Chapelles, crypte et biblio ouvertes au Grand Séminaire

Un des cinq biens patrimoniaux: l’escalier à cage ouverte de John Ostell, qui donne du cinquième étage un vertige en colimaçon.
Photo: Pedro Ruiz Le Devoir Un des cinq biens patrimoniaux: l’escalier à cage ouverte de John Ostell, qui donne du cinquième étage un vertige en colimaçon.

Si le Grand Séminaire de Montréal, construit par John Ostell de 1854 à 1857 sur le site de la mission de la Montagne (1675), bouffe de ses pierres une large part de l’avenue Sherbrooke Ouest, les visiteurs sont pourtant rares à arpenter ses dalles, à se joindre, le temps d’un passage, aux 19 séminaristes qui y sont en formation. Et c’est pour en inviter davantage que la Fondation du Grand Séminaire de Montréal faisait portes ouvertes mercredi sur ses chapelles, sa crypte, sa biblio et son étourdissant escalier à cage ouverte.

Le Grand Séminaire de Montréal est le seul séminaire au monde à appartenir aux prêtres de Saint-Sulpice, expliquait au Devoir Sébastien Froidevaux, de la Fondation du Grand Séminaire. Ailleurs, les diocèses sont propriétaires, et reprennent la responsabilité des lieux, ou en changent la vocation quand il y a lieu. Si le Grand Séminaire de Montréal est encore voué à la formation, abritant l’Institut de formation théologique de Montréal, l’affluence, on le sait, y a grandement diminué. En 1907, on y accueillait 135 séminaristes ; il y en a sept fois moins aujourd’hui. Trois prêtres ont été ordonnés en 2016 pour le diocèse de Montréal. Une centaine d’externes, hommes et femmes, poursuivent là en parallèle leur cheminement spirituel.

Cinq biens patrimoniaux classés

 

Que faire alors de ce bel espace, plein centre-ville ? De ce site qui a d’abord servi, en 1657, à l’évangélisation des Amérindiens ? Des objets et artefacts qui s’y sont accumulés ? M. Froidevaux rêve d’un musée, avec une galerie consacrée au peintre-prêtre Arthur Guindon (1864-1923). Mais il faudrait des millions en dons privés ; encore plus que ce qui est nécessaire à l’entretien.

Faisons connaître et découvrir l’endroit, déjà, avançait encore M. Froidevaux. D’autant que cinq des éléments architecturaux du Grand Séminaire ont été classés biens patrimoniaux en novembre dernier par le gouvernement du Québec. La très belle Grande Chapelle, qui fête cette année un respectable 110e anniversaire, est le plus spectaculaire. Le charme naît de la nef dégagée pour permettre les célébrations par réponses, des colonnes de marbre vert de Bordeaux, des mosaïques italiennes, des vitraux d’ici, des poutres de bois de la voûte (qui seraient toutes tirées d’un seul et même énorme arbre de la Colombie-Britannique), de l’orgue de la maison Guilbault-Thérien donné généreusement dans les années 1990, et de la fresque de Joseph St-Charles — une Présentation de la vierge au temple rare pour une abside —, un peintre autrement plutôt mondain, qui n’a pas pu résister à l’occasion de glisser un autoportrait dans sa composition…

Photo: Pedro Ruiz Le Devoir La petite bibliothèque où s’entassent 157 000 volumes, essentiellement en philo, théologie et droit.

Quelques mètres et quelques marches plus bas, ornée d’infiniment moins d’apparat, la crypte. De simples croix noires plantées dans la terre battue et la gravelle, où reposent des Sulpiciens, des columbariums pour les restes des dépouilles plus anciennes, rapatriées peut-être fémurs pêle-mêle. S’y côtoient des morts de 1661 à 2014, tous des hommes, de foi, dont les plus anciens ont oeuvré à la fondation même de Montréal. Les méthodes d’embaumement modernes et leurs produits chimiques qui portent les corps à se décomposer trop lentement dans ce sol, ainsi que le manque d’espace, font que désormais seuls les Sulpiciens qui désirent être incinérés pourront joindre là les leurs.

S’ajoutent aux biens patrimoniaux l’escalier à cage ouverte d’Ostell, qui donne du cinquième étage un vertige en colimaçon, la Petite Chapelle et la petite bibliothèque, où s’entassent 157 000 volumes, essentiellement en philosophie, théologie, droit canonique et pastoral.

Un petit trésor méconnu, en plein milieu de Montréal, qui cherche à s’ouvrir de plus en plus, puisqu’on pourra le visiter cet été, et y voir une exposition sur l’influence des Sulpiciens.


Les Sulpiciens en cinq dates

1640 Jean-Jacques Olier et Jérome Le Royer fondent la Société Notre-Dame de Montréal et obtiennent la concession de l’île de Montréal.

1645 Fondation des prêtres de Saint-Sulpice. Arrivée des quatre premiers Sulpiciens à Montréal en 1657.

1684 Remplacement de la palissade en pieux de la mission de la Montagne par de la maçonnerie. Les deux tours à l’entrée, rue Sherbrooke, en sont les seuls vestiges.

1857 Inauguration de la bâtisse actuelle du Grand Séminaire.

1990 Installation du nouvel orgue dans la Chapelle, de 16 pieds et 39 jeux.


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