L’entente Netflix doit être dévoilée, dit la Coalition pour la culture et les médias

«La coalition exige la transparence», a lancé lundi en conférence de presse Sophie Prégent, présidente de l’Union des artistes.
Photo: Jacques Nadeau Le Devoir «La coalition exige la transparence», a lancé lundi en conférence de presse Sophie Prégent, présidente de l’Union des artistes.

« Profondément choquée » par le traitement de faveur accordé à Netflix par le gouvernement fédéral, la Coalition pour la culture et les médias demande à ce que l’entente signée entre Ottawa et le géant américain soit rendue publique.

La coalition portera ce message de vive voix à la ministre du Patrimoine canadien, Mélanie Joly, lors d’une rencontre qui se tiendra ce mardi. Le cabinet du ministre québécois de la Culture, Luc Fortin, indique pour sa part que « le ministre souhaite aussi voir l’entente. Une demande a été faite en ce sens ».

« La coalition exige la transparence, a lancé lundi matin en conférence de presse Sophie Prégent, présidente de l’Union des artistes (UDA). On s’oppose et on s’opposera à toutes ces insaisissables ententes avec le gouvernement et ces mégacompagnies étrangères qui déterminent elles-mêmes les règles du jeu. »

Car Netflix n’est qu’une première étape, a-t-on compris à la présentation des orientations de la nouvelle politique culturelle fédérale, jeudi. « C’est le type d’engagement que nous nous efforcerons d’obtenir de la part d’autres plateformes également », a indiqué Mme Joly dans son discours.

C’est bien ce qui inquiète le front commun d’une quarantaine d’organismes, qui avait publié le 14 septembre le Manifeste pour la pérennité et le rayonnement de la culture et des médias nationaux à l’ère numérique. « Des petits vont se faire,déplore Mme Prégent. C’est le début d’ententes parallèles. Comment accepter une solution qui va créer un système parallèle, flou et inéquitable ? »

Déçus partout

 

Le communiqué de la coalition annonce une rencontre difficile pour la ministre : les signataires se disent « déçus par la proposition floue et l’incohérence de la vision du gouvernement canadien pour un Canada créatif » ; ils parlent d’une « entente Netflix qui ajoute l’insulte à l’injure », constitue « une atteinte à notre souveraineté culturelle » et crée un « dangereux précédent ».

« Le gouvernement Trudeau installe une cassure plutôt qu’une continuité par rapport au soutien public et à la réglementation des cinquante dernières années, qui ont permis de mettre sur pied l’écosystème culturel et médiatique canadien et québécois », écrivent des organismes qui représentent l’essentiel du milieu de la production culturelle québécoise et canadienne.

Au-delà de cette question Netflix (qui touche plus largement la relation du Canada avec les autres géants du Web), la coalition s’est aussi dite insatisfaite de plusieurs propositions de la politique culturelle. « La vision proposée n’offre aucune perspective pour des secteurs importants de l’univers de la communication et de la culture : la diffusion, la production et la création musicale, le livre dans son ensemble », mentionnent les signataires.

On évoque aussi une « gifle aux médias écrits ». À cet égard, la politique de Mme Joly est peu loquace sur la crise que traversent les médias écrits du Canada. Elle promet une modernisation du Fonds du Canada pour les périodiques, qui ne concerne toutefois pas les journaux quotidiens. Ottawa dit vouloir centrer son aide sur « l’innovation, l’expérimentation et la transition vers le numérique », tout en prévenant qu’il n’a pas « l’intention de soutenir les modèles qui ne sont plus viables ».

Au-delà de Joly

Malgré tout, la coalition dit vouloir maintenir le dialogue avec le gouvernement… et pas seulement avec Mélanie Joly. « Mme Joly est un bon soldat pour la défense de la position gouvernementale à l’effet de ne pas augmenter le fardeau fiscal,a soulevé Hélène Messier, p.-d.g. de l’Association québécoise de la production médiatique. Alors, nous allons porter notre message au-delà » de la ministre.

Par ailleurs, si les trois grands chantiers annoncés de révision des lois touchant le droit d’auteur, la radiodiffusion et les télécommunications sont bien accueillis par la coalition, on en espère des résultats probants et rapides. « Il y a déjà plusieurs réponses sur la table, soutient Solange Drouin, directrice générale de l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ). Que Mme Joly nous donne un échéancier serré pour ces consultations. Nous n’avons plus le luxe du temps. »

Le cabinet de Mme Joly n’a pas pu répondre aux questions du Devoir lundi.

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