Netflix: Mélanie Joly renvoie la balle à Morneau

À Bill Morneau de se justifier. La ministre Mélanie Joly a refusé vendredi de défendre la décision de son gouvernement de ne pas imposer la TPS sur les produits de type Netflix. « C’est une décision du ministère des Finances », a-t-elle dit alors qu’elle était venue présenter à un public montréalais sa controversée politique culturelle.
« J’ai présenté une politique culturelle, et non fiscale », a notamment rappelé la ministre du Patrimoine canadien. « J’entends ce qui se passe au Québec, j’entends la réaction, et ça va me faire plaisir de la transmettre à mes collègues. La position [fiscale] du gouvernement est claire, mais je vous dis que j’entends ce qui se passe ici. »
Pressée de questions au sujet de la taxation des entreprises comme Netflix — un thème qui occulte depuis le début les autres éléments de la politique culturelle —, Mme Joly a chaque fois renvoyé la balle dans le camp du ministre des Finances, Bill Morneau. « Je suis responsable de la culture, il est responsable de la taxation. »
Mélanie Joly a ainsi évité le message souvent entendu depuis la fin septembre pour expliquer la position par rapport à Netflix — à savoir que le gouvernement ne veut pas augmenter les taxes de la classe moyenne.
Visiblement ébranlée par l’ampleur de la réaction négative à son projet de politique culturelle au Québec, elle a livré vendredi un discours reçu poliment — peut-être même froidement — par les invités de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM).
« On a tous entendu le trémolo dans sa voix », a remarqué devant les médias le président de la CCMM, Michel Leblanc, évoquant la fin du discours de Mme Joly. Critiquée vertement par plusieurs intervenants des milieux culturel, économique et politique depuis la présentation de sa politique, la ministre est apparue un brin nerveuse durant son allocution. « Je sais, comme politicienne, qu’il y a parfois des moments difficiles », a-t-elle simplement dit en point de presse.
M. Leblanc s’est montré satisfait du discours prononcé. « J’ai l’impression d’avoir entendu une ministre qui, pour la première fois, n’a pas défendu une décision, mais a dit “je vous entends”. »
Pas parfait
Sur le fond, Mélanie Joly a rappelé les grands objectifs de sa politique : soutien à la production et aux artistes, distribution du contenu canadien et consolidation du rôle de Radio-Canada. Mais elle s’est aussi beaucoup attardée sur l’entente signée par le fédéral avec Netflix — la compagnie américaine promet d’investir 500 millions en cinq ans pour la production d’oeuvres canadiennes.
« Je suis consciente que cette entente n’est pas parfaite », a-t-elle dit. Mme Joly a réitéré que l’investissement de Netflix « n’implique pas un congé de taxe de vente ». Elle a surtout pour la première fois clairement affirmé qu’il s’agit d’une solution temporaire.
Dans son discours du 28 septembre à Ottawa, Mélanie Joly soulignait que l’entente Netflix était « le type d’engagement que [le gouvernement] s’efforcera d’obtenir de la part d’autres plateformes » numériques. Aujourd’hui, elle reconnaît que « cette entente n’est pas une réponse durable à la question plus large [de savoir] comment nous allons travailler avec les plateformes étrangères qui pénètrent le marché canadien […]. C’est l’une des grandes questions de politique publique de notre époque. »
La réponse « durable » viendra, selon elle, de la révision de trois grandes lois — droit d’auteur, télécommunications et radiodiffusion —, de même que du mandat du CRTC (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes). Pour le moment, ce qu’elle a mis sur la table est une « politique de transition pour entreprendre de grandes réformes ».
Médias
Concernant la crise que traverse la presse écrite, Mme Joly n’a pas détaillé l’aide que le gouvernement promet pour 2018 — et qui, pour l’instant, ne semble concerner que les médias régionaux et les magazines.
Mais elle a souligné les « efforts de transformation de La Presse, du Devoir, du Journal de Montréal et du Groupe Capitales Médias » et a soutenu que le gouvernement est « disposé à soutenir cet exercice de grande transformation » du modèle économique traditionnel de la presse écrite.