm Canada tente de faire porter l’odieux de ce manque de financement à trois personnes de la direction, c’est honteux et indigne », écrivaient les mêmes représentants des principaux joueurs de l’industrie cinématographique québécoise dans une première lettre commune diffusée début mai.
« Il y a deux éléments dans les décisions annoncées, réplique maintenant le ministre Rodriguez. Un premier règle le problème à court terme des besoins de financement supplémentaire. Un autre agit sur le moyen et le long terme. Les deux nominations viennent renforcer la gouvernance de Téléfilm. Je ne vais pas m’ingérer dans la gestion de Téléfilm. Il faut toutefois s’assurer que nos producteurs jouissent d’une stabilité et d’une prévisibilité. »
Téléfilm Canada soutient le financement des productions audiovisuelles originales par l’entremise du Fonds du long-métrage. En 2018-2019, son budget total s’élevait à près de 111 millions.