Québec modernisera la Loi du livre à petites doses

Le gouvernement Couillard a fait son nid : la Loi du livre doit être modernisée, mais ses fondements demeurent bons. Québec privilégie donc une révision réglementaire de la loi 51 plutôt qu’une réouverture complète de celle-ci. Une décision fort bien accueillie par le milieu.
Le ministre de la Culture, Luc Fortin, a annoncé discrètement par communiqué jeudi soir — en plein Salon du livre de Montréal — la mise sur pied d’un « chantier de révision réglementaire » associé à la Loi du livre.
La démarche visera à « adapter les règlements en vigueur depuis 1981, pour les rendre plus conformes aux réalités des entreprises et en faciliter l’application ». On ne précise pas les contours précis du chantier, ni son échéancier. Mais plusieurs intervenants parlaient mardi d’un délai de 12 à 18 mois avant d’en voir les résultats.
Le ministre Fortin s’est dit « heureux de répondre à l’appel du milieu du livre » et estime que les travaux mèneront à un encadrement plus efficace des « pratiques commerciales dans ce secteur ». C’est le Conseil consultatif de la lecture et du livre qui devrait diriger les travaux.
Dans l’immédiat, tant l’Union des écrivaines et des écrivains québécois (UNEQ) que l’Association nationale des éditeurs de livres (ANEL) ou l’Association des libraires du Québec (ALQ) ont applaudi à la décision de Québec. « Nous sommes très satisfaits, indique Richard Prieur, directeur général de l’ANEL. La loi fait le travail, elle a simplement besoin de dents. La rouvrir aurait été ouvrir un panier de crabes. Ce n’était pas nécessaire. » Même réaction à l’ALQ : « Nous participerons avec grand enthousiasme », a dit Katherine Fafard, directrice générale.
Après une commission parlementaire sur le prix du livre neuf, après le dépôt d’un Plan d’action sur le livre, après quelques rondes de discussions-réflexions sur la loi 51 (notamment celle dirigée par Denis Vaugeois, dont le rapport a aussi été dévoilé jeudi), Mme Fafard ne pense pas que le nouveau chantier « indique que l’on tourne en rond ».
« C’est la dernière étape vers un réel changement, pense-t-elle. Oui, nous sommes consultés une fois de plus. Mais ça me semble sage de ne pas prendre les opinions de M. Vaugeois au pied de la lettre et de valider avec nous. »
Trois problèmes
Dans son rapport, M. Vaugeois — éditeur et ancien ministre, père de la loi 51 — conclut que « la loi 51 est appréciée, mais pas parfaite ». La solution choisie par Québec rejoint directement son interprétation : « Un grand nombre des défauts [de la loi] peuvent être réglés par une mise à jour ou une interprétation plus rigoureuse des règlements », écrit M. Vaugeois.
Il cite trois problèmes plus criants qui devraient faire l’objet d’une « action rapide » de la part du ministère.
Le respect des droits d’auteur : il suggère notamment de « verrouiller toute échappatoire » qui permet à un éditeur de retarder le paiement des droits à verser aux auteurs.
Le contournement de la règle de remise de 40 % : M. Vaugeois note que plusieurs éditeurs « étirent la définition » de ce qu’est un livre didactique. La chose a son importance : un libraire touche une remise de 40 % pour un livre standard, mais de seulement 30 % pour un ouvrage didactique.
À l’UNEQ, on se dit « très contents » d’un rapport qui donnerait une meilleure place aux auteurs dans la chaîne du livre. « Si M. Vaugeois est écouté et qu’il arrive à changer les règlements [sur les droits d’auteur], il est clair que ce serait un bon pas dans la bonne direction », estime la présidente Danièle Simpson.